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Territoires occupés : Abou Amar va mal ; la Palestine aussi

Publié le mardi 2 novembre 2004 à 07h08min

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Depuis le vendredi 19 octobre, Yasser Arafat est interné à l’hôpital militaire Percy de Clamart dans les Hauts-de-Seine en région parisienne, où il été transporté d’urgence par un Falcon français qui est allé le chercher à Amman en Jordanie.

Le président de l’Autorité palestinienne y subit toute une batterie d’examens médicaux. En attendant le verdict définitif des médecins, l’hypothèse de la leucémie ou de toute autre maladie mortelle a été écartée par son entourage. Un de ses conseillers a précisé que les médecins envisageaient la piste d’une infection virale ou d’un empoisonnement. Aux dernières nouvelles, sa santé se serait légèrement améliorée.

Samedi dernier il aurait même causé avec sa fille Zahwa et le jour suivant, il s’est entretenu longuement avec son hôte, le président Jacques Chirac, qu’il a remercié pour son hospitalité. Il n’en demeure pas moins que depuis plusieurs années, le président de l’Autorité palestinienne souffre de la maladie de Parkinson et cela ne peut être contesté par ses proches conseillers.

Dans la vie mouvementée de la Palestine, on a l’impression qu’il y a une malédiction quelque part.

La paix dans cette partie du monde ressemble à un mirage dans le désert : de loin on le voit net et quand on s’en approche, il disparaît et réapparaît plus loin. D’accords en accords, de négociations difficiles en négociations difficiles, on avait pourtant l’impression que la paix entre Israéliens et Palestiniens était si proche qu’Arafat a été, en 1996, élu président de l’autorité palestinienne.

Il a fallu la visite provocatrice et vindicative d’un Ariel Sharon, le 29 décembre 2000 sur l’esplanade des mosquées pour tout foutre en l’air. De nombreux radicaux firent en sorte de favoriser un durcissement de la politique d’Israël face à l’Autorité palestinienne.

En réponse à ces attaques répétées, l’année 2001 fut principalement marquée par un grand nombre d’incursions des forces armées israéliennes en territoires autonomes.

Le pouvoir politique d’Arafat fut grandement réduit. D’autant plus que la possibilité pour lui de contrôler certains groupes, notamment le Hamas, fut virtuellement supprimée, étant donné l’anéantissement de la majorité des structures gouvernementales et de sécurité par Tsahal.

Pour ne rien arranger, Arafat fut humilié par les Israéliens, qui le confinèrent dans ses bureaux de Ramallah à partir du 4 décembre 2001. L’isolation sera maintenue jusqu’au 11 mars 2001. Le répit fut de courte durée pour Arafat. Le 27 mars, un attentat entraîna la mort de 22 personnes et en blessa plus de 100.

Cet attentat fut revendiqué par la branche armée du mouvement Hamas. Le lendemain les forces armées israéliennes investirent le quartier général d’Arafat, causant la mort d’au moins cinq Palestiniens. Le 13 avril, Arafat réitère sa demande de cesser les actions terroristes contre les civils en condamnant ces attaques.

Le siège se terminera après d’intenses négociations et de nombreuses manifestations dénonçant l’occupation partout dans le monde. Après les dirigeants israéliens, ce fut au tour des Etats-Unis de demander que « le vieux », comme l’appellent effectivement ses concitoyens, quitte son poste.

Aujourd’hui, le président palestinien quitte son réduit, pas de son plein gré, mais pour raison de maladie sans être sûr de pouvoir y revenir un jour.

Indépendamment de la décrépitude liée à l’âge et des différents soupçons de maladies chroniques et incurables, ce qui préoccupe actuellement l’opinion, c’est la question de la succession de ce raïs, qui gère le territoire le plus instable que l’on ait connu, qui se pose. Selon la loi fondamentale, en cas de vacance du pouvoir, c’est le président du Parlement, Rauhi Fattouh, qui assurera l’intérim, qui doit durer 60 jours maximum.

Intérim à l’issue duquel, des élections sont organisées par un triumvirat, qui est constitué de ce président du Parlement, de l’actuel Premier ministre, Ahmad Qoreï, et de l’ex-premier ministre et par ailleurs numéro deux du Fatah, le parti de Yasser Arafat, Abou Mazen.

Pour le moment nous n’en sommes pas là, mais on pourrait imaginer le pire, à savoir la mort de Yasser Arafat ou dans une moindre mesure, l’impossibilité pour lui de gouverner. Dans ce cas d’espèce les trois personnalités ci-dessus citées pourraient être de potentiels candidats et pourraient se rentrer dedans.

Si le premier a la légalité avec lui pour assurer l’intérim, les deux autres penseront à leur légitimité pour régner.

Le premier ministre Qoreï est l’homme de confiance d’Arafat ; Abou Mazen aussi ; étant numéro deux du Fatah. Sans parler du Hamas, qui ne fait pas mystère de son intention de participer à la lutte pour conquérir le trône de l’autorité palestinienne.

C’est une inquiétude qui pointe donc à l’horizon, quand on sait que le Hamas, qui est le spécialiste des attentats suicides et qui a toujours rejeté l’idée de l’existence d’un Etat juif, a souvent torpillé les efforts de paix de l’autorité palestinienne.

Cette petite poudrière politique en perspective mettra certainement de l’eau dans le moulin d’un Ariel Sharon, qui a déjà enterré politiquement Yasser Arafat, de son vrai nom Abou Amar, puisqu’il exclut toute possibilité d’inhumation du leader palestinien à Jérusalem comme le souhaiterait l’intéressé, et parle déjà de la possibilité de reprise des négociations avec « une nouvelle direction sérieuse et responsable ». Parle-t-il d’une équipe de moutons prêts à se faire tondre par l’Etat hébreu sans réagir ?

Que ce soit avec celui dont la vie se confond avec celle de l’OLP au point qu’on en oublie que cette organisation a d’abord eu un premier président (1), ou avec cette « nouvelle direction sérieuse et responsable » dont rêve le boucher de Chabra et Chatila, il n’y aura de paix véritable dans cette partie du monde tant qu’il n’y aura pas un Etat palestinien viable à côté de l’Etat hébreu. Surtout que la plupart des nations arabes ont renié ce qu’ils appellent la nekba (catastrophe), entendez la création de l’Etat israélien en 1948.

Issa K. Barry

(1) Créée en 1964, l’Organisation de libération de la Palestine a en effet d’abord été présidée par Ahmad Chuqayri, qui a passé le témoin à Arafat en 1969. Samedi, elle s’est d’ailleurs réunie pour la première fois depuis 35 ans sans le « vieux ». Symboliquement, une photo sur le mur et sa chaise restée vide l’ont représenté.

L’Observateur

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