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CONTRÔLE DES INSTITUTIONS EN CÔTE D’IVOIRE : Qui va gagner la bataille ?

Publié le jeudi 16 décembre 2010 à 01h51min

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Le camp de Alassane Ouattara a appelé ses partisans à se mobiliser pour accompagner son équipe qui compte s’installer effectivement dans les ministères et institutions à partir d’aujourd’hui. Ainsi, le candidat déclaré élu par la Commission électorale indépendante (CEI) ivoirienne a visiblement réalisé que le soutien dont il jouit, surtout de la part de la communauté internationale, bien qu’il soit utile, ne suffit pas à lui conférer tous les attributs de son pouvoir. Il est sûrement arrivé à la conclusion que l’option de créer une radio parallèle à celle d’Etat est également une mesure insuffisante. C’est probablement au regard de cela que son équipe a décidé d’investir les locaux abritant les différents ministères et institutions.

Pour ce faire, il appelle son électorat à faire en sorte que son choix de lui conférer le pouvoir puisse se matérialiser. S’agit-il là d’un aveu d’impuissance ou d’une stratégie qui peut se révéler payante ? En tout cas, la Radio télévision ivoirienne (RTI) sera au coeur de toutes les attentions ce jeudi. C’est la première cible de l’équipe Ouattara, preuve de l’importance accordée à la maîtrise de cet outil dans la conquête et la gestion du pouvoir d’Etat en Eburnie. C’est une sorte de "Bastille" à l’ivoirienne. Alors, la prise de la "Bastille" aura-t-elle lieu ? Ouattara est-il en mesure de conduire une insurrection populaire pacifique ? Il faut attendre de voir.

A priori, le FPI semble plus rompu à ce genre de lutte avec ses leaders qui en ont une certaine tradition, mais aussi avec ses structures de jeunes comme la Fédération estudiantine et scolaire de Côte d’Ivoire (FESCI) et le Congrès panafricain des jeunes et des patriotes (COJEP) qui lui sont proches. Mais, dans un tel duel, rien n’est à négliger. Il y a très peu de certitudes établies. La situation peut évoluer dans un sens comme dans l’autre et tout pari quant à l’issue de cette confrontation est, de ce fait, risqué. Ce qui va se passer à Abidjan aujourd’hui pourrait être déterminant dans la sortie ou l’aggravation de la crise post-électorale que traverse le pays. Dans ce bras de fer dans la rue, celui qui l’emportera marquera certainement les esprits.

Face au projet du camp adverse, le régime de Laurent Gbagbo peut avoir deux attitudes : ou bien, il fait recours à la méthode musclée, ou bien il privilégie la manière douce. En d’autres termes, les forces de défense et de sécurité fidèles au président sortant peuvent, soit disperser par la force ceux qui essayeront de forcer les barrages qu’ils vont certainement dresser à l’occasion, soit les contenir plutôt dans le calme. Cependant, dans cette épreuve de force, plusieurs inconnues demeurent. Au nombre de celles-ci, la cohésion des Forces armées nationales de Côte d’Ivoire (FANCI) autour du régime Gbagbo, le comportement des Forces nouvelles et des civils des deux camps.

Le syndrome rwandais hante les esprits. On est conscient de la détermination du camp Gbagbo à contrôler ces bastions du pouvoir. Il prendra sans doute toutes les mesures dont il dispose pour réduire ces manifestations à leur plus simple expression. Il n’est même pas exclu qu’un décret suspendant toute possibilité de manifestation, de regroupement public dans le pays ces temps-ci, soit signé. Au plan militaire, c’est un vrai test en matière de fidélité de ses troupes pour le candidat déclaré vainqueur par le Conseil constitutionnel ivoirien. En tout cas, jusqu’à présent, il semble avoir un bloc solide autour de lui. Le camp Ouattara réussira-t-il à apporter la preuve du contraire ? Les prochaines heures nous le diront.

Pendant ce temps, les sanctions de l’Union européenne contre des proches de Gbagbo considerés comme étant ceux qui bloquent le processus de sortie de crise, se sont précisées. L’organisation européenne a, en effet, publié une liste de onze personnalités ivoiriennes contre lesquelles ses sanctions sont dirigées. Restrictions de voyages et gel des avoirs sont les mesures prises à leur encontre. En ce jour de tous les dangers au pays de Houphouët- Boigny, la communauté internationale doit ouvrir l’oeil et le bon. Il faut mettre chacun des protagonistes devant ses responsabilités dans ce face-à-face plein d’incertitudes.

Certes, dans le camp Gbagbo, on assure qu’il n’y aura aucun problème, que tout se passera bien. Mais, au regard des enjeux qui justifient certainement la détermination de chacun des protagonistes, tout peut basculer et les événements, tourner au drame. C’est une chose difficile à nier aujourd’hui. La confrontation peut rallumer la dangereuse mèche du conflit armé dans ce pays, surtout si les choses venaient à dégénerer. Dans cette bataille de pachydermes, c’est la Côte d’Ivoire, mais aussi toute la sous-région, qui sont les grands perdants.

Sans être alarmiste, on est conscient que la détérioration du climat socio-politique suffisamment tendu vers laquelle on se dirige, est de nature à réveiller tous les démons des affrontements meurtriers en somnolence. Il appartient à toutes les parties concernées de travailler à éviter toute dérive, tout bain de sang dans ce pays déjà meurtri par ces huit longues années de crise. Et, une fois de plus, tout ce qu’on souhaite des Eburnéens, en ces instants graves, c’est qu’ils nous surprennent agréablement.

"Le Pays"

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