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Sénégal : Attention à la chasse aux sorcières !

Publié le lundi 4 juin 2012 à 23h58min

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Chose promise, chose due ! Le président sénégalais, Macky Sall, avait, on s’en souvient, fait la promesse, lors de sa campagne présidentielle, d’assainir la gestion des finances publiques. Il semble la tenir, puisque, depuis la semaine dernière, des auditions de personnalités politiques, soupçonnées de s’être enrichies de façon illicite, ont lieu.

Force est reconnaître qu’on ne peut pas reprocher à Macky Sall de ne pas vouloir mettre de l’ordre dans la maison Sénégal, où, sous l’octogénaire Wade, la corruption, le népotisme et la concussion semblaient être la chose la mieux partagée au sein de l’establishment, voire au niveau du "petit peuple".

En effet, dès sa prise de fonction, le successeur de Wade a dû finir par admettre l’ampleur du désastre laissé par son prédécesseur : caisses de l’Etat vidées, emplois fictifs pléthoriques sans compter les agences budgétivores "bidons" telles que l’Agence nationale des nouveaux ports du Sénégal, la Direction de la construction de petits aéronefs ou encore l’Agence nationale de la haute autorité du désert...

C’est dire que le sopi d’Abdoulaye Wade avait viré à la gabegie et au gaspillage des maigres ressources de l’Etat. 12 ans de wadisme ont d’ailleurs suffi à faire renvoyer celui-ci à ses chères études juridiques. C’est dire que n’est pas Nelson Mandela qui veut !

Une situation qui semble avoir interpellé les nouveaux dirigeants sénégalais, lesquels ont l’obligation de rendre compte et n’ont qu’une phrase à la bouche. "Nous sommes déterminés à savoir où est passé l’argent public" ; c’est ce qu’a dit sans aucune ambiguïté la ministre de la Justice, Aminata Touré.

Il faut donc saluer l’initiative du président Macky Sall et espérer qu’elle soit menée à terme. Il reste maintenant à veiller que le "combat pour la gouvernance vertueuse", qu’entend ainsi mener le nouveau président sénégalais, ne vire aux règlements de comptes et à la chasse aux sorcières.

Les nouvelles autorités sénégalaises devront faire preuve de discernement et ne pas penser que les voleurs se trouvent seulement dans un camp, notamment celui de leurs prédécesseurs ; d’ailleurs on se rappelle encore la polémique suscitée récemment par suite de la "déclaration écrite de patrimoine" de Sall lui-même faisant, entre autres, état d’un parc automobile de 35 voitures et d’un appartement à Houston (USA), le tout évalué à 1,3 milliard de nos francs.

Pour le moment, pourtant, ce sont les proches de l’ancien régime qui sont auditionnés, et la grande question est de savoir si ce sera le cas de Wade et de son fils. En effet, si Gorgui, qui a l’âge et l’ex-fonction de chef d’Etat avec lui, est certainement à l’abri de tout souci, qu’en est-il de Karim, dont la gestion de l’Agence nationale de l’organisation de la Conférence islamique (ANOCI) a souvent été critiquée, notamment par Macky Sall, à qui cela a coûté des déconvenues politiques, puisque c’est pour avoir voulu entendre à ce sujet Wade fils à l’époque qu’il a eu son mandat raccourci par le père et qu’il a été mis hors des arcanes de l’Etat ?

En somme, l’opération mains propres lancée par le chef de l’Etat sénégalais a pour objet "impunité zéro" et confirme sa promesse de rupture. L’essentiel est cependant qu’il aille jusqu’au bout concernant tout le monde, toutes couleurs politiques confondues, pour ne pas donner l’impression de mener une chasse aux sorcières ; ce, d’autant que certains de ses détracteurs ne manquent pas de lui rappeler qu’il est lui-même un ancien Premier ministre de Wade et, de ce fait, tout aussi comptable de la gabegie de Gorgui pour avoir cogéré avec lui, même si Sall invoque un devoir d’inventaire. Peut-être bien que Macky Sall saura rester l’homme de la situation et ainsi entrer dans l’histoire.

C’est tout le mal que nous lui souhaitons.

Hyacinthe Sanou

L’Observateur Paalga

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