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Quand Davos se pique de parler de pauvreté

Publié le vendredi 28 janvier 2005 à 09h07min

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En ce 26 janvier 2005, à la cité balnéaire helvétique de Davos (Suisse), les "grands" de ce monde se sont retrouvés pour examiner la santé économique et sociale de la planète. Une tribune que l’on a nommée Forum économique mondial de Davos.

Il s’agit ni plus ni moins d’un rassemblement de ceux pour qui les questions primaires (manger à sa faim, se soigner, s’instruire) sont résolues, et qui cherchent à résoudre celles des autres.

Ainsi, le gotha des sommités économiques et politiques cogite et propose des solutions pour sortir d’autres habitants de la terre du "trou". Pour la cuvée 2005, Davos a centré le débat sur la relance de l’aide aux pays pauvres, notamment ceux d’Afrique, une antienne très souvent entonnée quand les riches se rassemblent pour parler de l’état des lieux du développement mondial. Mais Davos prend tout de même un relief particulier cette année avec la présence de deux invités de taille : le chef de l’Etat français Jacques Chirac, et le Premier ministre britannique, Tony Blair.

Le Français, qui est à sa première participation à ce sommet, a assené ses vérités pour sortir l’Afrique de l’ornière à des personnalités a priori circonspectes. Par vidéoconférence, Chirac, n’ayant pas pu se rendre physiquement dans les Alpes suisses à cause du mauvais temps, a émis l’idée de "créer à titre expérimental "une taxe internationale sur les transactions financières internationales ou sur les billets d’avion, pour financer la lutte contre le Sida". Pas moins de 10 milliards, foi du président de l’Hexagone, seront nécessaires pour stopper la nette avancée de la pandémie du VIH/Sida, face à laquelle le monde commence à s’essouffler.

L’homme de la Corrèze estime qu’une taxe sur le carburant des avions et des navires et un "prélèvement d’un dollar" sur les trois milliards de billets d’avion vendus par an pourraient faire l’affaire. On le voit, Chirac a "frappé" fort avec ce paquet de bonnes propositions. Mais quels sont les nantis qui acceptent de se "saigner" pour sauver le "Sidarium" qu’est l’Afrique, selon Jean-Marie Le Pen du F.N. ? Du reste, le chef de l’Etat français sait que même avec des projets conçus par l’Afrique et pour les Africains, les pays du Nord rechignent à cracher dans le bassinet pour les accompagner. Les milles projets, tel l’actuel NEPAD, en sont des exemples patents.

Quant au P.M. britannique, il a tenu également un discours original à ce conclave des riches. Le locataire du 10 Downing Street a promis d’user de sa casquette actuelle de président du G8 (7 pays les plus industrialisés plus la Russie) pour booster les deux dossiers auxquels il attache du prix : la lutte contre le réchauffement de la planète et l’aide à l’Afrique face au Sida et au paludisme. Sur le premier problème, Tony Blair peut en effet compter sur l’engagement de certains membres du G8, mais il n’ignore pas que la Russie par exemple n’est pas un fervent partisan de la lutte contre la destruction de la couche d’ozone. Tony Blair aura donc d’abord à convaincre les plus grands pollueurs (Russie encore) pour inverser la tendance. Le second point soulevé par Blair ne manque évidemment pas d’intérêt pour l’Afrique : la lutte contre la pauvreté, sur laquelle il rejoint donc son homologue Chirac.

Mais l’entente s’arrête là, la solution proposée par Blair étant toute autre (comme l’est celle de Gordon Brown qui propose carrément un plan Marshall pour l’Afrique). "Nous devons ouvrir nos marchés, réduire nos subventions y compris sur des produits controversés comme le coton et le sucre", a affirmé le Premier ministre britannique. Une affirmation qui met du baume au cœur des hérauts (Bénin, Burkina, Tchad, Mali) de la lutte contre les subventions agricoles déloyales, notamment sur le coton. Pour ce dernier, il faut effectuer de vigoureuses réformes commerciales qui "enrichiront les pauvres et non le contraire". Les grands esprits se rejoignent, et sur cette question Blair et Chirac sont en osmose avec les participants à Davos, qui commencent à introduire le volet social dans leurs discours, au lieu de l’habituel libéralisme économique à tout crin.

Durant ces 5 jours (le Sommet se clôture ce dimanche) donc, les puissants se pencheront encore au chevet du continent noir. Des idées louables sont émises, d’autres sont certes du réchauffé, mais c’est toujours cela de gagné, car ça prouve que les problèmes ne sont pas rejetés aux calendes "suisses". Cependant il faudra qu’après chaque Davos, ces riches aillent au-delà des incantations, qui peuvent à la longue confiner à des vœux pieux. Des actions concrètes sur le terrain avec des bilans à des dates précises seront autant de faits qui prouveront que Davos n’est pas un raout pour répus en mal d’activités surmédiatisées.

Le fondateur du Forum de Davos, Klaus Schwab, en est conscient, et c’est pourquoi il prône l’action. Des actes issus de Davos relativiseraient également les griefs du reste fondés de l’autre sommet, celui dit des pauvres de Porto Alegre (Brésil), dont les participants (50 000 cette année) les altermondialistes, prônent l’avènement d’un "autre monde, qui est possible".

Zowenmanogo Dieudonné Zoungrana

Observateur Paalga

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