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Côte d’Ivoire : Gbagbo s’en tire à bon compte

Publié le mercredi 10 novembre 2004 à 07h31min

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Finalement, Laurent Gbagbo risque de s’en tirer à bon compte, malgré les actes extrêmement graves qu’il vient de poser. Après avoir violé le cessez-le-feu, bombardé les zones des Forces nouvelles, tué des militaires français, traumatisé des populations civiles, il n’a reçu qu’un rappel à l’ordre sous la forme d’un anéantissement de ses coucous.

Pour le reste, on en est aux éternelles procédures diplomatiques, les mêmes qui font perdurer la crise et qui ont permis d’en arriver aux événements de la semaine dernière.

La France, principale protagoniste de la récente poussée de fièvre par la force des choses, a invoqué le caractère légal du régime en place pour retarder (ou annuler ?) tout usage de la force pour évincer Laurent Gbagbo. On en est donc à nouveau aux incessants ballets diplomatiques et aux palabres. Même si l’ONU a renforcé le mandat de la France, même si une résolution est envisagée pour sanctionner toutes les parties au conflit (au lieu du seul camp de Gbagbo), il faut se dire qu’une fois de plus, le régime ivoirien risque de se jouer de la communauté internationale.

Or, au regard du degré de folie atteint par le président Gbagbo et le risque de guerre civile auquel son attitude expose le peuple ivoirien, il n’y avait de meilleure solution que celle qui consiste à définitivement neutraliser le régime en place, soit en le décapitant par le haut, à la Taylor ou à la façon du Père Aristide, soit en dépouillant le président Gbagbo de tous ses pouvoirs. De sorte que la transition vers l’élection présidentielle de 2005 se présente sous de bons auspices, sous le regard vigilant et neutre de la communauté internationale.

Les sanctions (que "Le Pays" avait du reste proposées à plusieurs reprises) ne sont plus des remèdes capables de guérir le mal ivoirien qui a atteint un stade nécessitant une intervention chirurgicale radicale. Et cela passe nécessairement par le départ précipité de Gbagbo. Les sanctions préconisées par la France sont tardives et ont ceci d’injuste qu’elles vont frapper aussi les Forces nouvelles qui ont pourtant montré une meilleure disponibilité à la paix.

Face à ces nouvelles tergiversations, il y a lieu de se demander pourquoi Paris n’est pas allé jusqu’au bout de sa logique, qui aurait été de chasser Gbagbo du pouvoir. Surtout que personne n’aurait crié au scandale devant un tel acte certes radical et peu orthodoxe, mais décisif pour l’engagement des réformes, le désarmement des Forces nouvelles, l’organisation d’élections et la réconciliation nationale. Le devoir d’ingérence déjà exprimé par la France devait se muer en devoir de destitution. Pour- quoi donc le président Chirac s’est-il seulement arrêté à la destruction de la flotte militaire des FANCI, un moindre mal pour Gbagbo ?

D’abord, ces nouvelles hésitations confirment la position ambiguë de la France, preuve de son embarras dans la crise ivoirienne. Obligée de faire le grand écart entre la sauvegarde de ses intérêts et le maintien de son rôle de puissance tutélaire, la France en est arrivée à une position de fragilité due aux nombreuses compromissions. Mais il ne faut pas occulter le machiavélisme de Gbagbo qui, depuis deux ans, a toujours réussi à sortir des coups durs. En cela, il a plusieurs armes qu’il brandit selon les circonstances.

Il y a bien sûr, les importants investissements et le nombre de ressortissants français dont la sauvegarde lie quelque peu Paris. Tant que Gbagbo se montre garant de ces intérêts, il n’a pas de souci à se faire. Gbagbo joue donc sur deux tableaux : l’intimidation et la séduction. Il lâche ou retient ses hordes de "patriotes" au gré de l’actualité politique. Mais il a le plus souvent brandi le fouet. Car cette armée constituée de milliers de jeunes qui lui obéissent au doigt et à l’oeil sont un formidable moyen de pression.

La France, obsédée par la sécurité de ses ressortissants, est paniquée à l’idée de les voir injuriés, menacés et violentés. En matière de séduction, il lui suffit de claquer les doigts pour faire disparaître les "patriotes" et montrer ainsi à la France sa bonne volonté. Mais Gbagbo est allé plus loin dans son art de la diversion en s’invitant dans la politique intérieure française. Il a opéré un glissement vers la droite, au détriment de son allié naturel qu’est la gauche. Il a encore rajouté à la confusion en s’ingérant (certes de façon malheureuse) dans la crise des otages français.

Et comme la politique est une perpétuelle concurrence, la droite a vite fait de prendre la main tendue de Gbagbo, sans se soucier du sang qui en dégouline. Le député de l’UMP parti avec un avion ivoirien dans le bourbier irakien (sans doute au vu et au su de l’Elysée) n’a-t-il pas confirmé cette tendance ?

Bref, Paris récolte aujourd’hui les fruits amers du jeu dangereux auquel elle s’est adonné avec Gbagbo. Mais il est une évidence : elle ne peut plus reculer après ce qui vient de se passer. Et à défaut d’avoir profité des événements pour demander la tête de Gbagbo, elle doit courageusement envisager, avec ses autres partenaires, la mise sous tutelle onusienne de la Côte d’Ivoire. Ce qui revient à dire que Gbagbo demeurera président, comme le veut la France, mais sans pouvoir. On trancherait alors la poire en deux, à défaut de mieux, au nom, avouable de la paix en Côte d’Ivoire et dans la sous-région.

Mais aussi au nom, inavouable des intérêts français de toutes sortes dans ce pays. Et Gbagbo qui a toujours plus d’un tour dans son sac, s’en sortirait à bon compte et pourrait tranquillement envisager demain, de porter des coups plus durs encore à la réconciliation nationale, à la France et à la sous-région.

Le Pays

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Vos commentaires

  • Le 10 novembre 2004 à 18:23, par jacques lohourou digbeu-badlor En réponse à : > Côte d’Ivoire : Gbagbo s’en tire à bon compte

    Journaliste ou militant ?

    Votre presentation de la situation fait tout simplement pitie ; comment voulez-vous comprendre la realite de la situation ivoirienne avec un tel parti pris ? En plus vous abusez vos lecteurs par de tels propos errones ; que Gbagbo s’en sorte a chaque tentative de coup tordu n’est pas une surprise pour ceux qui comprennent quelque chose a la crise ivoirienne ; quant a vous, je crois que vous n’etes pas au bout de vos peines , pardon de vos surprises ; vous n’avez pas fini de voir Gbagbo diriger le pays pendant que ses adversaires , refusant de faire de la politique , attendront vainement dans les couloirs que les combines des parrains de la rebellion viennent changer la nature du regime.
    On vous le dit, faites un effort de comprehension : la Cote d’Ivoire n’est pas Haiti et Laurent Gbagbo n’est pas Aristide ; il est soutenu par le peuple ivoirien qui ne cesse de prouver qu’il est pret a tout pour le garder a la tete de l’Etat ; c’est cela la realite du fait ivoirien ; c’est aussi cela qui fait la specificite du peuple de Cote d’Ivoire ; les puissances que vous appelez au secours pour combler les carences des opposants ivoiriens l’ont , elles , bien compris. Dans quel interet devraient-elles alors franchir le rubicon au risque d’embraser la sous-region ? Par ailleurs, en tant qu’Africain, vous sentiriez-vous honore par un tel denouement ? Quelle part de souverainete resterait-il encore a nos Etats ? Et puis, que faites-vous de votre dignite ?
    Seul un journaliste militant peut encore rever d’un changement durable par la force, diplomatique ou militaire ; rever seulement...

    Jacques lohourou digbeu-badlor , usa

  • Le 7 octobre 2010 à 15:21, par kader En réponse à : Côte d’Ivoire : Gbagbo s’en tire à bon compte

    c’est malhereux pour l’afrique quand un africain intelectuel soit-il reagi de la sorte.cet etrange journaliste n’a encore rien compri des raport franco-africain et aussi ne sait pas grande chose de la crise ivoirienne donc qu’il arrete de berner les lecteurs qui recherche que la vérité,wait and see vous verez le role que le president gbagbo jouera dans l’independance economique de toute l’afrique à commencer par la cote d’ivoire

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