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EXACTIONS EN COTE D’IVOIRE : La justice cherche son chemin

Publié le vendredi 17 juin 2011 à 02h49min

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Alassane Dramame Ouattara (ADO), président de la République de Côte d’Ivoire. Cet objectif a été atteint mais à quel prix ? Une victoire électorale contestée suivie d’une action militaire victorieuse après six mois d’entêtement de son adversaire Laurent Gbagbo. Le pays relève difficilement la tête, exsangue, divisé plus que jamais. Chaque camp a eu son heure de gloire, son lot d’exactions, de tueries, de vols, de pillage et de viols. Ces crimes ne sauraient rester impunis dans l’intérêt de la Côte d’Ivoire et de l’humanité. Depuis quelques semaines, les rapports s’empilent, accablant les uns et les autres, n’épargnant ni les vainqueurs d’aujourd’hui ni les hommes forts d’hier. Miliciens pro Gbagbo et rebelles des Forces nouvelles et toute leur chaîne de commandement vont devoir rendre compte de leurs différents forfaits.

ADO l’a promis et réitéré plusieurs fois. La case justice est un passage obligé sur le chemin de la vérité et de la réconciliation. Mais c’est un exercice qui pourrait s’avérer problématique pour le pouvoir en place. Ce pouvoir joue sa crédibilité, s’il n’arrive pas à tenir cette promesse d’une justice indépendante capable de se mettre au-dessus des intérêts des puissants du moment. A ce sujet, le rapport des experts de l’ONU publié le 8 juin dernier est sans appel. Il recommande en tout premier lieu « d’assurer que les responsables des violations des droits de l’Homme et du droit humanitaire soient traduits en justice.

Dans ce contexte, les enquêtes initiées doivent être conduites de manière exhaustive, impartiale et transparente". Le mandat de ADO risque de se jouer sur l’effectivité de la mise en œuvre de cette justice indépendante et transparente tant la tentation d’une justice des vainqueurs est trop grande. Il lui faudra beaucoup d’engagement et de détermination pour se débarrasser des brebis galeuses de son camp. La pression est donc beaucoup plus sur ADO. Comment les artisans de la victoire de ADO que sont les soldats, rebelles et autres chefs de guerre qui lui ont permis de reconquérir son pouvoir, vont-ils accueillir la livraison de leurs camarades à la justice nationale et internationale ? Les risques de fissures sont réels au sein des FRCI (Forces républicaines de Côte d’Ivoire). La décantation en cours au sein des FRCI avec l’encasernement de tous les combattants ne se fera pas sans encombres non plus.

Le gouvernement de Soro le sait et anticipe le reclassement des grades au sein des nouvelles forces armées en mettant en place une commission à cet effet. ADO a gagné la guerre, mais le rétablissement de l’autorité de l’Etat ne sera pas une partie de plaisir. Cependant, malgré tant d’adversité, l’homme tient là une occasion unique de montrer qu’il est à la hauteur des défis de la réconciliation nationale, du rétablissement d’un Etat de droit où régneront la paix et la justice. C’est ainsi seulement qu’il prouvera aux Ivoiriens et à la communauté internationale qui n’ont pas eu tort de le soutenir, que leur sacrifice n’aura pas été vain. En attendant, la justice doit passer. Sur son chemin, elle fauchera dans chaque camp des agneaux du sacrifice. C’est le prix à payer pour réconcilier le pays avec lui-même.

Abdoulaye TAO

Le Pays

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