Affaire verger litigieux : Mise au point du maire de Koudougou
Le sujet défraie la chronique ces derniers temps, suscitant des réactions dont nous avons, du reste, fait écho dans nos colonnes. Il s’agit bien entendu de ce qu’il convient d’appeler "l’affaire verger litigieux de Koudougou" (cf notre édition du mercredi 10 août 2011). Nous avons reçu une mise au point du maire de Koudougou sur la question, et comme promis dans notre précédente édition, nous vous la proposons.
C’est à mon corps défendant que je prends ma plume sur ce sujet, en priant le Journal « L’Observateur Paalga », dans un souci de vérité et de clarté des faits, loin de toute polémique, de publier cette mise au point à la suite de l’écrit de son correspondant local à Koudougou, Cyrille Zoma, paru dans sa livraison du 10 août 2011 (cf. L’Observateur Paalga, n°7941 du mercredi 10 août 2011 : Verger litigieux à Koudougou. Faut-il abattre l’arbre pour avoir le fruit ? page 20 à 23).
Dans le reportage fait par votre correspondant qui m’a effectivement contacté autour de ce problème, il y a des précisions et des faits à établir correctement afin que le public et les hommes de bonne volonté connaissent ce qui s’est réellement passé.
1. « La mairie de Koudougou tente de retirer le verger de Wendyam Jacques Yaméogo »
Il n’est pas juste de présenter la situation de cette façon. Le terrain en question figurait sur le plan de lotissement comme une réserve administrative, donc affecté à l’utilisation exclusive de l’Administration. C’est cette réalité que nous avons trouvée an arrivant en juin 2006 à la mairie de Koudougou. Il se trouve que cette réserve qui devrait être libre de toute occupation, accueille le patriarche de Zinguindinguin ainsi que tous les fétiches du clan.
C’est pour régler définitivement cette question que j’ai approché le patriarche courant 2007 pour lui proposer le morcellement de la réserve afin de le sortir de cette occupation précaire, voire anarchique. Je dois, à la vérité, de dire qu’à cette époque, j’ignorais l’existence de manguiers sur le site. Ce qu’il a accepté chaleureusement, nous permettant, par lettre n°2007-528/CKDG du 10 décembre 2007 adressée au ministre de l’Economie et des Finances de demander le déclassement de la réserve constituée par la section LD, lot 1 du secteur 4 de Koudougou.
Le décret n°2009-357/PRES/PM/MATD/MHU du 27 juillet 2009 portant autorisation de changement de destination de terrain dans les centres lotis de Ouagadougou, Bobo-Dioulasso et Koudougou a été pris dans ce sens.
Avec tout le respect que je dois à Wendyam Jacques Yaméogo, il doit accepter que nul ne peut se prévaloir de sa propre turpitude. Allah m’est témoin ici- bas et au jour du jugement dernier. M’étant rendu compte de la situation dans laquelle il se trouvait j’ai essayé de mon mieux, pour ce qui relève de la compétence du maire, de l’aider afin qu’il ne sorte pas totalement perdant. Dès mon premier contact avec lui à son domicile, il m’a dit qu’il souhaitait être dédommagé.
C’est donc dans une logique de dédommagement que nous nous sommes engagés avec lui, selon ses vœux, pour tenter de trouver un terrain d’entente. La plainte qu’il a déposée au Greffe du Tribunal administratif de Koudougou, c’était pour être dédommagé. S’il n’est pas satisfait du jugement, cela ne doit pas être un prétexte pour revenir en arrière pour soutenir qu’il m’a demandé de l’aider à avoir ses papiers pour garder sa plantation de manguiers.
2. « Lors des attributions des parcelles (2000-2004), Wendyam Jacques Yaméogo aurait été attributaire du lot 1, section LD du secteur 4 »
Il n’y a pas d’attribution verbale de terrain. En plus, il n’est pas dans la compétence d’une commission d’attribution de parcelles à usage d’habitation d’attribuer un terrain à usage autre que d’habitation. En l’espèce, un verger n’est pas une parcelle à usage d’habitation. N’ayant pas fait à bonne date les formalités requises auprès des services du Receveur du Domaine et de la Publicité foncière, et non auprès de la mairie, pour conserver son verger, il ne dispose donc d’aucun titre. Pire, la commission a fait du lot dont les manguiers occupent une partie, une réserve administrative. Il est bon de préciser aussi que les manguiers n’occupent pas toute la réserve. Cette confusion est également entretenue dans le reportage alors même que je l’ai relevé à Cyrille Zoma.
3. « A sa venue, l’actuel maire, Seydou Koudougou Zagré, a sorti une note suspendant les opérations de lotissement jusqu’à nouvel ordre »
Ce n’est pas exact. Le reportage est ainsi jalonné de ce genre de petits arrangements avec la vérité. Le maire n’a aucune compétence pour suspendre, de surcroît par note, les opérations de lotissement. C’est une décision gouvernementale antérieure à notre élection au titre de la 3e mandature en 2006 qui avait suspendu le lotissement à Koudougou.
Pour des raisons que je ne souhaite pas commenter, on tente de personnaliser ce problème et de faire comme si j’avais des raisons propres d’en vouloir à Wendyam Jacques Yaméogo.
4. « Le maire a procédé au bornage du domaine avant d’avoir l’accord du Conseil des ministres pour le déclassement »
Pour constituer le dossier de déclassement, il faut fournir, entre autres, le plan avant morcellement et le plan après morcellement de la réserve administrative. C’est donc normal qu’un géomètre soit commis à cette tâche de morcellement, afin que le projet d’aménagement puisse être examiné en connaissance de cause par la commission interministérielle et le Conseil des ministres. Il n’y a donc là aucun acharnement ni une aucune attitude constitutive de faute.
5. « L’évaluation de la plantation par l’environnement est élevée »
Je dois préciser que la première fois que je suis allé au domicile de Wendyam Jacques Yaméogo, ce n’était pas pour lui demander pardon, encore moins pour lui dire qu’il sera dédommagé. C’était pour lui donner les informations sur la procédure que j’ai empruntée, mes contacts avec le patriarche et l’engagement de ce dernier de lui donner l’information sur le morcellement envisagé.
Je lui ai présenté donc mes excuses parce que j’ignorais qu’il avait des manguiers sur le site. Il m’a dit que le patriarche n’est pas son père mais son frère et qu’à ce titre, il ne pouvait pas se prononcer à sa place sur les manguiers mais seulement sur la portion de la réserve qui lui revenait. Il a dit, en présence de son fils Joël Yaméogo présent à cet entretien et qui l’a toujours accompagné toutes les fois que l’ai reçu, qu’il souhaitait être dédommagé.
J’ai pris congé de lui sans aborder la question du dédommagement qu’il a évoquée. Et c’est seulement après que j’ai demandé au 1er adjoint au maire qui avait assisté à notre premier entretien, tout comme le chef du service domanial de la mairie, Nabi Ouango, de repartir voir Wendyam pour savoir ce qu’il entendait par dédommagement.
C’est lorsqu’il a dit qu’il voulait 750 000 000 F CFA que je suis reparti chez lui la seconde fois pour bien comprendre et connaître ses prétentions. Il m’a confié qu’il avait une évaluation de la plantation et je lui ai dit que le dédommagement pouvait se faire soit en nombre de parcelles, soit en somme d’argent, soit en partie argent et partie parcelles. Et je lui ai dit que je ferai une évaluation par l’entremise des services de l’Environnement pour connaître la valeur actuelle de la plantation.
Une première évaluation par le service provincial de l’Environnement m’a été transmise avec un montant de 9 347 400 F CFA. J’ai contesté cette évaluation parce que j’ai soutenu que des manguiers qui ont près de 25 ans ne pouvaient pas être évalués sans tenir compte de la baisse de la production à partir de 15-20 ans. C’est pourquoi la seconde évaluation de 6 449 400 F CFA a été faite par le même service. J’admets que tout cela nous a pris du temps que, malheureusement, Wendyam interprète comme l’expression du peu de cas que nous faisons de son dossier.
Même si la décision du tribunal administratif a retenu les 9 347 400 F CFA sans expliquer pourquoi, j’en prends acte, en ayant toujours une pensée pour cet administré que je dois aider sans compromettre les intérêts de la ville de Koudougou qui doit payer ces dommages et intérêts.
6. « Tertius Zongo a préféré aller construire ailleurs »
C’est avec le cœur serré que je compte le nombre d’occasions manquées par la faute des gens de Koudougou pour relancer la dynamique du développement de la ville. Si en face de la nouvelle cité administrative construite autour des nouveaux locaux de la résidence et des bureaux du gouvernorat sortaient de terre des bâtisses des temps modernes, nulle doute que la vie administrative et économique de la ville connaîtrait un essor particulier.
Je dois des excuses à Son Excellence Monsieur Tertius Zongo, qui, comme par prémonition, mais aussi parce qu’il connaît bien les gens à Koudougou, m’avait dit, « si vous voulez m’attribuer le terrain, il faut prendre une délibération en conseil municipal ». Je lui ai dit que ce n’était pas nécessaire. En effet, ce n’est pas par une délibération en conseil municipal qu’on attribue une parcelle à usage d’habitation, mais par un procès-verbal d’attribution signée de tous les membres de la commission d’attribution des parcelles à usage d’habitation. C’est ce qui a été fait. Aujourd’hui, on tente de faire croire l’idée que c’est pour lui que le morcellement a été fait. Ce qui est faux.
L’opération était déjà en cours, quand Son Excellence Monsieur Tertius Zongo a exprimé son besoin de terrain.
Il a eu raison, dès les premières difficultés rencontrées sur le site, d’aller construire ailleurs et chacun sait ce qui est arrivé à cette maison qui a servi de pied à terre au Président du Faso lors de la dernière élection présidentielle : elle a été pillée et brûlée lors des manifestations consécutives au décès de l’élève Justin Zongo.
Koudougou est la plus grande ville du pays à être à moins de 100 km de la capitale. Il nous faut préparer dès à présent la ville à abriter des rencontres internationales (sommets de chefs d’Etat, matchs internationaux, séminaires, etc.). Cela passe par la qualité des infrastructures dont le logement. Ayons de l’ambition pour notre ville et évitons de faire de la politique politicienne autour de ces nobles ambitions. C’est l’avenir de la ville et de ses habitants qui est ainsi en train de se jouer.
7. « Et si on sauvait malgré tout les deux mille arbres »
La solution qui aurait permis de conserver intacts les manguiers a cessé d’exister depuis que la commission de lotissement a fait du lot 1, section LD du secteur 4 une réserve administrative.
Dès lors, le moindre mal pour cette plantation, c’est le morcellement opéré et la proposition d’attribution des parcelles à Wendyam et à sa famille là où se trouvent les manguiers. Comme les autres manguiers sont dans des parcelles à usage d’habitation, les pieds qui ne seraient pas dans l’emprise des constructions seraient sauvés certainement par les propriétaires de ces parcelles. Mais n’oublions pas qu’après 25 ans, un manguier, c’est l’ombre d’abord et quelques fruits ensuite. Ce n’est donc pas prévu qu’un bulldozer intervienne pour raser les arbres sur ce site.
8. « Qui est responsable de l’aménagement du territoire communal ? »
C’est à partir d’un Plan d’occupation des sols (POS) et d’un Schéma directeur d’aménagement et d’urbanisme (SDAU), deux outils précieux de planification et de gestion des espaces urbains et ruraux d’une collectivité que se prennent les décisions d’affectation des domaines aux différents usages (habitation, commerce, administration, culture, espaces verts, sports, santé, production, conservation, etc.).
Les années à venir sont lourdes de conflits de ce genre entre les municipalités et certains particuliers. Sans aucune démarche administrative, donc sans autorisation ni titre, des citoyens plantent des arbres sur les terrains exploités par leurs ascendants ou achètent des terrains ruraux qu’ils s’empressent de couvrir d’arbres de différentes espèces.
Par la suite, ils entendent imposer cela à l’Administration, à la seule autorité invertie du pouvoir de décider quelle activité peut être menée où, quel endroit est réservé comme espace vert, etc.). Il faut que la justice aide les collectivités pour que force reste à la loi, et que la planification urbaine soit respectée pour donner à nos villes des allures de cités bien pensées et bien aménagées.
9. « Le Tribunal administratif a tranché »
Tous les efforts de Wendyam Jacques Yaméogo, de ses conseillers et soutiens plus ou moins embusqués, à travers les radios locales à Koudougou, la presse écrite nationale et les radios hors de Koudougou, tendent à personnaliser cette affaire et à jeter l’opprobre sur moi. Il aurait fait appel de la décision et je note qu’il continue cependant à se répandre dans la presse pour mobiliser l’opinion contre moi. Je ne souhaite pas le suivre dans cette voie.
Qu’à cela ne tienne, je continuerai à traiter Wendyam comme un citoyen à part entière et un administré vis-à-vis duquel la mairie a des obligations. Tout ce qui peut être fait objectivement et légalement pour l’aider le sera. Lorsque la décision de la justice aura acquis l’autorité de la chose jugée, je prendrai les dispositions pour l’appliquer, car telle est la loi.
Et dans l’application de cette décision, je resterai ouvert à tout arrangement sans pouvoir aller contre la loi et les intérêts de la ville de Koudougou. Car seule la ville de Koudougou et la vérité peuvent prétendre à l’éternité.
Tout le reste passe, à commencer par le modeste serviteur de la ville de Koudougou que je suis, pour ce mandat municipal en cours.
Zagré Koudougou Seydou : Ministre plénipotentiaire
Maire de Koudougou
L’Observateur Paalga