LeFaso.net, l'actualité Burkinabé sur le net
Proverbe du Jour : “Vous n’empêcherez pas les oiseaux de malheur de survoler votre têtе, mаis vοus рοuvеz lеs еmрêсhеz dе niсhеr dаns vοs сhеvеux.” Proverbe chinois

ADAMA SAWADOGO, CHEF DE PROJET DÉSENCLAVEMENT, CHARGÉ DES INFRASTRUCTURES DU MCA : « A partir du 31 juillet 2014, on ne peut plus dépenser un seul dollar »

Publié le mercredi 22 août 2012 à 23h56min

PARTAGER :                          
ADAMA SAWADOGO, CHEF DE PROJET DÉSENCLAVEMENT, CHARGÉ DES INFRASTRUCTURES DU MCA : « A partir du 31 juillet 2014, on ne peut plus dépenser un seul dollar »

Sidwaya (S) : Quel est le budget alloué pour la réalisation du périmètre irrigué de Di ?

Adama Sawadogo (AS) : Le budget alloué pour la réalisation du périmètre irrigué de Di est d’environ 53 millions de dollars US pour la tranche ferme. Elle porte sur 1 740 hectares. Ensuite, la tranche conditionnelle qui avoisine 11 millions de dollars. Elle va être réalisée suivant l’évolution de nos capacités financières sur la base de la réalisation de la première tranche. Ce qui fait un total de 2 033 hectares. Il y a aussi des travaux qu’on a externalisés, parce qu’ils ne sont pas réalisés par l’entreprise principale, mais qui sont réalisés par d’autres structures et qui sont en rapport avec le MCA.

C’est notamment, la SONABEL pour l’électrification de la vallée. Il y a aussi d’autres bâtiments qu’on doit construire. Nous les avons ressortis du marché global pour les faire réaliser par de petites entreprises et ils s’élèvent à environ 3 millions de dollars US. Le tout réuni remonte à 66 millions de dollars US, et ça vous fait environ 33 milliards de F CFA.

S. : Sept mois après le lancement, le taux d’exécution des travaux est de 30%. Ne craignez-vous pas que le délai ne soit pas respecté, du fait de l’installation de l’hivernage et bien d’autres problèmes qui ralentissent les travaux ?

A.S. : Les caractéristiques du projet, c’est nécessairement de respecter les délais. Nous avons un programme qui a ses contraintes. Ce n’est pas tabou, le 31 juillet 2014, on ne peut plus dépenser un seul dollar. Donc, nous travaillons dans ce sens. Tout ce que nous commençons, nous nous faisons le devoir de le terminer avant cette échéance. Pour revenir au cas précis de Di, nous sommes aujourd’hui (NDLR : l’entretien a eu lieu le 14 août) à 7 ou 8 mois de consommation du délai sur 20 mois pour la tranche ferme.

Donc, il restera 12 mois pour cette tranche et bien entendu, 5 autres mois qui s’ajouteraient pour réaliser la tranche conditionnelle. Il ne nous reste pas grand-chose. Nous devons tout faire pour y entrer. Cela amène de la part des acteurs, principalement l’entrepreneur, à renforcer son équipement et de rattraper des retards qui peuvent venir d’ailleurs dans le compte de performance. A ce jour, nous avons autour de 4 semaines de retard dues seulement à la pluie. Nous avons enregistré au niveau de la vallée au cours des mois de juin et de juillet, une très forte pluviométrie qui sort des moyennes d’habitude attendues.

Cela a contrarié un peu nos prévisions. Nous continuons quand même de travailler, parce que vous avez dû voir, il y a du béton qu’on fait. Il y a de la préfabrication qui se fait sur une autre aire. En dehors du fait qu’il faut de la manutention pour les déplacer (NDLR : les matériels préfabriqués), nous continuons ces activités. Mais, nous nous préparons à absorber déjà des retards consommés parce qu’au départ, l’entreprise avait commencé à travailler avec les équipes de dimanche, juste pour pouvoir résorber ce retard et nous pensons qu’à la reprise (à la fin de la saison des pluies), les activités qui vont reprendre vont nécessiter de la part de l’entreprise, plus de moyens.

Il faut dire aussi qu’en ce qui concerne la particularité dans la réalisation des périmètres, ce sont des travaux qui se déroulent sur une aire. On ne peut pas mettre indéfiniment le nombre de moyens parce que ce n’est pas efficient. Toute proportion gardée, on va quand même renforcer le matériel pour gagner dans certains volets.

S. : Des ouvriers se plaignent de n’avoir pas obtenu un certain nombre de matériels (tenues, casques, imperméables) à l’image de leurs collègues ; qu’est-ce qui explique cet état de fait ?

A.S. : Sur ce point, vous avez constaté sur le chantier que les ouvriers sont bien distincts des autres. Le port des gilets fluorescents, des gants, des casques et des bottes, c’est ce que vous remarquez sur le chantier. Le régime des gens qui y travaillent n’est pas le même. L’entreprise a sous-traité certains travaux. Peut-être qu’ils n’ont pas encore reçu d’équipements, mais ce sont des situations transitoires. Sinon ils vont recevoir leurs dotations de casques et bien d’autres choses pour pouvoir ressembler aux autres. Nous profitons de l’occasion pour dire que c’est tout un changement de comportement qui est attendu de la part des acteurs sur le site. C’est vrai qu’il y a certains qui se plaignent de ne pas les avoir mais, il y a d’autres qui en ont et qui ne les portent pas.

Cela est dangereux. Nous travaillons justement à ce que le port des équipements de sécurité soit très exigé. Nous sommes avec un partenaire (le MCC) qui y tient.

S. : Des ouvriers auraient déserté le chantier pour raison de sous-traitance au niveau salarial. Etes-vous au courant ?

A.S. : Concernant le traitement des salaires, nous avons même au niveau du MCA, des gens qui abandonnent leur poste, parce qu’ils estiment que le niveau de rémunération ne convient pas à leur attente. Si c’est dans ce sens, moi je pense que c’est un progrès.
Quand quelqu’un, à un moment donné, s’aperçoit qu’il peut avoir mieux ailleurs que le traitement qu’il a présentement, il peut partir. Mais, il y a des gens aussi qui viennent. Je crois que c’est une vie normale de chantier et je pense également que le niveau de traitement des salaires est régi par la loi au niveau national, l’inspection de travail y est.

Vous avez remarqué que pour une entreprise expatriée, ce n’est pas là-bas généralement qu’on peut enregistrer ce cas-là. Mais, ces plaintes ou ces mouvements que vous avez constatés, c’est tout à fait normal. Dans le milieu du travail, ce sont des revendications pour améliorer les conditions de travail, tout le temps. Même ici, si on a l’occasion d’approcher ceux qui sont aux ressources humaines, on dit nos problèmes.

S. : Récemment le commissariat de police de Tougan a mis la main sur un groupe d’ouvriers qui s’adonnaient au vol de carburant sur le chantier. Le mauvais traitement de ces derniers ne serait-il pas à la base ?

A.S : Excusez-moi mais ça, c’est un raccourci. Ce n’est pas le fait que les gens aient été mal payés, parce que c’est un réseau. De l’information que j’ai reçue sur cette affaire, nous permettait d’affirmer que les travailleurs étaient une courroie. Ils faisaient sortir le carburant, mais le réseau était tel que ça impliquait d’autres personnes.

Ce qu’il faut dire est que la vertu ne commande pas qu’on s’adonne à des vols de matériels, quand on n’a pas un salaire adéquat. Nous avons une expérience sur plusieurs chantiers et cela arrive. Soit ce sont les pièces détachées qu’on vole, soit c’est du carburant ou du ciment qu’on dérobe. Pourtant, ce sont des chantiers sur lesquels les salaires sont régulièrement payés. Quant au vol de matériel, nous aimerions que ce ne soit pas justifié par le fait qu’on est payé à un niveau donné, parce que la pauvreté en milieu rural au Burkina Faso a atteint des profondeurs, mais quand même la vertu y est.

S. : La mairie de Di se plaint du fait qu’un grand nombre de jeunes n’aient pas été retenus pour les travaux qui ne demandent pas de hautes qualifications comme prévu. Quelles explications donnez-vous à cette situation ?

A.S. : D’une manière générale, le MCA est confronté à cette question sur toutes les variantes de la plupart des activités que nous menons sur les sites. Il y a beaucoup d’attentes des populations sur nos activités à tous les niveaux. Soit dans la réalisation des infrastructures, soit dans l’apport des moyens, en termes de finances ou d’octroi de périmètres qui permettront aux gens de cultiver, soit ce sont les gens qui pensent pouvoir tous être recrutés.
Le projet ne peut pas donner de l’emploi à tout le monde. Mais, il y en a qui insistent, c’est tout à fait normal. Beaucoup de choses ont pu être dites, aussi bien par les promoteurs du projet, dans des proportions des domaines bien précis et bien définis.

La particularité parfois dans l’embauche des gens, c’est qu’on a plusieurs niveaux d’emplois : des ouvriers simples, des ouvriers spécialisés, des manœuvres, des conducteurs d’engins, ainsi de suite. Ceux qui se plaignent parfois sont des gens qui ont fait l’objet d’une sélection par l’entreprise, à travers les systèmes de recrutement de l’Agence nationale pour la promotion de l’emploi (ANPE) et les cabinets pour mettre à disposition de l’entreprise un potentiel de travailleurs. Au fur et à mesure que les besoins se font sentir, l’entreprise va puiser là-bas et si les gens attendent que leur tour n’arrive pas, cela pose aussi des problèmes. C’est la qualification qui fait que tout le monde n’est pas engagé. D’une manière générale, les populations résidant sur les sites des projets ont parfois tendance à penser qu’elles sont prioritaires. C’est quand même des projets nationaux. Ça recrute des gens venus de partout, même de l’extérieur du Burkina Faso.

S. : Donnez-vous l’assurance que les producteurs de la vallée ne connaîtront plus de désagréments en ce qui concerne le problème d’irrigation d’eau comme ce fut le cas au mois de mars ?

A.S. : La situation qu’a vécue la population au cours de la période du mois de mars-avril est surtout due au fait que quelque part, certains n’ont pas fait leur travail, notamment s’occuper du réseau de drainage. Cela met à nu une des préoccupations du programme. Cela veut dire que si ce qui existe déjà n’a pas fait l’objet d’un bon entretien, donc ce que nous sommes en train de réaliser actuellement va tomber nécessairement dans cette situation.

Nous avons rencontré les producteurs à deux reprises et avons indiqué ce qu’il fallait faire. Nous avons au niveau du MCA aidé l’AMVS à curer les canaux. Que cette situation n’arrive plus, je puis dire que nous avons pris toutes dispositions pour que ce ne soit pas dans le cadre de nos activités que cela arrive parce que nous avons déjà fait la digue de protection. Si elle n’était pas faite en entier, nous allions nous retrouver dans un an encore à refaire cette sollicitation. Du reste, notre appel est qu’il faut que les bénéficiaires adoptent des comportements d’entretien de ces infrastructures.
C’est là que nous pourrons dire que la situation ne pourra plus se reproduire.

Propos recueillis par POO

Sidwaya

PARTAGER :                              

Vos commentaires

 LeFaso TV
 Articles de la même rubrique
Burkina : Une économie en hausse en février 2024 (Rapport)