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COMMERCE DE CHAUSSURES POUR DAMES : Un jeu de cache-cache entre policiers et vendeurs

Publié le lundi 29 août 2011 à 03h21min

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Installés au bord des rues de Ouagadougou, les vendeurs de chaussures, qui ont comme clients les dames, trouvent, pour la plupart leur compte. Leur principale difficulté reste sans doute la police municipale. Celle-ci les traque pour occupation anarchique des lieux publics. Elle va souvent jusqu’à confisquer leurs marchandises. Malgré cela, les vendeurs de chaussures ambulants, comme on les appelle, s’entêtent dans leur métier, au bonheur des dames. Quelle est la provenance de leurs marchandises ? Arrivent-ils à joindre les deux bouts avec ce métier ? Comment arrivent-ils à s’en sortir dans leur jeu de cache-cache avec les policiers ? Reportage.

Nous sommes au secteur 28 de Ouagadougou. Sur la circulaire, non loin de la pédiatrie Charles De Gaulle, les vendeurs de chaussures surtout de dames ont installé leur quartier général. On les y trouve généralement dans la soirée. Salif Nana, assis au milieu de ses chaussures qu’il a disposées pêle-mêle, donne des indications à ses frères qui peinent à retrouver l’une des chaussures achetées par une cliente. "Vous voulez quelle marque de chaussures ? Nous en avons pour toutes les pointures", nous a-t-il lancé. Il se rendra bien compte que nous ne sommes pas des clients lorsque nous lui avons expliqué les raisons de notre présence. Après quelques minutes de tergiversations, il accepte de se prêter à notre micro.

Il explique qu’il officie dans la vente des chaussures des dames depuis deux ans. A peine ces mots prononcés qu’une cliente lui demande : "Combien coûte cette chaussure ?". "4 000 F CFA à débattre", répond Salif Nana en se soustrayant au micro. Après plus de dix minutes de débats, ils tombent d’accord sur le prix de 2 000 F CFA. C’est le prix moyen des chaussures vendues par Salif Nana. Toute chose qui lui permet d’avoir un chiffre d’affaires de 15 000 à 25 000 F CFA par jour. "La somme que je gagne par jour ne me permet pas de subvenir à mes besoins ni à ceux de ma famille. Et en plus, je dois partager ce gain avec mes deux frères qui me donnent un coup de main".

Un chiffre d’affaires de 50 000 F CFA par jour

Tel n’est pas le cas chez Yacouba Sanfo, installé juste à côté de Salif Nana qui fait un chiffre d’affaires de plus de 50 000 F CFA par jour. Muni d’un haut-parleur, il indique les prix des chaussures aux nombreuses clientes qui l’entourent. "Je remercie le bon Dieu parce que je fais de bonnes affaires. Je peux avoir plus de 50 000 F CFA par jour. Avec cette somme, je réussis à subvenir à mes besoins et à ceux de ma famille", affirme Yacouba Sanfo. "Sanfo, quand amèneras-tu de nouvelles chaussures ? Celles qui sont là sont un peu anciennes", demande Marina Ouédraogo, une des clientes, apparemment familière au vendeur. Elle fait savoir qu’elle n’a de lieux d’achat de chaussures si ce n’est chez Yacouba Sanfo. La raison : ce sont des chaussures de bonne qualité et qui coûtent moins cher. "Vous savez que nous les femmes, nous aimons ce qui est moins cher. Il y a bien longtemps que je paie des chaussures chez lui.

Et ces chaussures ont toujours duré avec moi. Comme je trouve mon compte, je ne changerai pas de vendeur", explique-t-elle. Comme elle, c’est la même raison qui a poussé Bibata Yerbanga à venir se servir chez les vendeurs de friperie.

"Les chaussures friperies sont de bonne qualité"

Elle confie qu’elle est une amatrice de la friperie pas seulement pour les chaussures mais aussi pour les habits et les sacs à main. "Ce sont des articles qu’on ne trouve pas souvent dans les boutiques de vente de prêt-à-porter. Ce qui fait que si tu t’en procures, tu peux te vanter d’être la seule à les porter ", ajoute-t-elle. D’où viennent ces chaussures tant prisées par les femmes ? "Mes chaussures sont d’origine ghanéennes. Je me rends moi-même au Ghana si le besoin se fait sentir pour en chercher", répond Salif Nana. Yacouba Sanfo, lui, indique qu’il se ravitaille au grand marché de Ouagadougou. Si ces deux vendeurs ont accepté de dévoiler la provenance de leurs chaussures, Thierry Kouraogo, installé dans le quartier Koulouba, préfère taire l’origine de ses chaussures.

Et pour raison ? "Vous savez que dans tout domaine, il y a la concurrence. Si je vous dis publiquement la provenance de mes chaussures, mes concurrents vont profiter pour aller s’en servir", explique-t-il avant de nous confier la principale difficulté à laquelle ils sont confrontés. "Je m’en sors bien avec les bénéfices issus de la vente de mes chaussures. Mais, le vrai problème, ce sont les hommes de Simon Compaoré ; je veux parler de la police municipale. Elle nous déguerpit à tout moment prétextant que nous occupons anarchiquement les lieux publics. Elle m’ont déguerpi plus de dix fois. Et à chaque fois, je change de lieu. Toute chose qui ne permet pas aux clientes de nous retrouver".

Il lance, en outre, un appel aux autorités communales pour qu’elles construisent des hangars qui seront à leur portée. Vendre sous un hangar n’entre pas dans le plan de Ibrahim Zoungrana, vendeur de chaussures, installé au secteur 10 de Ouagadougou. Pour lui, le fait d’installer les chaussures au bord de la voie permet d’attirer la clientèle. "Certains clients n’ont pas le temps d’aller au marcher pour faire des achats. Si c’est au bord du goudron, en revenant du travail, ils peuvent s’arrêter pour se servir". Il confie par la suite qu’à l’image de Thierry, il a été maintes fois déguerpi par la Police municipale. Pour déjouer la vigilance des forces de l’ordre qui troublent leur quiétude, les vendeurs optent pour plusieurs stratégies. Certains se déplacent plusieurs fois dans la journée, d’autres attendent la nuit pour s’installer à proximité des feux tricolores. Des stratégies qui ne marchent pas toujours puisque certains vendeurs se voient souvent confisquer leurs marchandises.

Yannick SANKARA et Germaine KERE (Collaboratrice)

Le Pays

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