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Côte d’Ivoire : Des Burkinabè se prononcent

Publié le mercredi 10 novembre 2004 à 07h31min

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Les démons de la guerre se sont emparés à nouveau de la Côte d’Ivoire. Depuis le 4 novembre, les armes tonnent à nouveau dans ce pays jadis havre de paix. Compte tenu de l’histoire et de la géographie, ce qui se passe actuellement en Eburnie ne laisse aucun Burkinabè indifférent.

Pour avoir le point de vue des uns et des autres sur cet énième excès de fièvre au pays de feu Félix Houphouët Boigny, nous avons promené notre micro. De simples citoyens comme des responsables de structures de la société civile nous ont livré leurs sentiments. Nous avons aussi reçu la contribution écrite du poète Frédéric Assemption Ayereoué sur la situation en Côte d’Ivoire et intitulée "M. Chirac, appliquez la recette Bush".

Ousmane Nacro, président de la Ligue pour la défense de la justice et de la liberté (LIDEJEL) : "Il faut suspendre la constitution ivoirienne"

C’est un sentiment de regret et même d’énervement qui nous anime en ce moment. Tout ce qui a été arrêté à Marcoussis par les chefs d’Etat et les acteurs à trouver une solution politique à la crise ivoirienne est une fois de plus trahi par le président ivoirien. Cela vient conforter l’image d’un président que je qualifierai de dictateur, l’image d’un sanguinaire ou du moins d’un président qui ne veut pas du bien de son peuple. Si cela a été possible c’est à cause de la politique française en matière de gestion de la crise ivoirienne consistant à faire le ni ingérence ni indifférence.

Nous sommes d’autant plus indigné lorsque l’aviation ivoirienne a bombardé depuis jeudi (NDLR : 4 novembre) les populations civiles de Bouaké, la France n’a pas réagi pour anéantir les appareils. Il a suffi que 9 Français soient tués pour que la décision de destruction des appareils soit prise à telle enseigne que nous avons l’impression que les citoyens n’ont pas les mêmes droits. Il aurait fallu détruire les avions depuis les premiers bombardements au lieu d’attendre que du sang français se verse avant de le faire. Espérons que cette situation permette à l’opinion, aux institutions internationales, une fois pour toutes, de trouver des solutions rapides, efficaces, définitives pour anéantir les velleités guerrières de Gbagbo.

Comme propositions, nous dirons que pour que la paix revienne, il faudra songer à suspendre la constitution ivoirienne, à mettre en place un gouvernement de crise, à maintenir les échéanes électorales. Le gouvernement de crise pourra permettre aux propositions faites dans les différents accords et conventions de Marcoussis d’être appliqués afin d’aller à des élections libres, transparentes et ouvertes à tous.

Halidou Ouédraogo, président de l’UIDH : "Ce qui se passe est extrêmement grave"

Dès le début de la crise en Côte d’Ivoire, nous sommes intervenu à différents moments. Ce qui se passe aujourd’hui en Côte d’Ivoire est extrêmement grave. En attendant une déclaration que nous préparons, il faut considérer un certain nombre de points. En septembre 2002, la Côte d’Ivoire a été victime d’une tentative de déstabilisation. Partant de là, nous avons appelé les autorités ivoiriennes, les pays de la sous-région à travailler à une consolidation de l’Etat de droit en Côte d’Ivoire. Nous avons aussi appelé, au regard de la situation, à travailler à la réunification d’abord. Nous avons également appelé le président Gbagbo à assurer la sécurité des personnes des communautés étrangères en Côte d’Ivoire.

Nous référant aux accords de Linas Marcoussis et d’Accra, nous avons affirmé qu’il s’agit là d’une large base de discussion aussi avec la sous-région. Ensuite, au vu de l’évolution et de la dégradation de la situation, nous avons appelé les uns et les autres à persévérer dans la discussion et la concertation. Cette semaine il y a eu une évolution regrettable qui s’est soldée par un échec du désarmement, des bombardements de la zone occupée par les rebelles.

Eu égard à cela, nous ne pouvons pas cautionné des bombardements des villes et villages à l’intérieur d’un même pays. Ce qui est intervenu à la suite du bombardement de la caserne des militaires français et de la réaction de la France, nous ne cautionnons pas également la décision de la France. Quand le président Jacques Chirac a montré des réticences vis-à-vis de l’intervention, américaine en Irak, nous l’avons félicité. Il vient de faire pire. Il est intervenu sans l’aval de l’ONU. C’est après qu’il a introduit une résolution pour qu’on soutienne la France. Nous ne pouvons pas accepté cela.

Nous pensons que ce qui se prépare devrait viser à défendre la légalité, à travailler à la réunification du pays et à permettre un retour à la paix.

Kader Cissé, citoyen : "Houphouët n’a pas autant tué"

Je déplore tout ce qui se passe en Côte d’Ivoire. Le peuple ivoirien n’a pas demandé la guerre.

Mais c’est déplorable de voir les droits des citoyens bafoués. Si j’étais en Côte d’Ivoire, avec ce qui se passe, peut-être que j’allais me joindre à la rébellion. Sinon le peuple ivoirien n’est pas avec Gbagbo, il n’y a qu’une minorité qui est manipulée pour le soutenir, parce qu’il y a certainement des petits intérêts en jeu. Vous savez, quand on dit que quelqu’un est grand, ce n’est pas l’âge, c’est l’esprit. Je ne fais qu’épouser la pensée des Forces nouvelles de Guillaume Soro jusqu’au plus petit, parce qu’elles ont tenu compte jusqu’ici de l’opinion internationale, des différents accords ; c’est une grandeur d’esprit. Les Forces nouvelles ont bien fait de ne pas riposter aux frappes de Gbagbo parce qu’elles veulent la paix. C’est aussi l’occasion de laisser l’opinion en juger. Je lance un appel à tous les chefs d’Etat. Je leur demande de condamner Laurent Gbagbo ; c’est un monsieur sans parole et qui ne veut pas la paix.

Sinon pourquoi attaquer les Français alors qu’ils sont là pour veiller à la stabilité. Gbagbo est un diable et il n’y a que Dieu pour le punir en conséquence. Il doit être traduit devant le TPI (NDMR : Tribunal pénal international). Houphouët Boigny qui a dirigé la Côte d’Ivoire de l’indépendance jusqu’à sa mort n’a pas autant tué ; s’il tuait ainsi, Gbagbo lui-même ne serait plus là.
Le peuple burkinabè en a payé le plus lourd tribut. J’en appelle donc à soutenir les actions du président Compaoré.

Il y a deux ans, nous avions initié le Rassemblement populaire burkinabè (RPB), un mouvement spontané à travers lequel nous avions fustigé ce qui se passait en Côte d’Ivoire. Grâce à notre initiative, le peuple burkinabè, à l’unisson et autour du président, a condamné les exactions perpétrées par le pouvoir ivoirien contre les ressortissants de notre pays. Il faut dire que le président Compaoré est un visionnaire ; il avait déjà une vision très lointaine de la situation et après deux ans, aujourd’hui, nous constatons que Laurent Gbagbo est vraiment un "boulanger".

Personnellement, je lance un message au président Compaoré, qu’il persiste à ce que Gbagbo soit mis hors d’état de nuire ; je pense particulièrement à nos compatriotes en Côte d’Ivoire. A l’époque, certains ne nous avaient pas compris, mais l’histoire nous a donné raison et si c’était à refaire, j’allais le refaire. Nous devons rester vigilants. Quelque part, l’implication du Burkina dans cette affaire n’est que pure jalousie et traîtrise. Les gens sont jaloux du Burkina et de Blaise Compaoré. Que ce soit en Mauritanie ou en Côte d’Ivoire, tout est faux. Il ne faut pas que des gens arrivent à nous manipuler. Ils savent que nous organisons le Sommet de la Francophonie et que ça n’arrange pas leur affaire, donc ils nous accusent de tout. Il faut que nous soyons sereins. Sinon, pourquoi attendre que le Sommet soit proche pour nous accuser ?

Hermann Yaméogo, architecte : "Il faut suivre la Côte d’Ivoire de très près"

Nous avons tous été choqués par ce qui s’est passé depuis vendredi (NDLR : 5 novembre). Je pense que l’intervention française pour stopper Gbagbo dans son élan a été bonne. Ce n’est pas dans la violence qu’on peut résoudre la crise ivoirienne, il faut trouver des solutions politiques. Il ne faut surtout pas souhaiter que les Forces nouvelles contre-attaquent. D’ailleurs, il faut un gouvernement de transition qui va gérer la crise jusqu’à l’élection prochaine. Le Premier ministre Seydou Diarra est disqualifié. On doit renouveler la classe politique ivoirienne pour assurer la transition. Qu’on trouve des gens sans aucune prétention politique et qu’on permette à Gbagbo de se présenter. S’il se trouve que cette élection est transparente et équitable, Gbagbo ne sera pas réélu. Quant à l’attitude que doit adopter le Burkina dans cette affaire, c’est de rester vigilant comme l’a dit Guillaume Soro. Il faut suivre la Côte d’Ivoire de très près.

Antoine Zougmoré, citoyen : "Il faut que Gbagbo parte"

Tout est dû au mauvais comportement de Laurent Gbagbo. Il faut qu’il parte. Il faut de nouvelles élections, libres et transparentes. Ce qui est arrivé à la France doit lui servir de leçon. Elle doit s’en prendre à elle-même. Il a fallu que 9 Français soient tués pour qu’elle se rende compte que ça fait mal. Les Burkinabè, il y en a combien qui sont morts ? En tous cas, si Gbagbo est intelligent il démissionnera ou bien il organisera les élections. S’il ne veut pas qu’on le fasse partir comme Charles Taylor ou encore comme Jean Bertrand Aristide.

Donatien Sandwidi, enseignant à la retraite : "J’accuse Gbagbo"

Moi j’ai vécu pendant 30 ans en Côte d’Ivoire. C’est au regard du comportement de Gbagbo que j’ai précipité ma retraite pour rentrer. J’accuse Gbagbo. D’abord, sa manière de venir au pouvoir n’était pas du tout transparente et les populations en ont fait les frais. Si les Forces nouvelles n’ont pas réagi c’est parce qu’elle sont intelligentes. Elles veulent passer par les négociations, elles ne veulent pas passer par les armes. Quant aux Français, je pense qu’ils ont été bien payés ; il y a longtemps qu’ils devaient réagir. La France doit prendre ses responsabilités. L’Union africaine doit dire à Gbagbo de partir, lui faire savoir qu’on ne gère pas un pays comme on gère sa famille. Je loue le courage du peuple burkinabè, notamment le président, qui a su garder son sang froid jusque-là. C’est l’occasion maintenant de demander des comptes à Gbagbo.

Frédéric - Assomption Ayereoué, poète : "M. Chirac, appliquez la recette Bush"

A propos de la paranoïa qui sévit atroce et cruelle sur le beau, le fraternel peuple de Côte d’Ivoire je retiens le pertinent mot de Jeandaniel sur De Gaulle et la France : "Le destin de la France ayant été confondu, incarné, résumé, exprimé par le général De Gaulle, l’évolution d’un homme, sa fin de règne, c’est en même temps l’évolution et la fin du destin Français. On peut trouver de la beauté dans le crépuscule des dieux, mais il n’annonce que la nuit". (Jeandaniel in "l’ère des ruptures" page 181)

Dieu merci pour la France, un génie dans les deux heureux sens, succéda à De Gaulle : Monsieur le Président Georges Pompidou ! Hélas, morbidement hélas, l’imbécile politique, morale, intellectuelle, des géniteurs de "l’ivoirité" n’a-t-elle laissé au peuple souverain de Côte d’Ivoire un total et libre choix.
Conséquence douleurs, larmes, charnier, pogrom ...!
Sous le ciel de nos démocraties difformes, informes, y a-t-il plus de trois Etats sur dix à l’abri du syndrome ivoiro-ivoirien ?

Négative la réponse sur la foi d’un franc constat. Mal gouvernance, corruption effroyable, puissance des pratiques régionalistes et / ou ethnocentriques... que dire ?
Monsieur le président, je veux croire que depuis ... avez-vous changé d’avis à propos de la maturité de l’Afrique pour la démocratie ?

Monsieur le président, y aurait-il à l’exemple du code civil, du code pénal, un âge de "majorité" ?
Assurément que non, à propos de l’exercice des libertés "politiques". La jouissance des droits de l’Homme ne saurait être soumise à quelques apories doctrinales.
Droit à la vie. Liberté de culte. Droit de circuler et / ou s’établir entre autres. Monsieur le président, aidez-nous à croire que la Francophonie est un espace solidaire par le cas Gbagbo Laurent et Simone l’épouse. Appliquez la recette Bush. Haïti et Liberia sont des exemples.

Propos recueillis par Séni DABO, Lassina SANOU (Stagiaire)
Le Pays

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Vos commentaires

  • Le 11 décembre 2004 à 11:25, par KONE En réponse à : > Côte d’Ivoire : Des Burkinabè se prononcent

    Taisez- vous si vous n’avez rien à dire. Les Bourkinabés devraient avoir trop à faire chez eux pour s’occuper de la Côte d’Ivoire. Si vous pensez bien faire en dénigrant systématiquement tout ce qui vient du pouvoir Ivoirien, vous comprendrez un jour que vous aviez tort. La vraie rebellion, c’est GBAGBO qui la mène contre l’impériualisme. Quand vous comprendrez cela, vous serez des Africains dignes de ce nom.
    Autrement, vous n’êtes que des Négriers.
    Salut

    • Le 28 février 2005 à 21:36, par CHANGES pour pseudo En réponse à : > Côte d’Ivoire : Des Burkinabè se prononcent

      je pense qu’il est important de connaitre le debut de la crise avant de se prononcer.j’aimerais aujourd’hui savoir si les burkinabe aimeraient qu’un ivoirien dirige leur pays.si oui je me tairai a tout jamais si non je pense que le cas que vit la cote d’ivoire est d’autant plus grave qu’il en a l’air.on accuse un regime democratiquement elu sur la base que la majorite ne ’sest pas prononcee et qu’il faut des elections justes et ouvertes a tous.si on reflechissait un tout petit peu on aurais compris que toute constitution pose des limites pour la candidature d’un chef d’ETAT.En cote d’ivoire c’est le cas on demande a un candidat de faire la preuve de sa nationalite.il n’arrive pas puisqu’il est etranger de pere et peut etre de mere.alors celui_ci decide d’armer une minorite afin de destabiliser un pouvoir en place.c’est un cas tres frequent en afrique ou on demande aux africains de s’entretuer afin que les colons puissent s’enrichir et que l’afrique,elle s’appauvrir.je suis supris qu’aujourd’hui on accorde du credit a une rebellion.et que ce credit vienne des africains qui ont temps soufferts des conflits armes.si vous dites que le president elu est minoritaire pourquoi alors cEtte majorite qui est tant importante ne se fait elle pas sentir ?on l’a vu au temps du general guei il a tente de se maintenir au pouvoir et il a ete chasse par une majorite.on aimerais que ça soit le cas pour le president actuel on aimerait que cette majorite la sorte et reclame son depart comme pour le general.on a pas besoin de prendre des armes lorsqu’on est majoritaire dans un pays.il va de soit que la majorite l’emporte toujours sur la minorite.gbagbo est majoritaire dans ce pays et c’est la raison pour laquelle ils ont tente de le renverser a maintes reprises et que ça toujours echoue.rapprochez vous un tout petit peu du probleme pour mieux le cerner au lieu de tenir des affirmations sans fondements sur ce je souhaite PAIX ET PROSPERITE A LA COTE D’IVOIRE.

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