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Procès Justin Zongo : Les inculpés écopent de 8 à 10 ans d’emprisonnement ferme

Publié le mercredi 24 août 2011 à 03h12min

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Le verdict est tombé sur le coup de 12 h 30 ce mardi dans une salle d’audience du tribunal de grande instance de Ouagadougou étrangement calme. Ainsi, l’on retient que les trois policiers accusés, à savoir l’officier Narcisse Roger, les assistants Belibi Nébié et Bema Fayama sont reconnus coupables d’avoir exercé (directement ou non) des coups mortels sur la personne de Justin Zongo et sont condamnés, respectivement, à 8 ans, 10 ans et 10 ans d’emprisonnement ferme. La décision du tribunal est diversement appréciée par les acteurs de l’affaire dont les avocats des condamnés qui entendent se pourvoir en cassation.

D’un côté il y a ceux qui pensent, à l’image de l’avocat de la partie civile, Me Ambroise Farama, que le droit a été dit et s’en félicitent modérément. « Le droit a été dit. Pour nous, les condamnations, qui ne ressuscitent pas Justin Zongo, ne sont pas le plus important. Nous apprécions l’ensemble du déroulement du procès. Le but éducatif a été atteint. Nous espérons que le verdict servira de leçon à tous ceux qui sont chargés d’une mission de service public pour qu’ils n’abusent plus de leur position », a-t-il soutenu.

« C’est une victoire pour le peuple burkinabè en général et la jeunesse estudiantine en particulier mais nous restons lucides et vigilants parce qu’il reste des dossiers pendants où des élèves ou étudiants sont impliqués », renchérira, Francis Nikièma, président de l’ANEB Koudougou.

Denis Zongo, un oncle de Justin Zongo n’en dira pas plus, se contentant juste de ceci : « Nous sommes très satisfaits du verdict, à partir du moment nous avons déjà pardonné ce qui est arrivé »

Les accusés ne se prononcent pas avant, pas après leurs avocats

En revanche, du côté des proches des accusés et la défense, c’est la grande déception. Interrogé, le directeur général de la police nationale, Paul Sondo, ne prononcera pas un mot, tellement la décision est dure à encaisser. « Je suis extrêmement déçu et choqué. Je n’ai pas le sentiment que le droit a été dit. Mais, comme il y a possibilité de pourvoi, nous allons explorer toutes les voies de recours », réagira pour sa part l’avocat Moumouni Kopiho, manifestement abattu de n’avoir pas obtenu l’acquittement de ses clients qu’il considère non coupables, du fait que la culpabilité des accusés n’a été, selon lui, scientifiquement et matériellement prouvée. « Mais, c’est qui les coupables ? » a-t-il demandé pendant sa longue et captivante plaidoirie qui aura duré plus d’une heure. Et d’y répondre plus tard : « Nous sommes tous coupables ». Pour lui, les faits reprochés aux trois policiers ne sont en fait que la goutte d’eau qui a fait déborder le vase, convaincu de leur innocence. « Ils ne seront pas les moutons du ramadan, des boucs émissaires pour apaiser la tension dans le pays » avait-t-il martelé lors de son grand exercice oral devant la cour, promettant de se battre jusqu’au bout.

Les arguments des avocats de la défense semblaient si plausibles que les accusés n’ont pas senti la nécessité d’ajouter à la plaidoirie de leurs défenseurs le moindre mot, ne fût qu’une demande de clémence au tribunal pour les faits à eux reprochés. Mal, peut-être, leur en a pris. Car, la verve et la combativité de Me Kopiho, qui avait visiblement réussi, entre-temps, à coups de formules épatantes, à conquérir une bonne partie de l’assistance avec par moments des applaudissements, n’ont pas suffi en fin de compte à faire balancer les choses de leur côté. Au vu notamment de la décision des membres du tribunal qui dans leur majorité ont confirmé les charges retenues contre les 3 policiers et prononcé ces peines de 8 et 10 ans contre eux, conformément à l’article 329 du Code pénal. En prenant la décision, le président Dofini Ouarayo et les autres membres du tribunal ont presque suivi à la lettre les réquisitions du procureur général, Honorine Méda/Dabiré, qui avait préalablement requis 10 ans d’emprisonnement ferme à l’encontre des inculpés.

Cinq jours francs pour se pourvoir

Le président de la Cour d’appel de Ouagadougou a également précisé que des mandats de dépôts étaient décernés aux trois condamnés du jour.
Pour ce qui est du volet responsabilité civile, les accusés ont été seulement condamnés aux dépens, c’est-à-dire à prendre uniquement en charge les frais ; étant donné que la partie civile n’avait rien réclamé comme dommages et intérêts.
A la lecture du déroulement du procès, l’on peut avoir le sentiment, compte tenu de la qualité des plaidoiries de la défense, que le verdict est quelque peu sévère. Surtout que des circonstances atténuantes ont été reconnues aux accusés. Ce sentiment, que le tribunal a eu, à tort ou à raison, la main lourde, situation nationale oblige, explique quelque part, l’atmosphère de calme pesant dans laquelle le verdict a été accueilli dans la salle d’audience. Il n’y a eu en effet aucune manifestation de joie, pas même de la part des étudiants qui ont bataillé très fort pour la tenue du procès.

En tout état de cause, le droit a été dit et la balle se trouve à présent dans le camp des avocats de la défense qui ont exprimé leur intention de se pourvoir. Si telle est vraiment leur volonté, ils disposent de cinq jours francs pour le faire, s’ils ne veulent pas courir le risque de se retrouver dans une situation de forclusion.

Grégoire B. BAZIE
Lefaso.net
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