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Participation politique des femmes : Quel bilan au « pays des Hommes intègres » ?

Publié le vendredi 11 novembre 2011 à 15h27min

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Avec une population de près de 14 millions d’habitants dont 51,7% de femmes (13 730 258 RG-PH-2006), le Burkina Faso à l’instar de nombre de pays dans le monde connaît des insuffisances quant à la participation de la gente féminine à la gestion de la chose politique. Si de multiples facteurs handicapants justifient cet état de fait, la femme elle-même n’est pas exempte de comportements qui la relèguent dans l’antichambre, voire plus loin des sphères de décision.

Une situation qui a de grandes conséquences négatives sur le développement dans tous les domaines. La participation des femmes en politique est donc une problématique de tous les jours qui doit être appréhendée de façon objective et c’est ce que tente de faire ce dossier qui fait l’état des lieux au Burkina et pose des interrogations à l’ensemble du corps social.

En dépit des dispositions juridiques et des mesures politiques en faveur de l’égalité de droit entre l’homme et la femme, le statut de cette dernière n’a pas fondamentalement changé au Burkina Faso. Bien que les deux sexes soient affectés par la précarité des emplois en milieu urbain comme en milieu rural, les femmes ont plus de difficultés à trouver un emploi ou à travailler pour leur propre compte. Pourtant un des grands principes sur lequel repose la bonne gouvernance est la participation des femmes et des hommes, à la prise de décision ; ce qui implique la liberté d’opinion, de parole, d’association et même d’entreprise. Au niveau de la gestion du pouvoir d’Etat, d’une manière générale, les femmes ont toujours été sous représentées dans les institutions nationales et locales depuis l’indépendance du pays. Leur nombre dans chaque gouvernement n’a jamais dépassé cinq (5), et elles ont généralement occupé les départements qui renvoient à leur rôle social (enseignement, action sociale, promotion féminine) à l’image du présent gouvernement de Luc Adolphe TIAO, qui compte trois (03) femmes sur 29 ministres et ministres délégués. A l’Assemblée nationale, sur 111 députés, il n’y a que 17 femmes ; ce qui est fort regrettable vu leur nombre majoritaire au Burkina Faso. Certes, il y a quelques améliorations, mais cette sous-représentation des femmes limite leur influence sur l’élaboration des lois et des politiques à tous les niveaux.

Les facteurs handicapants

Quel paradoxe que celui de la situation de la femme burkinabè en politique ! Reconnues « grandes électrices » car constituant la grande majorité du corps électoral et s’acquittant le mieux de leur devoir civique et citoyen, les femmes sont comme tenues en laisse, absentes ou minimes qu’elles sont dans les vrais centres de décision. Elles semblent confinées au rôle de départager les hommes qui briguent le pouvoir politique. C’est pourquoi d’ailleurs l’on n’hésite pas à les qualifier de « bétail électoral » dont ne se souviennent les politiques que lorsqu’approche une échéance électorale.

Cette approche caricaturale cache bien des réalités qui ne sont pas pour favoriser la pleine expression des femmes en politique. En effet, plusieurs facteurs expliquent la mauvaise posture de la femme en politique.

Si le facteur analphabétisme est déterminant en ce que les femmes sont les plus touchées par ce fléau, il faut dire que plusieurs autres facteurs les desservent. Entre autres, nous pouvons retenir la persistance des préjugés socioculturelles et des stéréotypes, le faible niveau d’éducation et d’instruction de la femme, mauvais positionnement sur les listes électorales, le manque de ressources financières et même le refus de l’époux. La présence de cette perception de la politique comme l’apanage de la gente masculine est devenue un faux-fuyant pour dénier à la femme son droit de faire de la politique quand bien même on l’incite à aller dans l’isoloir pour voter. Voter qui ? Bien sûr « le mâle » pour qui les dieux ont dessiné la politique comme arène de compétition ! C’est pourquoi des actions haries doivent être menées pour changer la donne.

Quelles alternatives ?

Tout le monde est aujourd’hui conscient que la société ne peut se développer en ignorant la valeur contributive d’une de ses composantes, notamment la gente féminine, à la réflexion sur les stratégies, la prise de décisions idoines dans la conduite de la gouvernance. Aussi la question du genre est-elle aujourd’hui intégrée dans les préoccupations à tous les niveaux.

En effet, dans la logique des engagements internationaux, les organisations africaines ont foi en la nécessité d’établir l’égalité de sexes, et de démarginaliser la femme comme moyen et objectif du développement durable en Afrique. Les chefs d’Etat africains ont, de ce fait, donné un signal fort pour permettre à l’Afrique d’amorcer le décollage économique tant espéré, en favorisant les relations du genre qui occupent désormais une place essentielle dans les politiques de l’Union africaine (U.A). La femme est donc une actrice active du changement, car sur elle repose une grande part de la responsabilité morale du foyer et une partie de la responsabilité matérielle.

Au Burkina Faso, la question d’égalité et d’équité entre l’homme et la femme est une condition sine qua non et un principe directeur pour parvenir au développement socioéconomique du pays.
Les efforts déployés par le gouvernement pour un mieux-être de la femme se sont traduits ces dernières années par l’amélioration de son statut social, juridique et économique. Quelques exemples : en novembre 2009, la 1ère promotion mixte d’élèves-gendarmes faisait sa sortie à Bobo-Dioulasso. Au plan politique, l’Assemblée nationale a adopté le 16 avril 2009, la loi portant fixation des quotas d’au moins 30% en faveur de l’un ou l’autre sexe aux élections législatives et municipales au Burkina Faso ; en juillet 2009, le gouvernement a adopté la Politique Nationale Genre (PNG), en tant que document de référence et d’orientation pour tous les acteurs en faveur de l’équité et de l’égalité entre les sexes.

Les professionnels des médias ont également initié des actions pour une participation plus active de la femme dans la société. Ils ont, en effet, proposé d’identifier les femmes modèles pour en faire les marraines d’activités phares, de concevoir des émissions spéciales pour les stations de radios FM, de concevoir des articles de presse à publier dans les journaux et qui toucheront le maximum de femmes, de bannir les images dégradantes de la femme et assurer la continuité dans l’effort. Autant d’actions qui montrent, si besoin en est, l’importance de la femme dans le processus de développement.

Certes, de multiples acquis ont été engrangés en faveur des femmes, mais il reste davantage de progrès à faire, car le contexte socioculturel du Burkina Faso est rétrograde par rapport à toute cette législation en vigueur. En effet, l’attachement aux pratiques coutumières, bien que tempérées par le brassage des cultures, a un impact sur les attitudes et comportements vis-à-vis des femmes et la mise en oeuvre des stratégies de promotion de la femme et de développement.

Les pesanteurs socioculturelles constituent donc un poids qui ne facilite pas le changement de certains comportements défavorables à la participation politique des femmes. Par ailleurs, le respect de la tradition est souvent la principale justification que l’on donne dans les situations où les droits de la femme et de la petite fille sont violés.

Loin d’être finie, la lutte pour le bien-être de la femme est un combat de tous les instants, une bataille permanente et déterminante, qui s’inscrit d’ailleurs dans la dynamique des Objectifs du millénaire pour le développement (OMD).

Laure KANTIONO (stagiaire)

L’Opinion

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