Condé a absolument besoin d’une majorité à ces législatives pour gouverner la Guinée comme il l’entend et mettre véritablement en œuvre les réformes économiques promises. Au vu de ce qui s’est passé au cours de ses trois années de pouvoir, l’on ne peut pas dire que le président guinéen ait vraiment eu les coudées franches dans la direction des affaires de son pays. Que ce soit dans le domaine politique ou économique, le leader du Rassemblement du Peuple de Guinée (RPG) a eu beaucoup du mal à imprimer sa marque dans la marche du navire guinéen. Bien sûr, ce n’est pas faute d’avoir tenté. On l’a vu par exemple sur la question des législatives où il essayé quelque fois d’imposer, sans succès, sa date.

L’opposition en face

En face, l’opposition guinéenne, sous la houlette de Cellou Dalein Diallo, son farouche challenger de la présidentielle de 2010, n’a guère voulu, lui laisser les mains libres. C’est de bonne guerre, l’avenir de Diallo dépend aussi de l’issue du scrutin. A défaut d’avoir été élu président, il se verrait bien dans la peau du chef de parti détenant la majorité à l’Assemblée nationale. Ce qui pourrait être non seulement un véritable tremplin pour lui dans la perspective de la présidentielle de 2015, mais aussi une revanche sur son adversaire. Mais, peut-être, bien plus que le leader de l’Union des forces démocratiques de Guinée (UFDG), l’issue des prochaines législatives guinéennes semble plus cruciale pour Alpha Condé.

Grande désillusion

En accédant en grande pompe le 21 décembre 2010 à la plus haute charge de l’Etat, Condé, même dans ses pires rêves, ne pouvait s’imaginer dans la situation qui a été la sienne au cours de ces trois dernières années : un président sans réels pouvoirs, de surcroît dans un système politique présidentiel. C’est pour lui, c’est sans doute la grande désillusion. Le pays étant en transition avec toutes les institutions de la République non encore mises en place, le leader du RPG ne pouvait guère se prévaloir de ses pleins pouvoirs de président en bonne et due forme. Il ne pouvait pas non plus favoriser l’organisation rapide des législatives sans être sûr de la force de frappe de son parti. Vu le contexte dans lequel il a été élu président (il n’avait que 18% au premier tour du scrutin contre 39% pour Cellou Dalein Diallo), Condé perdrait toute crédibilité si le RPG sortait perdant des législatives tenues dans le sillage de la présidentielle.

Les réformes économiques

Aujourd’hui, la formation présidentielle est-elle en mesure de remporter proprement les législatives du 28 septembre, si celles-ci se tiennent comme convenues ? Rien moins sûr. Cela d’autant plus que les partis de l’opposition, en particulier l’UFDG, ambitionnent de la surclasser. Or, Condé, on ne le dira jamais assez, joue son avenir politique dans ces législatives, si tant est qu’il nourrit l’ambition de se succéder à lui-même en 2015. Il lui faut absolument une majorité dans la future assemblée nationale guinéenne. C’est serait sûrement l’enfer politique pour Condé, si la majorité au parlement guinéen devait lui échapper. Il perdrait toute légitimité populaire pour mettre en œuvre ses réformes économiques, notamment celles relatives au secteur minier. En tous les cas, c’est aux Guinéens de décider de l’issue du scrutin de samedi. Wait and see.

Grégoire B. BAZIE

Lefaso.net