LeFaso.net, l'actualité Burkinabé sur le net
Proverbe du Jour : “Vous n’empêcherez pas les oiseaux de malheur de survoler votre têtе, mаis vοus рοuvеz lеs еmрêсhеz dе niсhеr dаns vοs сhеvеux.” Proverbe chinois

Kadidiatou Joséphine Kaboré, directrice générale des ressources halieutiques : « La question de la qualité du poisson importé est très complexe »

Publié le vendredi 1er octobre 2010 à 05h39min

PARTAGER :                          

La direction des Ressources halieutiques, basée au quartier Kossodo de Ouagadougou, est un service du ministère de l’Agriculture, de l’Hydraulique et des Ressources halieutiques. Dans l’entretien suivant, la première responsable de la structure, Kadidiatou Joséphine Kaboré, évoque des questions liées au poisson au Burkina Faso.

Sidwaya(S) : Quelles sont les potentialités du Burkina Faso en matière de ressources halieutiques ?

Kadidiatou Joséphine Kaboré (KJK) : En termes de potentialités hydriques, le Burkina Faso a construit beaucoup de barrages. Nous avons près d’un millier de plans d’eau. Naturellement, on doit pouvoir y pratiquer la pêche de capture et avec plus de moyens, l’aquaculture. Parlant des bases productives, nous avons le potentiel.

En ce qui concerne les ressources halieutiques, c’est-à-dire les espèces de poissons, l’inventaire qui a été effectué par un consultant dans les années 1960, a répertorié 121 genres de poisson. Mais de nos jours, avec les changements climatiques et autres, on peut plancher sur la centaine d’espèces. Il faut reconnaître que depuis cette date, il n’y a plus eu d’enquête sur l’ensemble du territoire national.

S : Qu’en est-il du besoin et de la production actuelle de poisson du Burkina Faso ?

KJK : La production nationale de nos jours, est d’environ 12 000 tonnes. Pour ne prendre que le cas de l’année écoulée, 2009. A cela, s’ajoutent les importations et nous le faisons en grande quantité. Au Burkina Faso, le poisson est de plus en plus entré dans les habitudes alimentaires des populations. En 2009 par exemple, nous avons importé 40 000 tonnes. Les besoins nationaux se situent à un peu moins de 60 000 tonnes.

S : Le poisson importé est-il de qualité sûre ?

KJK : C’est une question à la fois très importante et très complexe. Elle nous préoccupe. Mais en ce qui concerne le contrôle de la qualité des produits halieutiques à proprement dit, il y a des structures qui interviennent. Il s’agit par exemple, du ministère des Ressources animales ou du Laboratoire nationale de santé publique. Ce sont ces structures qui sont habilitées à effectuer les contrôles piscicoles pour ce qui est de l’hygiène et de la santé. A la direction générale des Ressources halieutiques, nous ne faisons que de la sensibilisation des acteurs, nous n’analysons pas les produits.

S : Actuellement sur le marché, l’on constate l’absence de certaines espèces telles que le « chincha », un poisson beaucoup prisé des consommateurs. Pourquoi cette rupture  ?

KJK : Il y a eu effectivement, entre-temps, une pénurie de cette espèce de poisson de mer. Le privé qui importe le « chincha » en a parlé dans la presse. C’est le seul qui fait entrer ce genre de poisson au Burkina Faso, donc c’est lui seul qui sait pourquoi il y a une rupture. C’est le commerce et nous ne pouvons pas savoir forcément la vérité.

Peut-être que le problème se situe au niveau de sa source d’approvisionnement. En tous les cas, depuis que le chincha a été introduit au Burkina Faso, c’est la première fois que nous constatons cette rupture.

S : Le Burkina Faso n’a produit que 12000 tonnes de poisson en 2009 sur un besoin d’environ 60 000 tonnes. Quel est la politique mise en place pour augmenter la production ?

KJK : Nous avons beaucoup de plans d’eau et de barrages, mais nous nous rendons compte qu’il y a une baisse présentement de la production nationale. Pourquoi ? C’est la surexploitation. Nous avons toujours invité les pêcheurs à ne pas utiliser les filets prohibés, car ils ramassent aussi bien les poissons que les alevins. A cela s’ajoutent les phénomènes de pollution, d’ensablement, de changement climatique, etc.

Pour pallier ces handicaps, nous sommes en train de promouvoir l’aquaculture depuis quelques années. Plusieurs systèmes sont donc déployés. Nous avons l’extension où l’on construit des bassins pour y élever du poisson. C’est le cas du projet d’élevage piscicole de Bagré. Nous avons aussi de petites stations qui produisent des alevins pour l’empoissonnement des plans d’eau et des unités aquacoles. Nous avons aussi la pisciculture en cage, dans les barrages. Auxquels s’ajoutent des bassins enclos dans plusieurs barrages du pays où le poisson est élevé dans un espace bien délimité.

En outre, il existe aussi un projet financé par la république du Japon en cours d’exécution. Il vise la promotion des étangs communautaires dans les zones humides pour pouvoir stocker le poisson naturel pendant la saison pluvieuse. La population pourra procéder à la récolte, une fois que l’eau se retire. Nous réfléchissons aussi sur d’autres formes de pisciculture familiale dans le cadre de ce projet avec le Japon.

S : Parlant de la promotion de l’aquaculture, où en est-on avec le Projet d’élevage piscicole (PEP) de Bagré  ?

KJK : Le projet d’élevage piscicole (PEP) de Bagré a pris officiellement, fin en 2009 et en janvier, l’ambassade de Chine-Taïwan a rétrocédé officiellement, l’ouvrage au gouvernement burkinabè, notamment au ministère en charge des Ressources halieutiques.

Une étude est en train d’être menée présentement pour déterminer les parties à privatiser et celles que l’Etat va gérer. Dans ce centre, il y a des cellules de production d’alevins, de poissons marchands, une unité de fabrique de glace, d’aliments et de prétraitement de poissons. Le centre de formation sert à former aussi bien les agents du privé que du public, afin de booster l’aquaculture dans notre pays. Nous attendons impatiemment, les résultats de l’étude.

(S) : La semaine dernière, du 20 au 23 septembre 2010, vous avez pris part à une rencontre internationale sur le poisson à Banjul en Gambie. De quoi s’est-il agi exactement ?

K.J.K : La rencontre était relative au plan d’action pêche- aquaculture de l’Union africaine (UA), dans le cadre du Nouveau partenariat pour le développement de l’Afrique (NEPAD). Il y a eu deux évènements, en fait. D’abord, la rencontre des experts qui a validé et amendé le rapport qui traite de la question, ensuite, le rapport a été soumis aux ministres chargés des pêches et de la pisciculture des pays de l’UA.

(S) : Quelles peuvent être les retombées d’une telle rencontre pour le Burkina Faso ?

KJK : Au niveau des pays de l’UA, il y a des pays maritimes où est pratiquée la pêche de mer. A côté de ceux-ci, il y a des pays sans littoral où n’est possible que la pêche continentale. Le Burkina Faso fait partie de cette dernière catégorie de pays. Nous avons donc plaidé pour notre cause. Plus exactement, nous avons négocié pour que dans ce genre de programme africain, le volet pêche continentale soit pris en compte et que l’aquaculture soit davantage promue dans nos Etats respectifs.

C’est ce que nous souhaitons en tant que pays sans façade maritime. Nous avons plaidé pour que nos politiques nationales soient suffisamment appuyées par les instances africaines en la matière. Plusieurs partenaires et bailleurs de fonds étaient présents à la rencontre et ont reconnu le bien-fondé de soutenir la pêche et de l’aquaculture dans les pays sans littoral.

Déjà à la fin de la rencontre, nous avons eu à échanger avec les responsables des ressources halieutiques du NEPAD. Ils nous ont notifié qu’ils viendront ici au Burkina Faso en vue de discuter avec les autorités pour envisager la stratégie à mettre en œuvre dans notre pays dans la mesure où les besoins des pays ne sont pas identiques. Nous attendons donc impatiemment cette mission du NEPAD.

Interview réalisée par Alban KINI et Simplice HIEN

Sidwaya

PARTAGER :                              

Vos commentaires

  • Le 1er octobre 2010 à 09:51, par TITI En réponse à : Kadidiatou Joséphine Kaboré, directrice générale des ressources halieutiques : « La question de la qualité du poisson importé est très complexe »

    En fait il n’ya pas grand chose qui est fait pour contrôler l’utilisation de filets non conformes par les pêcheurs. Comment lutter contre l’amenuisement de la ressource alors ? Il me semble que la direction ne fait que de la sensibilisation. Est-ce tout son rôle ??? S’agissant de la qualité du poisson, même si la tâche est dévolue à d’autres structures, cette direction devrait veuillez au grain et s’assurer que le contrôle est effectif, si ce contrôle n’est pas efficient, la dite direction devrait tirer la sonnette d’alarme et informer les consommateurs. Sans cela, nous pourrions faire l’économie d’une telle direction.

    Merci,

 LeFaso TV
 Articles de la même rubrique
Burkina : Une économie en hausse en février 2024 (Rapport)