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Yamba Harouna Ouibiga, directeur général de l’ONEA : « Nous allons investir près de 164 milliards de F CFA d’ici à 2015 »

Publié le mardi 16 mars 2010 à 01h42min

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Yamba Harouna Ouibiga, DG de l’ONEA

L’Office national de l’eau et de l’assainissement est sans doute l’un des acteurs majeurs de la gestion de l’eau au Burkina Faso. Son directeur général, Yamba Harouna Ouibiga qui se confie à Sidwaya, pense que la problématique de la mobilisation et de l’optimisation des ressources en eau doit interpeller les parties prenantes à partager leurs préoccupations avec les autres usagers.

Sidwaya : « Mobilisation et optimisation des ressources en eau pour un développement durable ». Tel a été le thème central de la XIVe édition de la Journée nationale du paysan. En tant qu’acteur majeur de l’eau, quel commentaire vous inspire une telle problématique ?

Yamba Harouna Ouibiga : Le thème de la JNP a mobilisé l’ensemble des parties prenantes de la gestion intégrée des ressources en eau en vue de comprendre la problématique relative à la gestion durable et pérenne de l’eau en lien avec son rôle dans la croissance économique et le bien-être des populations.

Nous nous réjouissons de ce choix dans la mesure où la pluviométrie est un facteur important pour le monde paysan. Il en résulte qu’une bonne production est tributaire d’une mobilisation conséquente et d’une bonne gestion de l’eau. Le Burkina a mis la gestion intégrée des ressources en eau au centre de ses préoccupations majeures afin qu’elle soit utilisée de façon parcimonieuse par tous les usagers.

En quoi, le projet Ziga qui a permis de couvrir les besoins en eau des citadins de la capitale, peut être considéré comme un exemple de réussite de la gestion durable de l’eau ?

Ce projet a été conduit dans le cadre de la GIRE. Nous avons veillé, depuis la construction du barrage, au respect de toute la réglementation parce que nous sommes dans le bassin du Nakanbé, l’un des plus grands bassins du pays. Nous gérons les ressources en eau par bassins versants. Nous avons donc été amenés, dans les choix techniques, à bâtir sur le Nakanbé un ouvrage hydraulique qui mobilise près de 200 millions de m3 d’eau.

Premièrement, il s’est agi, étant donné que c’est un cours d’eau international, de nous accorder avec les parties prenantes des autres pays concernés.

Deuxièmement, la construction de ce barrage a conduit à une meilleure gestion de l’eau mobilisée en tenant compte des populations riveraines. La prise en compte de ces aspects a induit la construction d’autres ouvrages de manière à permettre, au-delà de l’approvisionnement en eau de la ville de Ouagadougou, le développement d’activités diverses telles la pêche, l’agriculture.

Troisièmement, la mise en œuvre du Programme gouvernemental d’atténuation des impacts environnementaux (PGAIE) devait permettre de réduire les impacts négatifs du Projet sur l’environnement, en particulier la gestion pérenne des ressources en eau mobilisées. Toutes les parties prenantes ont été impliquées à travers un dialogue permanent. Nous avons travaillé à améliorer les revenus de ceux qui étaient touchés par les impacts du projet, d’autant plus qu’il y a eu des déplacements involontaires de populations.

Quatrièmement enfin, il a permis d’assurer la continuité du service de l’eau potable qui était discontinue pendant près d’une dizaine d’années et d’améliorer l’accès à l’eau potable au plus grand nombre par la réalisation de plus de 50 000 branchements sociaux à 50 000 et 30 500 FCFA et de 400 bornes-fontaines.

De plus, tous les villages riverains, y compris la ville de Ziniaré, sont desservis par le barrage. Pour toutes les raisons sus-citées, je peux affirmer que le projet Ziga est une réussite en matière de gestion intégrée des ressources en eau ainsi que pour l’approvisionnement en eau potable de Ouagadougou.

Par ailleurs, ce projet a suscité de longs débats sur la réforme du secteur de l’eau en milieu urbain qui a permis de construire un modèle de service de l’eau adapté au contexte national et qui fait office de référence auprès de nos partenaires avec lesquels nous entretenons un dialogue très fructueux. Cette dynamique a ainsi permis de mobiliser aisément les ressources financières du volet urbain du Programme national d’approvisionnement en eau potable et d’assainissement (PN-AEPA).

Avec l’explosion démographique galopante et l’extension démesurée et incontrôlée de la capitale, comment l’ONEA compte s’adapter à cette situation pour que l’eau potable atteigne le résident de la zone non-lotie la plus reculée ?

Nous n’avons réalisé, pour le moment, que la première phase du projet Ziga. Un schéma dynamique a été construit pour accroître la production d’eau en vue de satisfaire la demande sans cesse croissante du fait d’une démographie galopante.

Aujourd’hui, nous travaillons sur la phase intérimaire du projet Ziga avec l’appui des partenaires techniques et financiers. Nous sommes à l’étape de passation des marchés pour l’augmentation de la capacité de production, de stockage et l’extension des réseaux tertiaires et des branchements à Ouagadougou. Dans notre approche de développement de l’accès, nous tenons compte de la périphérie des villes, très densément peuplée.

L’ONEA ne peut pas être indifférent aux besoins des résidents des zones non-loties. C’est pourquoi nous avons mis en place les technologies les plus appropriées pour amener l’eau dans ces zones. Ces nouvelles technologies sont conçues pour s’adapter aux futurs aménagements que les communes pourraient être amenées à faire sur le terrain.

Quels sont les grands projets et chantiers en matière d’approvisionnement en eau et d’assainissement dans les centres urbains ?

Conformément au PN-AEPA, nous avons des chantiers importants sur l’eau potable et l’assainissement. Notre défi est de faire progresser le taux d’accès à l’eau potable de 74 à 87 % et de 19 à 54 % pour l’assainissement dans la perspective de l’atteinte des Objectifs du millénaire pour le développement à l’horizon 2015.

Ceci se décline en de gros chantiers pour la création de nouveaux systèmes d’adduction dans 14 communes, l’augmentation des capacités de production, l’extension du réseau, la réalisation des branchements sociaux, la construction des bornes-fontaines et la mise en œuvre des Plans stratégiques d’assainissement dans tous nos centres ONEA.

La grande nouvelle c’est que nous avons déjà mobilisé des financements permettant de généraliser les branchements sociaux à 30 500 FCFA pour toutes les communes urbaines. Ce programme, qui va démarrer cette année 2010, est prévu pour s’étendre sur plusieurs années. Ce n’est donc pas une action ponctuelle et limitée qui sera engagée mais une opération de longue haleine pour améliorer encore plus l’accès à l’eau potable. Grosso modo, nous allons investir près de 164 milliards dans ces divers chantiers d’ici à 2015.

Quel rôle peuvent jouer les opérateurs privés dans la gestion des petits réseaux de distribution d’eau ?

Les opérateurs privés complètent l’action de l’ONEA en permettant t’étendre notre réseau jusque dans les zones les plus reculées. Leur apport se situe à un double palier. Primo, il y a les petits contractants qui gèrent les bornes-fontaines. Leur rôle est de distribuer l’eau à ceux qui n’ont pas les moyens de s’offrir un branchement particulier.

Secundo, dans la périphérie, nous nouons des contrats avec des opérateurs privés avec la perspective que cette expérience soit vulgarisée dans les autres villes. Nous faisons en sorte qu’il y ait une continuité du service de l’eau potable dans les zones périphériques sans même attendre un lotissement préalable. Le privé joue donc un rôle prépondérant en étant le second bras par lequel l’ONEA déploie son réseau dans les habitats spontanés.

Quelles sont les tendances de votre chiffre d’affaires ? Est-il en hausse ?

Les tendances sont très bonnes. Nous sommes en pleine croissance. Conformément à notre Plan stratégique, le chiffre d’affaires enregistre une hausse moyenne de 8 %. Cette progression est essentiellement liée au développement de l’accès. Notre objectif de croissance du chiffre d’affaires en 2010 est de l’ordre de 7 %.

Comment est-il possible d’assurer une bonne gestion de l’eau dans ce contexte d’incertitudes et de variabilités climatiques ?

Le Burkina et le Sahel en général subissent depuis longtemps le phénomène des changements climatiques. Pour cela, notre politique sectorielle prône la mobilisation de la ressource eau par la construction de plus de retenues d’eau et la bonne organisation de sa gestion. Cette approche permet d’anticiper les conséquences des changements climatiques et de mieux gérer les pénuries.

Mais, il semble qu’il y aura de plus en plus de réfugiés climatiques et de conflits dus à l’eau...

(Rires !) Là, vous parlez à l’échelle mondiale. Rapporté dans sa globalité, l’"or bleu" constitue un élément de conflit à l’image du pétrole. Avec la pollution et le phénomène d’envasement, on assiste à une diminution de la quantité d’eau douce ; ce qui induit forcément la compétition autour du contrôle de cette ressource. En ce qui nous concerne plus particulièrement, notre préoccupation majeure reste la lutte contre les phénomènes d’envasement de nos cours d’eau et retenues.

Interview réalisée par Nadoun COULIBALY

Sidwaya

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