LeFaso.net, l'actualité Burkinabé sur le net
Proverbe du Jour : “Soyez un repère de qualité. Certaines personnes ne sont pas habituées à un environnement où on s’attend à l’excellence.” Steve jobs

Accusations contre Hermann Yaméogo : Des alliés inespérés à la limite du crédible

Publié le samedi 16 octobre 2004 à 12h05min

PARTAGER :                          

Carte de visite retrouvée sur
H. Yaméogo

Pour s’extirper de ses turpitudes politiques, Hermann Yaméogo semble bénéficier d’un secours inattendu, mais certainement pas tombé du ciel. Cela est trop beau pour qu’on le prenne pour un phénomène. On apprend d’un confrère que des "preuves contraires venues de Conakry" blanchissent Hermann Yaméogo, quand parallèlement un écrit fleuve de deux partis basés dans l’Ouest du pays essaie lui aussi de le sortir de cette mauvaise passe.

En somme, le président de l’UNDD malgré sa tournée reste un ange très sage. Mais la question posée reste entière, c’est "qu’est-il allé faire dans cette galère" ?

On sait, et il ne viendrait à l’esprit d’aucun démocrate africain de le nier, que Conakry, depuis l’arrivée de Lassana Conté aux affaires, est l’une des capitales du continent les moins fréquentées. Ni les hommes politiques, ni les diplomates, ni les rencontres et conférences internationales, ni les touristes ne se hasardent dans ce lieu devenu explosif de par l’incurie du maître des lieux.

Une récente émission d’une radio internationale très suivie sur Conakry, laissait entendre par ses habitants que la ville se meurt et n’a plus rien à offrir à ceux qui y vivent encore moins à un quelconque visiteur. Aussi, on ne peut que s’étonner que le président d’un parti qui se réclame le premier de l’opposition burkinabè et qui pense réaliser l’alternance, aille y installer ses pénates.

On se demande pourquoi faire. On attendra vainement la réponse. Hermann a beau vouloir montrer patte blanche, la destination amène mille questionnements, tant Conakry est comme une ville sous quarantaine de la communauté internationale. Aucune personnalité de haut rang croyant et défendant les principes intangibles des vertus démocratiques et de la responsabilité républicaine, ne souhaite qu’on l’associe d’une manière ou d’une autre au pouvoir guinéen actuel.

Forcément donc, les raisons de ce voyage obscur sont à rechercher ailleurs. C’est alors que ce petit saut du 22 septembre 2004 à Nouakchott du "péripleur" tient la route et largement. De Conakry, capitale devenue anonyme car infréquentable, tout peut se faire dans le plus parfait du ni vu ni connu.

Ces témoins-la…

On ne voudrait pas remettre en cause la crédibilité des témoins faisant foi que Hermann Yaméogo était bel et bien à Conakry le 22 septembre. Mais un certain Nassirou Conté (de fonction et de titre inconnus) un cireur de chaussures (même si ce dernier se vante d’avoir eu entre ses mains les godasses des seigneurs de ce monde) et une "hôtesse" d’une agence de voyage, il y a lieu de se dire que ceci est trop maigre.

D’autant plus que Hermann Yaméogo qui affirme n’avoir rien à cacher de ses périples dans les pays troubles et confus, se fait enregistrer dans cet hôtel luxueux (les présidents y séjournent) sous une fausse identité. Pour quelqu’un qui ne cherche rien et n’a rien à se reprocher, avouons que cela relève d’un acte politiquement suspect.

Et puis comment ne pas se poser la question sur son emploi de temps de cette journée. On aurait voulu entendre de ses témoins précieux qu’Hermann avait rencontré telle personne ou personnalité (ne s’est-il pas rendu à Conakry pour ça ?) a déjeuné avec telle autre. Mais rien de tout cela.

Cette carte de visite a été retrouvée dans
le passeport de Me Hermann Yaméogo.

Enfin, si comme il le dit lui-même il s’en ira bientôt à Nouakchott pour exprimer de vive voix au président Ould Taya qu’il est un Burkinabé contre la déstabilisation de pouvoir par l’extérieur, il aurait dû admettre s’y être rendu. Ce sera dès lors sa parole contre celle du ministre quant au motif de ce voyage. Mais nier l’évidence et trouver pour cela des témoins si peu crédibles, voilà qui s’appelle une fuite en avant.

L’argent n’a pas d’odeur

Les Burkinabé sont instruits que l’opposition au Faso pratique la fameuse "défense en ligne" chère aux candidats aux différents concours de recrutement. Cette manière qu’elle a de soutenir toutes les causes même celles qui heurtent la morale est indécente et relève de l’instinct grégaire propre au règne animal.

Pourtant c’est elle qui chaque jour veut montrer qu’elle incarne des valeurs et qu’elle est garante de la ligne rouge à ne pas franchir. Mais l’écrit du PNR/JV et du FPC/Yelemani fait la différence entre ceux qui savent faire montre d’élégance dans leur style et leur carrière politique et ceux qui en définitive pensent que tous les chemins mènent au paradis. Ils ont dit haut et fort que l’argent pour Hermann Yaméogo n’a point d’odeur ni de couleur. Qu’il est un fin stratège politique en faisant et défaisant des alliances au gré de ses intérêts. Et nous qui croyons naïvement en prenant connaissance des multiples déclarations des partis d’opposition dans la presse qu’elle voulait un changement frappé du sceau du don de soi dans le désintérêt et l’honneur de la patrie.

Maintenant, il est définitivement acquis que même en vendant au plus offrant son pays, "le fait de vouloir le pouvoir, de le chercher" suffit à absoudre, le politicien adepte du sans foi, ni loi de tous ses péchés. Certes, il revient depuis quelque temps que la présidentielle de 2005 sera très disputée. Nous voulons bien l’admettre, mais il faut croire que nous étions loin du compte. On en arrive même à travestir l’histoire, en tentant de fédérer autour d’une conception voulant que sans aide extérieure, des opposants ne puissent pas se soulever contre un régime dictatorial.

Le choix du 4 août et du 15 octobre à ce propos ressemble à une petite farce. Car aucun coup d’Etat, aucun changement de régime n’est possible même avec l’aide des plus grandes puissances, si les conditions internes ne sont pas réunies.

Du reste pourquoi, la Mauritanie, la Guinée et la Côte d’Ivoire et pourquoi pas le Ghana, le Mali, le Sénégal et le Burkina Faso ?

Dans les trois premiers pays à très fortes turbulences, le terreau est très fertile avec la mal-gouvernance, la xénophobie, le racisme et l’ostracisme, l’absence de démocratie et le piétinement des droits les plus élémentaires des citoyens. Comment alors vouloir dans ces poudrières indexer un pays tiers. N’est-ce pas un Ivoirien de souche pure qui a qualifié son pays de poudrière identitaire ? N’est-ce pas des Mauritaniens, nombreux en exil et dans beaucoup d’autres pays qui dénoncent à longueur d’année, la situation de leur pays où règnent l’arbitraire, l’esclavage (au 21e siècle), la dictature et les assassinats politiques à n’en plus finir ?

En démocratie, aucun sujet n’est tabou. Mais quand il touche à la défense et à la sécurité, tout citoyen a le devoir d’observer la plus grande prudence, y compris les politiciens qui se disent "mogo puissants" et intouchables du fait de ce statut et prêts à utiliser l’argument facile du style "le pouvoir a peur de moi, donc il m’attaque sur du faux". Hermann Yaméogo, citoyen comme les autres n’a pas à fuir la justice de son pays, s’il n’a rien à se reprocher et qu’en outre une ribambelle d’avocats nationaux et internationaux va se constituer pour sa défense. Enfin, rien ne dit non plus qu’à la suite de son audition, il soit inquiété outre mesure. Il y a donc lieu de laisser le droit se dire.

Souleymane KONE
L’hebdo

PARTAGER :                              
 LeFaso TV
 Articles de la même rubrique