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Reformes constitutionnelles au Burkina : Les Organisations de la société civile sonnent le rassemblement des troupes

Publié le mardi 21 décembre 2010 à 02h31min

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Le conseil pour la gouvernance démocratique (CGD) en collaboration avec plusieurs organisations de la société civile du Burkina ont organisé une conférence publique le 18 décembre au conseil burkinabè des chargeurs à Ouagadougou. Des représentants du Niger, du Mali, du Bénin et de la république démocratique du Congo ont partagé l’expérience des luttes pour le renforcement de la démocratie dans leur pays. Des recommandations pertinentes ont été faites pour pouvoir aller à la discussion sur les reformes constitutionnelles qui s’annoncent dans notre pays. Les participants se sont donnés pour mots d’ordre : organisation, mobilisation et action, car le temps n’est plus aux conférences.

Depuis l’appel du chef de l’Etat à mûrir des réflexions pour des reformes en vue de consolider la démocratie au Burkina en décembre 2009, on s’active de part et d’autres. Que ce soit au niveau des partis politiques ou de la société civile, le consensus semble se dégager pour des reformes majeures. Objectif : donner du tonus à un système démocratique à bout de souffle. Mais la forme et le contenu de ces reformes sont loin de faire l’unanimité. Chacun y va de sa perception. Pour les partis politiques de l’opposition, il faut un toilettage complet de la constitution burkinabè sans pour autant toucher à l’article 37 qui fixe le nombre de mandat à deux pour le chef d’Etat. Le ton ne semble pas le même du coté de la majorité présidentielle qui envisage sauter le verrou de la limitation des mandats.

Donc l’heure de la mobilisation a sonné. « Ces reformes doivent permettre au Burkina non simplement d’être un pays émergent mais aussi et surtout une démocratie émergente », soutient Pr Luc Marius Ibriga, président du comité d’organisation de ce colloque qui avait pour thème : « démocratie et reformes institutionnelles en Afrique : cas du Burkina Faso ». Il a été scindé en deux panels. Le premier a porté sur « comment promouvoir les reformes constitutionnelles qui consolident la démocratie et le second sur comment contrer efficacement les reformes constitutionnelles qui affaiblissent la démocratie ?

Après le mot introductif du Pr Luc Marius Ibriga, place au Pr Mwayila Tshiemdé de la RDC de camper le décor. Sa communication était intitulée « réforme constitutionnelle et despotisme légal en Afrique noire post conférences nationales ». Pour lui, il y a une maîtrise parfaite de l’ingénierie du mécanisme constitutionnelle par les africains. Mais, le véritable problème est que l’opposition est un objet non identifié dans la plupart de nos pays.

Cette opposition anémiée est obligé de se confiner dans une survie qui ne dit pas son nom. L’homme étant naturellement faible, il convient de trouver des mécanismes qui arrêtent le pouvoir, d’où la nécessité de reformes. Il rejoint ainsi le président américain Barack Obama qui disait que l’Afrique n’a pas besoin d’hommes forts mais d’institutions fortes. Les reformes annoncées au Burkina devraient donc tendre vers le renforcement le pouvoir des institutions et non celui des hommes à la tête d’institutions faibles. « Il faut que la puissance de hommes soit devancée par la puissance des lois et des valeurs », ajoute-t-il.

Pour le malien Oumar Dembélé qui a partagé l’expérience du comité d’appui aux reformes institutionnelles au Mali, il appartient à la société civile burkinabè de jouer pleinement sa partition pour empêcher des reformes de façade. Il va plus loin dans sa logique en estimant qu’actuellement « il y a des dieux qui nous dirigent, faisant en sorte qu’ils redeviennent des hommes ». Théodule Nouatchi du Bénin, a quand à lui, d’abord relaté comment la société civile de son pays a réussi à contrer la volonté de Mathieu Kérékou de modifier la constitution pour briguer un troisième mandat. Il a ensuite demandé d’envoyer les politiciens à la formation du leadership.

Plus loin, il demande à tout potentiel candidat de faire ce qu’il a appelé « la retraite constitutionnelle », c’est-à-dire deux semaines de formation et d’apprentissage de la constitution de leur pays.
Le rapport du collège des sages, les reformes proposées par les refondateurs, celles des citoyens et citoyennes de l’alternance, le rapport du MAEP, les propositions de la coalition des organisations de la société civile formulées dans le cadre des reformes législatives et constitutionnelles menées par l’assemblée nationale. Bref, les tiroirs sont pleins de rapports de recommandations et de propositions formulées par divers acteurs qui n’ont pas connu de suite ou qui ont connu une suite insatisfaisante.

Malgré la stabilité et la paix sociale apparente, le Burkina Faso est à la croisée des chemins. Et les burkinabè doivent se parler pour parvenir à des reformes profitables à tous. Il est nécessaire de préparer ce dialogue. Cette préparation passe par un certain nombre de questionnements à savoir : les sujets et les thématiques qui seront abordés, qui doit participer au dialogue, dans quel contexte il aura lieu… ?.

Il faut aussi des réponses à un certain nombre de questions avant d’y aller, notamment les sujets à l’ordre du jour, le rôle de chacun, le chronogramme, la mise en œuvre des décisions, et surtout l’évaluation de la mise en œuvre de ces décisions. Il faut aussi situer les objectifs de ce dialogue. C’est d’ailleurs l’objet de ce colloque. « Nous devons nous préparer par rapport au contenu des reformes mais aussi au processus », souligne Pr Augustin Loada, le directeur exécutif du CGD.

L’exercice de ce samedi était une forme de réappropriation du débat politique par les citoyens. Après le partage d’expérience et la formulation des recommandations, le président du comité d’organisation Luc Marius Ibriga est désormais convaincu que le temps n’est plus aux conférences. Le temps est à l’action. « Mais pour que l’action soit efficace, il faut que la mobilisation soit certaine et que l’organisation soit rigoureuse », assure-t-il.

Moussa Diallo

Lefaso.net

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Vos commentaires

  • Le 21 décembre 2010 à 09:47, par yanbo En réponse à : Reformes constitutionnelles au Burkina : Les Organisations de la société civile sonnent le rassemblement des troupes

    Je suis d’avis avec le CGD et les organisations de la société civile qu’il faut aller à l’action. C’est pourquoi chaque acteur(citoyen, partis politiques etc...) doit jouer sa partition.

  • Le 21 décembre 2010 à 09:48, par Dids En réponse à : Reformes constitutionnelles au Burkina : Les Organisations de la société civile sonnent le rassemblement des troupes

    Bon courage. Surtout soyez prudent pour toute mobilisation. Si non certaines réactions pourront être favorables à l’atteinte de leurs (les loups du pouvoir actuel) objectifs. Souvenez vous du mouvement des étudiants en 2007 qui a donné un coup de pousse à la confiscation de leurs droits (mur de répression,cité fermée,Police spéciale universitaire,affaiblissement des forces de lutte,démoralisation des étudiants due aux retards insaisissables, etc.)

  • Le 21 décembre 2010 à 10:06, par john,bf En réponse à : Reformes constitutionnelles au Burkina : Les Organisations de la société civile sonnent le rassemblement des troupes

    Le peuple restera mobilisé derrière des hommes de parole et incorruptibles pour barrer la route à la modification de l’article 37.

  • Le 21 décembre 2010 à 10:53, par yirnooma En réponse à : Reformes constitutionnelles au Burkina : Les Organisations de la société civile sonnent le rassemblement des troupes

    Franchement très bonne initiative et bon compte rendu. Vous êtes de grands intellectuels. On doit avec l’action continuer l’éducation de nos concitoyens.
    Dites pour nous qui sommes loin de nos pays comment pouvons nous avoir l’intégralité de cette conférence en audio ?
    Je suis certain que ce qui pourrait nous faire défaut c’est une organisation efficiente. Courage nous rentrerons bientôt pour poursuivre cette lutte.

  • Le 21 décembre 2010 à 12:28, par Paris Rawa En réponse à : Reformes constitutionnelles au Burkina : Les Organisations de la société civile sonnent le rassemblement des troupes

    A mon humble avis, les organisations de la société civile devraient s’entendre pour exiger la disqualification (l’incompétence même) de l’Assemblée Nationale dans sa composition actuelle quand au traitement de la question de l’article 37, et plus largement des réformes constitutionnelles.

    - A cela deux raisons :

    1- Cette Assemblée Nationale (AN) est en fin de mandat et aurait dû cédé la place, n’eut été sa décision de reporter les législatives en 2012. Il serait donc antidémocratique que cette même Assemblée utilise ce délai d’exception qu’elle se donne par son vote pour statuer sur des constitutionnelles importantes. Elle devrait juste s’occuper de affaires courantes et de l’organisation des élections, afin de laisser à la législature qui sera mise en place par les élections de 2012 le soin de décider des ces réformes éventuelles.

    2- La seconde raison est plus grave parce qu’elle touche au fond et à la non légitimité même, non seulement de la suppression elle-même de la limitation du mandat présidentiel dans l’article 37, mais aussi de celle de l’AN en cette matière. Suite à la crise due à la précédente suppression de la limitation par l’AN, la mort de Norbert Zongo et la médiation du Collège des Sages avaient conduit au rétablissement de cette limitation en 2000, encore par l’AN. Cette fois, en 2010, c’est de l’AN encore que vient l’agitation de cette idée de suppression de la limitation, au moment même ou cette disposition qu’elle a votée en 2000 doit entrer en application pour le première fois. Le président de l’AN lui-même trouve la disposition limitative votée par l’AN est antidémocratique. Alors, comment peut-on encore accorder du crédit à une institution composée de 111 députés qui votent des lois que sont président trouve antidémocratique ? L’autre question est pourquoi l’AN vote une loi qu’elle ne veut pas voir entrer en application ? Avec cette tergiversation quant aux principes fondamentaux, l’AN a elle-même rompu le contrat de confiance qui devait la lier au peuple et lui garantir sa légitimité.

    - En conséquence, il me semble qu’il n’y a que deux possibilités que les organisations de la société devraient civile devraient exiger comme conditions indiscutables pour évoquer la question de l’article 37 :

    1- Exiger que l’AN dans sa composition actuelle laisse la question des réformes pour les députés qui seront élus en 2012. Mais même cette solution ne serait qu’une tolérance puisqu’on sait que depuis le référendum de juin 1991, c’est l’AN qui a toujours conduit les modifications constitutionnelles qui ont aboutit à la situation litigieuse actuelle avec la personnalisation outrancière de la fonction présidentielle au Burkina Faso. La deuxième possibilité serait donc la plus limpide.

    2- Exiger une structure (conférence, Assemblée de type constituant) nationale indépendante, représentative de la nation souveraine pour fixer (décider) des limites et des orientations de certaines réformes sensibles : les mandats électifs (éligibilité, durée et nombre), la composition de l’AN, la nature et les compétences du juge constitutionnel (conseil ou cours constitutionnel, composition, éligibilité...)

    Dans tous les cas, il faut se battre pour avoir des débats organisés, et des commissions de réflexion prenant en compte toutes les sensibilités dans la nation burkinabè. C’est par là que l’on peut renouer le contrat de confiance nécessaire entre le monde des politiques et les citoyens. Il faut empêcher le pur formalisme qui tente de s’auto-légitimer avec des arguments obséquieux qui n’ont rien de démocratique.

  • Le 21 décembre 2010 à 12:52, par article 37 En réponse à : Reformes constitutionnelles au Burkina : Les Organisations de la société civile sonnent le rassemblement des troupes

    vous verrez dans quelques mois les bouches se délier pour critiquer avec vigueur et dénoncé avec grande énergie le 3ème quinquennat qui est la dernière tentation de COMPAORE.

    Le système montre des signes de faiblesse, la communauté IN fera bloc pour chasser un des derniers roi d’Afrique.

    Creusez encore dans wikileaks et vous verrez ce que les diplomates pensent de ce pays et de certains de ses hommes. C’est bon signe.

  • Le 21 décembre 2010 à 17:57, par Etalon En réponse à : Reformes constitutionnelles au Burkina : Les Organisations de la société civile sonnent le rassemblement des troupes

    Que c’est dommage pour l’Afrique et particulièrement pour le Burkina Faso et de surcroît pour un président fut-il celui de la représentation du peuple qui jugeait la limitation du mandat du président du faso anti-constitutionnelle.

    Pour ma part, je pense qu’il faut d’abord faire l’expérience de la limitation du nombre de mandat et tirer toute les conséquences avant d’entreprendre une reforme en ce sens. Faisons d’abord l’expérience avant tout.

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