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Cour pénale internationale : Le vice-président kényan William Ruto à la barre

Publié le mardi 10 septembre 2013 à 22h45min

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Cour pénale internationale : Le vice-président kényan William Ruto à la barre

La première audience du procès du vice-président Kényan William Ruto a débuté ce 10 septembre 2013, à la Cour pénale internationale sise à La Haye au Pays-Bas. Il est accusé, avec le journaliste Joshua Sang Arap (38 ans, premier journaliste à comparaître devant la Cour), d’avoir fomenté des meurtres, persécutions et déportations de populations au cours des violences politico-ethniques qui ont meurtri le Kenya après la réélection contestée du président Mwai Kibaki en fin décembre 2007, faisant plus de 1 300 morts et plus de 600.000 déplacés.

Six ans après les violences post-électorales, des milliers de Kenyans sont toujours déplacés. C’est à eux-ci, à ceux qui sont morts, à ceux ont été blessés ou violés, que la procureure Fatou Bensouda dit vouloir rendre justice : «  Le chemin a été long et difficile depuis que mon bureau a ouvert l’enquête au Kenya en 2010. Nous avons dû surmonter de nombreux obstacles sérieux, et je veux remercier spécialement tous nos témoins, des hommes et des femmes courageux qui ont risqué leur vie et celle de leurs proches, qui ont résisté à des menaces permanentes et des tentatives de corruption, pour que justice puisse être rendue  ».

Cet argument ne tient pas, riposte Karim Khan, avocat du vice-président kényan William Ruto : « Ne vous laissez pas séduire par ce non-sens qui voudrait que des menaces ou tentatives de corruption aient pu affaiblir le dossier de l’accusation. En trois ans, et malgré les millions de dollars qu’il perçoit des contribuables du monde entier, le bureau du procureur n’a trouvé personne qui aurait pu s’illustrer par des intimidations ou du chantage sur les témoins. Ce dossier va s’effondrer au final par manque de preuves, parce que les cibles choisies ne sont pas les bonnes, et parce que les enquêtes ont été mal menées, mais pour aucune autre raison  ».

En tout cas, après la confirmation des accusations en janvier 2012, la procédure déclenchée contre les dirigeants Kényans a suivi son cours, en dépit des velléités de contestation de la juridiction de la Cour.

Et la première série d’audiences qui s’est ouverte ce jour, doit durer trois semaines. L’accusation, en l’occurrence Fatou Bensouda et son équipe, dispose encore de sept mois pour consolider et présenter ses éléments de preuves.

Des voix contre la tenue du procès des dirigeants Kényans à La Haye

Les dirigeants kényans font du lobbying pour essayer d’obtenir l’abandon des poursuites. Dans ce sens, une lettre à auteur inconnue officiellement, a été transmise au Conseil de sécurité de l’ONU qui n’a malheureusement pas mandat d’annuler une procédure de la CPI. Et le Conseil exécutif de l’Union africaine a, quant à lui, adopté il y a quatre mois, une résolution appelant la CPI à renoncer à ses procédures contre William Ruto et Uhuru Kenyatta. Le 27 mai 2013 en effet, l’institution panafricaine a réclamé le transfert de ce dossier de La Haye, siège de la CPI, à Nairobi, estimant que la justice kényane était désormais capable de le prendre en charge. Toute chose qui traduit l’irritation de nombreux pays africains, face aux multiples procédures visant les leurs (Côte-d’Ivoire, Ouganda, Soudan), même si la majorité des enquêtes ont été ouvertes à la demande des Etats concernés.

Dans la même dynamique de rejet, les parlementaires kényans de la majorité, ont fait adopter le 5 septembre dernier, une motion réclamant le retrait du Kenya du Statut de Rome, texte fondateur de la CPI. Toutefois, cet éventuel retrait ne peut avoir d’incidence sur les procédures déjà ouvertes à l’encontre des dirigeants kényans, même s’il marque, à tout le moins, un symbole fort dans le rejet de la Cour.

C’est maintenant un secret de polichinelle, la CPI fait l’objet de virulentes critiques qui la présentent comme étant une institution néo-colonialiste faisant de l’ingérence dans les affaires intérieures des Etats africains.

Et il est donné d’espérer que, si les Chambres spéciales sises à Dakar au Sénégal conduisent bien le procès de l’ex-président tchadien Hissen Habré, elles soient transformées en une sorte de Cour pénale africaine. Mais son véritable défi serait celui de la mobilisation des ressources – financières surtout – nécessaires à son bon fonctionnement.

En attendant, la CPI a franchi un pas majeur, en jugeant William Ruto, 46 ans, qui est un gouvernant en exercice. Et le premier procès contre un chef d’Etat en exercice, celui du président kényan Uhuru Kenyatta, est prévu pour débuter le 12 novembre prochain, également pour crime contre l’humanité.

Fulbert Paré

Lefaso.net

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