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Energie solaire : Une électricité gratuite hors de portée

Publié le jeudi 10 juin 2010 à 00h17min

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A l’heure de la crise énergétique provoquée par le renchérissement du prix des produits pétroliers, il est de plus en plus question d’énergie renouvelable, dont l’énergie solaire. Le Burkina qui a l’un des meilleurs climats adaptés à ce type d’énergie a du mal à en profiter pleinement. Dossier sur ce paradoxe d’une énergie gratuite, difficile à dompter.

19,9% tel est le taux d’électrification du Burkina en 2009. En milieu rural, ce taux a été estimé à moins de 1% en 2005. Cette pauvreté énergétique, selon les spécialistes, risque de perdurer encore, du fait du coût élevé des produits pétroliers.

Le recours aux énergies renouvelables, notamment le rayonnement solaire semble être la voie appropriée pour changer la donne. Cependant jusqu’à présent, les populations burkinabè sont toujours dans l’attente de sa démocratisation. Les uns espérant se passer des factures exorbitantes et des délestages permanents de la Société nationale d’électricité (SONABEL) et les autres (populations rurales), pour enfin sortir des ténèbres.

Les équipements nécessaires à l’utilisation domestique du soleil sont hors de portée du citoyen lambda. Selon Diakalia Traoré, responsable de l’Energie du Faso, spécialisé dans l’installation d’équipement solaire, il faudrait débourser entre 650 000 F CFA à 700 000 F CFA pour avoir un équipement pouvant faire fonctionner une télévision couleur et 3 ampoules pendant seulement 5 heures par jour. Pour se procurer un frigo solaire, avec tout le kit complet, un client devra débourser environ 2,5 millions de F CFA.

Diakalia Traoré assure que beaucoup de burkinabè s’intéressent à l’énergie solaire, mais la principale cause du blocage quant à sa vulgarisation est le coût élevé des investissements de base. A ce sujet, il affirme que seule une volonté politique peut permette une démocratisation rapide de l’énergie solaire.

Cette volonté devrait se manifester en premier lieu par la réduction des taxes sur les équipements solaires. Dans cette même lancée, le Docteur Alhadi Wereme, directeur de l’Institut de Recherche en sciences appliquées et technologiques (IRSAT), soutient que même si beaucoup d’efforts ont été faits pour réduire les taxes (douanes + TVA) qui sont passés d’environ 56% à 23%, cela demeure encore insuffisant au regard de l’enjeu.

La Chine au secours

Ces derniers temps, en dehors des efforts qui ont été faits par le gouvernement pour réduire les taxes sur les équipements de base importés, on assiste à une tendance baissière desdits matériels avec l’arrivée des équipements chinois sur les marchés.

Leurs coûts restent certes, encore inaccessibles pour la majorité des populations, mais reviennent nettement moins chers que ceux venant d’Europe. Par exemple, une plaque solaire provenant de la Chine, coûte à capacité égale, la moitié du prix de celle venant d’Allemagne. Même si les équipements chinois n’ont pas encore fait leur preuve, contrairement aux matériels européens, ils participent à la vulgarisation de l’énergie solaire.

En attendant que dans quelques années, les techniciens puissent situer les clients sur leur fiabilité, les équipements s’achètent bien. Selon Issa Ouédraogo, vendeur dans une boutique chinoise, au marché central, la demande est de plus en plus forte actuellement. Les clients sont généralement ceux qui n’ont pas le choix, c’est-à-dire, les habitants des zones périphériques non éclairées de Ouagadougou et des milieux ruraux.

Et la recherche dans tout ça

Tout processus de vulgarisation, commence par le développement de la recherche. Dans le domaine de l’énergie solaire, ce n’est pas ce qui manque au Burkina.

Très tôt, il a été question de valorisation des ressources énergétiques locales. Cette mission a été confiée à l’Institut burkinabè d’énergie, devenu aujourd’hui l’IRSAT. Les premiers résultats ont été la conception de foyer pour économiser le bois, ainsi que les cuiseurs.

Aujourd’hui, la recherche a permis de mettre au point un certain nombre d’outils comme les séchoirs, les chauffe-eau solaires, les maisons de conservation d’oignons et des systèmes d’éclairage.

Selon le Dr Alhadi Wereme, il y a plus de 1500 séchoirs solaires installés au Burkina. Par ailleurs l’IRSAT, a contribué à l’installation de frigos solaires, et de système d’éclairage avec des lampes néon surtout en milieu rural. Toute chose qui a permis de combler certains besoins en matière de conservation des vaccins et des médicaments dans les dispensaires ruraux.

Malheureusement, beaucoup de ces technologies mises en œuvre par les chercheurs attendent toujours d’être valorisées. Le relais industriel pour mettre ces technologies à des prix abordables à la disposition des populations fait totalement défaut. Pourtant les chercheurs burkinabè remportent des prix aussi bien au niveau national qu’international pour leur créativité, à l’instar de Noël Traoré de Chabame Energies qui a remporté en 2008, le 2e prix au marché des Energies renouvelables au Sahel et en Afrique de l’Ouest , avec sa lampe solaire.

Le CILSS, montre la voie

Le mérite revient au Comité inter-état de lutte contre la sécheresse au Sahel (CILSS), d’avoir mis en œuvre, le plus grand programme photovoltaïque en Afrique Subsaharienne, à savoir le Programme régional solaire (PRS). Exécuté de 1990 à 1999, le PRS a permis un début de vulgarisation des technologies solaires, dans les villages reculés.

Au Burkina, près de 9 milliards de F CFA, ont été injectés dans ce programme. Au titre du PRS-I, 81 localités ont été équipées de systèmes d’approvisionnement en eau potable (pompes solaires) et 287 en systèmes communautaires (kits d’éclairage et froid). C’est surtout au niveau de l’approvisionnement en eau potable des populations rurales, que le PRS a engrangé plus de résultats.

Toutefois, cette action demeure encore une goutte d’eau dans la mer, car il n’a touché seulement que 1% des 67 000 villages des pays du CILSS (source CILSS) dont la population rurale est supérieure à 32 millions d’habitants. Le recours à une gamme de puissance élargie, adapté au village s’avère nécessaire.

Une lueur d’espoir

Les perspectives qui s’offrent aux énergies renouvelables sont prometteuses. Qu’on le veuille ou pas, elles s’avèrent incontournables de par leurs avantages. Par définition inépuisable, disponible localement et très peu polluantes, l’énergie solaire offre aujourd’hui des possibilités d’innovations technologiques décentralisées, tout en créant des emplois. L’émergence de structures privées comme Delta Energie, Sahel Energie solaire, CB/Energie, Energie solaire du Faso, etc, en est la preuve.

L’espoir c’est aussi, cette centrale solaire de 20MW annoncé par le gouvernement en février 2009, même si jusqu’aujourd’hui le projet est au stade d’étude de faisabilité et de recherche de financements. Enfin, la révolution pourrait venir de ces techniciens en énergie solaire, que forme l’Université de Ouagadougou. Capables d’installer et de faire la maintenance des systèmes solaires, thermiques ou voltaïques, ils peuvent dynamiser le secteur, en faisant preuve de plus de génie et de créativité.

Fatouma Sophie OUATTARA (sofifa2@yahoo.fr)

Sidwaya

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