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An I de l’affaire Justin Zongo : Les cœurs s’apaisent à Koudougou

Publié le dimanche 19 février 2012 à 23h31min

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A la veille du premier anniversaire de l’affaire Justin Zongo, du nom de l’élève de la classe de 3e qui a trouvé la mort dans des circonstances controversées, le 20 février 2011, Sidwaya est retourné dans la ville où tout a commencé  : Koudougou, chef-lieu de la région du Centre-Ouest. A ce jour, la tension sociale des premières heures est retombée, laissant place à la reprise de l’activité économique et à l’apaisement « progressif » des cœurs, depuis le dénouement judiciaire de l’affaire courant août 2011. Constat avec la famille éplorée et les différents acteurs de la « Cité du cavalier rouge  ».

En cette matinée du 15 février 2012, soit cinq jours avant le premier anniversaire de la mort de l’élève Justin Zongo, Koudougou « la rebelle » est paisible. L’administration fonctionne, les commerces sont ouverts, les habitants vaquent à leurs occupations, bref, la ville est animée à sa façon. Pourtant l’atmosphère était tout autre, au temps fort de l’affaire Justin Zongo, se souvient-on. Koudougou, ville réputée pour ses mouvements de contestations parfois violents, et ses environs étaient le théâtre d’actes de vandalisme et d’une véritable chasse à l’homme. Estimant que l’élève Justin Zongo, décédé à l’issue d’une détention au commissariat suite à une dispute avec une camarade de classe, avait été « tué » par les policiers, les habitants assoiffés de justice étaient descendus dans les rues pour réclamer justice.

C’était le début d’une crise à rebondissements qui allait gagner d’autres villes du pays, avec son lot de casses, de pillages et d’agressions physiques. Et ces actes de violence, on le sait tous, avaient engendré de nombreux dégâts, blessés et malheureusement plusieurs…morts. Dès le début de ces moments « cauchemardesques », le dialogue a prévalu au plus sommet de l’Etat pour calmer les esprits, et l’affaire a connu un jugement en août 2011. Ce procès, a-t-on constaté, s’était soldé par la condamnation des trois policiers inculpés, les assistants Bélibi Nébié et Bèma Fayama, principaux mis en cause, et l’officier Roger Narcisse Kaboré, accusé de complicité de coups et blessures ayant entraîné la mort de Justin Zongo.

Les deux assistants ont écopé, chacun, de 10 ans de prison ferme tandis que l’officier, lui, a écopé de 8 ans de prison ferme. Depuis le verdict de la justice, la tension sociale, selon les divers témoignages, a réellement baissé à Koudougou. Un an après, les esprits se sont calmés et les nerfs ne sont plus à vif, comme le témoignent les acteurs. « Un an après ce triste événement, je n’ai pas de souci particulier, en ce sens que Justin est mort et que je n’ai pas le pouvoir de le ramener à la vie.

C’est l’œuvre de Dieu et je me plie à cela. Je n’en veux à personne », confie Nagoukomba Zongo, père du défunt élève et chef coutumier de Rallo, village rattaché à la commune urbaine de Koudougou. A 84 ans, cet homme semble toujours sous l’émotion, même s’il donne l’impression qu’il a traversé la difficile épreuve du décès de son fils. Appelant la famille éplorée à la tolérance continue, le gouverneur de la région du Centre-Ouest, le colonel Pascal Komyaba Sawadogo soutient : « Quand un cœur est meurtri, il se remet petit à petit. On ne peut pas dire que cette affaire est effacée de nos esprits, mais il faut noter que la tension est passée et que les cœurs sont en train de s’apaiser ». Même avis chez le premier adjoint au maire de Koudougou, Alexis Yaméogo qui affirme : « les cœurs sont en train de s’apaiser. Lorsqu’il y a mort d’homme, il est difficile de réparer totalement le tort, mais je me dis que les efforts consentis par le gouvernement, pour faire la lumière sur l’affaire, est de nature à apaiser les cœurs ».

La décision de justice saluée par tous

Le président du syndicat des commerçants, Frédéric Yaméogo et celui du Conseil régional des Assemblées de Dieu de Koudougou, le pasteur Michel Koala éprouvent le même sentiment. Les cœurs, ont-ils laissé entendre, se sont apaisés, du fait du jugement du dossier et de la politique de dialogue prônée par les plus hautes autorités du pays. Regrettant tous l’affaire Justin Zongo qui a troublé momentanément la quiétude des Koudougoulais et ralenti l’activité économique, la plupart des acteurs saluent la décision de justice. Satisfait du travail des juges, le père de Justin Zongo lance : « Je me réjouis de la décision de la justice. J’ai assisté au procès et je n’ai pas trouvé mot à redire. Les auteurs de la mort de mon fils ont été identifiés et punis à des peines satisfaisantes.

Hormis cela, on m’a demandé à l’audience si je voulais être dédommagé et j’ai répondu par la négative ». Les chiffres fournis par les autorités judiciaires font état de trois morts à Koudougou, un à Kindi et des deux autres à Poa. Dans ce contexte d’apaisement « progressif » des cœurs à Koudougou, les autorités locales entretiennent-elles toujours des contacts avec la famille endeuillée « Actuellement, nous n’avons pas de contact direct avec la famille éplorée. Etant donné que c’est un événement qui a profondément attristé les proches de Justin Zongo, nous pensons que pour le moment, il n’est pas recommander d’aller réveiller quoi que ce soit », explique le gouverneur du Centre-Ouest.

Ce manque de contact a bel et bien été confirmé par le père de Justin Zongo qui, pour autant, dit ne pas en vouloir aux premières autorités du pays qui, selon lui, ont porté assistance à sa famille dans les durs moments. Les acteurs du privé victimes de dégâts, en majorité les commerçants de la « Cité du cavalier rouge », ont-ils été tous dédommagés, un an après les dégâts ? A cette préoccupation, le gouverneur apporte la réponse suivante : « Je n’ai pas de précisions sur le nombre de commerçants, en ce sens que le traitement des dossiers est centralisé à Ouagadougou, mais je sais que beaucoup ont été dédommagés à ce jour ». Ce n’est pas tout à fait ce que pense le président du syndicat des commerçants de Koudougou, Frédéric Yaméogo, lui qui trouve que de nombreux camarades n’ont pas encore eu gain de cause.

« Sur 18 petits commerçants recensés, trois seulement sont passés à la caisse », a-t-il regretté. A présent que l’orage est passé et que le calme est de retour, quelles leçons peut-on tirer de l’affaire Justin Zongo et que faire pour éviter pareilles situations à l’avenir ?

Tous les acteurs sont unanimes à reconnaître que l’affaire Justin Zongo a été le « déclic » d’un mécontentement généralisé au sein de la population. « Cette affaire a été une grande leçon pour le Burkina et ses dirigeants que nous sommes. Elle permettra d’améliorer la gouvernance à tous les niveaux, suite aux insuffisances constatées dans les divers domaines. L’administration va évoluer certainement dans sa manière de faire et la population sera mieux gérée », a martelé le gouverneur du Centre-Ouest.

Pour ce qui les concerne, les présidents du Conseil régional des Assemblées de Dieu de Koudougou, du syndicat des commerçants , exhortent le gouvernement à instaurer un dialogue « franc » avec toutes les couches sociales, pour éviter pareilles situations. « Les autorités doivent travailler à prendre en compte les préoccupations justes et légitimes des populations, en les résolvant dans la paix(…) », proposent-ils. En tous les cas, les autorités locales, sur instruction du pouvoir central, œuvrent toujours à un retour définitif de la paix, à travers des concertations permanentes et des prières. Aussi ont-elles souhaité une commémoration dans le recueillement et sans heurts à l’occasion de l’an I de l’affaire Justin Zongo. A écouter le premier adjoint au maire de Koudougou, il y a vraiment de quoi rassembler les fils et filles du Centre-Ouest, dans la mesure où la ville abritera la célébration de la fête nationale en décembre 2012.

S’accompagnant de réalisations d’infrastructures, cette célébration de la fête de l’indépendance, prévue auparavant en 2011 dans la « Cité du cavalier rouge » avait été reportée cette année, à cause de la crise. Tout semble rentré dans l’ordre à présent et les acteurs de la région entendent relever le défi dans un climat de paix et de sérénité !

Kader Patrick KARANTAO (stkaderonline@yahoo.fr)


Cohabitation pacifique entre policiers et populations

Depuis l’affaire Justin Zongo, les relations entre les éléments de la police nationale et municipale et les Koudougoulais sont empreintes de méfiance. Mais ce n’est pas pour autant que le nuage des premières heures chaudes ne s’est pas dissipé avec le temps. Selon le gouverneur du Centre-Ouest, Pascal Komyaba Sawadogo, les policiers ont rejoint leurs bases en septembre 2011, après la crise, et n’ont pas de souci avec les populations. « Les policiers, les élèves et les étudiants se sont affrontés lors des événements. Les souvenirs de ces affrontements sont encore vivaces dans les esprits, mais tout le monde est d’avis de nos jours, que des personnes ont fauté dans un groupe et que ce n’est pas pour autant que tout le monde est mauvais.

Avec le relâchement consécutif à la crise, l’insécurité prévalait et eu égard à cela, les populations sont en train de convenir avec nous que les forces de sécurité leur sont utiles », a rapporté le gouverneur. Cependant, les policiers se font discrets en ville, constate-t-on. A l’heure actuelle, ils ne sont pas présents aux alentours du marché de Koudougou, au niveau des différentes artères de la ville, etc. Et une source bien introduite indique que c’est par « mesure de prudence » que les policiers se font discrets dans la « Cité du cavalier rouge ».

K.P.K

Sidwaya

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Vos commentaires

  • Le 20 février 2012 à 11:42 En réponse à : An I de l’affaire Justin Zongo : Les cœurs s’apaisent à Koudougou

    N’allez pas trop vite en besogne ; les enfants viennent de décreter 72h de "repos" à Koudougou de je ne sais quel motif.

  • Le 20 février 2012 à 18:20, par Achille En réponse à : An I de l’affaire Justin Zongo : Les cœurs s’apaisent à Koudougou

    Et le procureur s’en tiré avec 0 ans de prison ferme. Or s’il avait bien réagit lors de la plainte de Feu Justin Zongo. Le pire aurait été évité.

  • Le 20 février 2012 à 18:33, par gomsida En réponse à : An I de l’affaire Justin Zongo : Les cœurs s’apaisent à Koudougou

    un an après la mort de justin il faut reconnaitre que les policiers ont été sacrifiés sur l’hotel de la paix sociale car nous savons tous que la partie civile n’a pas pu de facon irrefitable demontrer la culpabilité des policiers ;mieux les agents de santé qui ont recu justin affirme qu’il est decedé suite a une mainingite.La mainningite peut etre d’origine traumatique ou virale mais du fait que le parquet n’a pas eu la clairvoyance de faire une otopsie qui pourrait établir les véritables causes du decès il subsiste un doute et ce doute devrait profiter aux accusés.le justice a donc condamné ces policiers pour sauvegarder la paix sociale car tout portait a croire que les élèves n’allaient pas accepter que les policiers soient relaxés.peut etre que le jeu en vallait la chandelle.

    • Le 21 février 2012 à 00:19, par Le Citoyen En réponse à : An I de l’affaire Justin Zongo : Les cœurs s’apaisent à Koudougou

      Il faut dire les choses par leur nom. Ce triste événement a démontré aux yeux de tous la vraie image de notre police. Image que l’on ne voyait qu’zu théatre. Le procès a été at est équitable. Personne n’a été sacrifié. C’est le droit qui a été dit.

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