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Niger : la transition en panne ?

Publié le lundi 18 octobre 2010 à 03h56min

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Qui veut mettre du sable dans le processus de transition en cours au Niger ? Depuis quelques jours, en effet, il y a, pour ainsi dire, un coup d’Etat dans le coup d’Etat. Quatre hauts gradés, membres de la junte qui s’est emparée du pouvoir depuis le 18 février 2010 pour balayer la maison mise sens dessus-dessous par Mamadou Tandja, l’ancien président qui voulait faire passer, au forceps, son « tazartché » (continuité) de malheur, sont gardés « au frais », à la gendarmerie.

Le Conseil suprême pour la restauration de la démocratie (CSRD) doit certainement rester vigilant et balayer devant sa porte avant de pouvoir nettoyer les écuries politiques nigériennes. Alors qu’on observait tranquillement le déroulement de cette transition pacifique et applaudie, qui fait son chemin vers les nouvelles consultations électorales censées remettre de l’ordre dans la maison, voilà que le CSRD est obligé de chercher, de traquer et de mettre « hors d’état de nuire », le ver qui pourrit son fruit !

Depuis le week-end dernier, en effet, des membres influents du CSRD sont détenus à la gendarmerie, soupçonnés d’avoir tenté de « déstabiliser » le pouvoir pour prolonger la transition vers un régime civil. En clair, il s’agirait donc d’activistes qui ne souhaiteraient pas voir la transition en cours dans le pays s’achever de si tôt. On parle même d’un « coup d’état contre la personne du chef de l’Etat par intérim, le général Salou Djibo ». Le chef de la junte serait-il devenu indésirable parce qu’il tient à respecter la parole donnée au peuple nigérien en conduisant la transition à son terme, et selon le calendrier établi ? Ou des dissensions internes l’auraient-il subitement rendu impopulaire au sein de son état-major, au point que l’on envisageât de le… destituer de son fauteuil de chef de la junte ?

Même si les quatre officiers détenus actuellement à la gendarmerie ne sont pas encore inculpés, cette affaire révèle, sans nul doute, la fébrilité de la transition nigérienne, qui pourrait encore être pris en otage par des ténors du CSRD, qui auraient su dissimuler, jusque-là, leur agenda et leur objectif cachés. Le fait que le « Numéro 2 » de cette instance, le colonel Abdoulaye Badié, soit ainsi mis sur la sellette est en soi préoccupant. Cela souligne l’importance de la menace, dont on ne peut véritablement dire si elle est définitivement écartée à ce jour. Il faut toutefois espérer que le Niger n’entre pas à nouveau dans une spirale infernale, où les désaccords sur les objectifs et la vraie finalité de la énième incursion de l’armée dans la vie politique, chaudement saluée par la population, finissent d’être sacrifiés sur l’autel d’intérêts personnels et égoïstes.

En attendant que l’on tire toutes les leçons de cette détestable révolution de palais –ou ce qui est supposé comme telle- heureusement déjouée (?), il y a lieu, certainement, de saluer la vigilance du CSRD, qui montre bien qu’il reste rivé à sa promesse du 18 février 2010, visant notamment à restaurer la démocratie bafouée au Niger. La gestion prudente et ferme qu’il fera de cette « affaire » devrait donc renforcer son crédit auprès des populations et positionner définitivement son « commandant en chef », le général Salou Djibo, comme le garant incontesté du respect des normes démocratiques que le peuple nigérien se serait données, à l’issue des prochaines consultations électorales, dont on espère qu’elles ne souffriraient pas de cet accès de fièvre putschiste au sein de la junte.

A contrario cependant, on peut craindre que les velléités ainsi affichées de remise en cause de l’ordre transitaire annoncé n’escamote complètement la mission du CSRD, qui se prévaudrait alors de la hantise d’un coup de force -réel ou supposé- du processus de « restauration démocratique » pour s’éterniser aux affaires. Mais les Nigériens ont déjà su s’opposer, à plusieurs reprises, à tout pouvoir autoritaire, applaudissant les interventions de l’Armée, dès lors que leur irruption sur la scène politique nationale épouse le bon vouloir populaire et s’opère exclusivement contre des régimes illégaux et illégitimes. On peut donc se convaincre qu’a priori, il n’existe ni avenir, ni longévité pour un régime militaro-transitoire, qui chercherait à faire son nid au pouvoir par des voies détournées…

SERGE MATHIAS TOMONDJI

Fasozine

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Vos commentaires

  • Le 18 octobre 2010 à 16:06, par Tapsoba En réponse à : Niger : la transition en panne ?

    Ohh pardon ! N allez pas trop vite en besogne.lisez le discours du General Djibo ouvrant la campagne du referendum du 31 octobre dans www.nigerpresse.com/journalniger/tamtaminfo.htm et vous vous rendrez compte que ces soubressauts sont loin d entamer la determination de l homme à democratiser son pays.Vu de l exterieur,cela intrigue mais pour les observateurs avertis nigeriens ,cela devait arriver car il y avait non seulement du bicephalisme à la tête de l Etat mais aussi les citoyens ne comprennent pas pourquoi la croisade pour l assainissement public vise uniquement le monde politique et civil tout en épargnant le monde militaire et paramilitaire qui est autant mouillé .Surtout, certains lient ces arrestations au rapt des expatriers francais car lors de son sejour à New York à l occasion du sommet de l ONU,le chef de la junte aurait reconnu,selon le meme site,qu il y a eu complicité au sein de la hiérarchie militaire qui aurait detourné l argent versé par AREVA au profit des forces de securité des sites d exploitation et par conséquent il se devait agir.En outre,certains de son entourage s opposaient au general sur le processus de transition qui serait courte à leurs yeux.

    Bonne chance à Djibo !

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