LeFaso.net, l'actualité Burkinabé sur le net
Proverbe du Jour : “Vous n’empêcherez pas les oiseaux de malheur de survoler votre têtе, mаis vοus рοuvеz lеs еmрêсhеz dе niсhеr dаns vοs сhеvеux.” Proverbe chinois

« Le nomadisme politique a toujours été au profit du pouvoir »

Publié le jeudi 1er juillet 2010 à 00h35min

PARTAGER :                          

Son inscription au Tableau de l’Ordre des avocats, la déchéance du titre du député Louis Armand Ouali par le Conseil constitutionnel, les préparatifs de l’élection présidentielle du 21 novembre 2010… Telles sont les questions abordées dans l’interview que le chef de file de l’opposition, par ailleurs président de l’Union pour la renaissance-Parti sankariste (Unir-PS), Me Bénéwendé Stanislas Sankara, a bien voulu accorder à Fasozine.com.

Fasozine.com : Le député Louis Armand Ouali vient d’être déchu de son titre de député par le Conseil constitutionnel, après qu’il ait démissionné volontairement du Rassemblement des démocrates du Burkina (RDB). Une première au Burkina Faso. Pensez-vous que le droit a étédit ?

Me Sankara : Depuis le début de la Ive République, la question du retournement de veste a toujours été en faveur du pouvoir. Les élus de l’opposition étaient de plus en plus nombreux à rejoindre le parti au pouvoir, avec armes et bagages. Il fallait donc y mettre fin. Et pour y parvenir, il fallait modifier la Constitution. Les députés, toutes tendances confondues, se sont accordés là-dessus. Le cas de Louis Armand Ouali s’apprécie sous l’emprise de cette loi. Pour moi qui suis juriste, il m’est extrêmement important de dire que dans une loi, il y a l’esprit et la lettre.

J’assimile l’esprit de la loi à la volonté politique du législateur de mettre un terme au nomadisme politique dans notre pays. Je suis fondamentalement d’accord avec cette loi, parce que je souffrirais de voir un élu de l’Unir-PS se retrouver dans un autre parti politique, après son élection.
Mais il y a aussi la lettre. Dès que la loi est votée et promulguée, elle est d’application, à moins qu’elle ne prévoie une phase transitoire. Cette précision n’a pas été faite. D’où cette double interprétation : ceux qui pensent qu’elle est d’application immédiate, et ceux qui pensent qu’elle n’est d’application qu’en fonction de la durée du mandat. Je ne vais pas entrer dans cette polémique. Pour me résumer, je dis que l’esprit de la loi est clair, la lettre de la loi est à polémique, faisant du deux poids deux mesures.

Le cas Ouali est-il différent de la requête que vous avez introduite contre la candidature de Blaise Compaoré en 2005 ?

Le Burkina Faso a des institutions où les premiers responsables sont des hommes de service. Donc qui ne servent pas la démocratie. Quand il s’est agi de la question de la candidature de Blaise Compaoré, qui avait fini ses deux mandats en 2005, c’est le même Conseil constitutionnel qui avait dit que la loi n’était pas rétroactive.

Et que les modifications de la Constitution, intervenues suite aux recommandations du Collège de sages, ne pouvaient pas s’appliquer à Blaise Compaoré, parce qu’il est Burkinabè comme tout les autres Burkinabè. Est-ce à dire aujourd’hui que Louis
Armand Ouali, au nom du principe de l’égalité des citoyens devant la loi, n’est pas aussi Burkinabè comme Blaise Compaoré ? Ce qui me fait dire qu’entre deux Burkinabè, il y a deux jurisprudences. Au Burkina, on dit le droit en faveur de quelqu’un. Ainsi, le Conseil constitutionnel, fort de l’article 159 de la Constitution, qui dit que sa décision est irrévocable, s’arroge tous les privilèges. Cela ne pouvait être autrement, puisque le président de cette institution est nommé par le président du Faso, Blaise Compaoré.

Cette loi devrait-elle également frapper certains élus au sein de l’Unir-PS ?

A l’Unir-PS, nous avons senti venir les choses. Nous avons convoqué par anticipation, en mars, une assemblée générale pour régler la situation de tous les élus qui pouvait prêter à confusion avant la
promulgation de loi.

L’assemblée générale de la Cour d’appel vient d’ordonner votre inscription au Tableau de l’Ordre, après une longue bataille politique et juridique. Un commentaire ?

C’est en 2002 que des avocats ont été élus députés pour la première fois au Burkina Faso. Il s’agit de Me Noël Gilbert Ouédraogo et moi. Nous nous sommes rendu compte que le code électoral avait érigé une incompatibilité entre la profession d’avocat et celui du parlementaire.

Alors que la loi 16/2000, qui régit la profession d’avocat, n’a pas prévu une telle incompatibilité. Ce qui est curieux, c’est que ce sont les mêmes députés qui ont voté, en moins d’une année, deux lois contradictoires. Nous avons introduit une proposition de loi. Elle est restée sans suite.
Il a fallu les réformes de 2009, pour que nous puissions attirer à nouveau l’attention de l’Assemblée nationale sur cette absurdité. Nous avons, pour ce faire, eu le soutien de jeunes avocats, à travers leur structure. Ils ont fait des déclarations et des démarches auprès de certaines autorités, comme les anciens bâtonniers et le président de l’Assemblée nationale, pour demander à notre auguste assemblée de faire justice aux avocats. Ce qui fut fait, mais assortie de conditionnalités.

Un avocat élu député ne doit pas traiter des affaires mettant en cause l’Etat. Pareil pour les élus locaux, qui ne doivent pas prendre des dossiers contre leur circonscription électorale. Ce qui est normale et conforme à la déontologie de l’avocat.
Dès la promulgation de cette loi, j’ai naturellement voulu en profiter. J’ai écrit au bâtonnier de l’Ordre des avocats d’alors, Me Antoinette Ouédraogo, pour lui demander d’appliquer la loi. Ma requête est restée sans suite, jusqu’à ce que Me Issouf Joseph Baddhio soit portée à la tête de l’Ordre, comme nouveau bâtonnier. Ce dernier a même désigné d’autorité une consœur pour venir diriger mon cabinet. Comme c’était d’autorité, je l’ai acceptée, surtout que cela ne me gênait pas, même si c’est inadmissible du point de vue de notre profession, qui est libérale.

Vous avez donc fait recours à la l’assemblée générale de la Cour d’appel ?

Après plusieurs requêtes sans suite, J’ai donc fait recours à l’assemblée générale de la Cour d’Appel. J’ai bénéficié de la compassion, de la solidarité et de la confraternité agissante des confrères et des consœurs, qui se sont massivement constitués pour me défendre, le 21 juin dernier. Je n’oublierai jamais cette journée car, au prétoire, il y avait plus d’une vingtaine d’avocats pour plaider en faveur de Me Sankara. Et le droit a été dit. La Cour d’appel a ordonné mon inscription au barreau.

Depuis trois mois, l’Unir-PS procède à l’installation de ses commissaires politiques de compagne. Le train est-il déjà en marche pour l’élection présidentielle du 21 novembre 2010 ?

On a installé nos commissaires politiques de campagne dans 12 régions. Il reste la région du Nord. Nos militants de cette région ont souhaité que l’installation du commissaire coïncide avec l’inauguration du siège du parti à Ouahigouya. Et cela sera fait le 3 juillet 2010. Le plénum du bureau politique national est prévu pour le 10 juillet 2010 à Ouagadougou. Nous allons faire le point de l’implantation du parti et de la mobilisation, car on ne peut pas avoir un parti fort si, à la
base, il n’y a pas des structures qui résistent et secrètent des militants capables de défendre l’idéal sankariste.

Joël Zoundi

Fasozine

PARTAGER :                              

Vos commentaires

  • Le 1er juillet 2010 à 10:48, par DEMBELE En réponse à : « Le nomadisme politique a toujours été au profit du pouvoir »

    En tan que juriste Me Sankara manque de piquant.C’est dommage que Maître Sankara ne soit pas si courageux pour dénoncer que ce qui arrive à Ouali est inadmissible.Il nous apprend qu’il a organisé avec soin le nomadisme de Bassière. Je pense qu’il a oublié de régler un détail : Un de ses député risque fort de perdre son mandat !Tout le monde n’est pas en règle dans ses rangs et il ne perd rien pour attendre.Le cas cas Ouali n’arrive pas qu’aux autres !

  • Le 1er juillet 2010 à 11:03, par phoenix En réponse à : « Le nomadisme politique a toujours été au profit du pouvoir »

    Maître SANKARA devrait avoir honte de poser à côté de la photo de Thomas sankara !C’est pour renforcer son fonds de commerce ou se donner bonne conscience ?Il oublie qu’il a proposé une loi qui interdit désormais l’utilisation de effigie de Tom.Du coup il travaille à effacer son image de la mémoire des Burkinabe.Qu’il arrête de nous distraire et de s’amuser avec la mémoire de Thomas !

  • Le 1er juillet 2010 à 22:52, par elias En réponse à : « Le nomadisme politique a toujours été au profit du pouvoir »

    bien dit mon pote ,a mon grand regret l’opposition burkinabe manque de mordant...tous des comediens !a propos de belwende,qu’il retourne a faire ce qu’il sait faire:AVOCAT. car la politique c’est pas son truc.et surtout ne salit pas la memoire de TOM de grace .merci

 LeFaso TV
 Articles de la même rubrique