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Proverbe du Jour : “Nous sommes lents à croire ce qui fait mаl à сrοirе. ” Ovide

QUESTIONS A MONSIEUR EMILE KABORE

Publié le lundi 15 février 2010 à 00h43min

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Les ex-refondateurs du CDP, comme on les appelait, ont enfin leur récépissé. Le bruit courait ; nous avons voulu vérifier. Et pour en savoir plus, nous avons joint Mr René Emile Kaboré qui a bien voulu se plier à nos questions. L’homme est toujours constant dans ses convictions, comme vous le verrez. Lisez plutôt : ça vaut vraiment le détour.

1) Bonjour Monsieur le Ministre. Où en sont les refondateurs du CDP avec leur récépissé ?

Mr René Emile KABORE (R.E.K.) : Je pense que vous pouvez maintenant nous appeler les militants de la Convention nationale pour le progrès du Burkina (CNPB), car nous avons enfin notre récépissé. L’administration a traîné les pieds pour des raisons que nous ignorons. Mais en fin de compte, elle a fini par s’exécuter.

Voyez-vous même : Nous avons introduit notre dossier le 3 Octobre 2009. Selon la loi, nous étions en droit d’attendre notre récépissé dans les 60 jours, soit le 02 décembre 2009 au plus tard.

Malgré nos multiples va-et-vient et bien que l’on nous ait assuré qu’il n’y avait aucun problème à notre dossier, ce n’est que le 28 janvier 2010, après que nous ayons demandé une audience au ministre de l’Administration Territoriale que nous avons été contactés en la personne du Président de la CNPB pour venir chercher le précieux document. Ce que nous avons fait le 29 janvier 2010. Et à notre grand étonnement, le récépissé portait la date du 31 décembre 2009 et le cachet n’a été apposé que sur place. Alors pourquoi ne nous l’a-t-on pas remis plus tôt si vraiment il avait été signé le 31 décembre 2009 ?

De toutes les façons, la loi nous installait dans nos droits depuis le 02 décembre 2009 sans toutefois préciser comment nous pourrions en jouir.

De ce fait par exemple, nous n’avons pas pu participer aux démembrements de la CENI, puisque partout on nous demandait le fameux récépissé. C’est là un préjudice énorme par rapport auquel bien évidemment nous aviserons !

2) Dans l’opinion, on dit que votre cœur balance entre une position genre ADF/RDA et une position franchement de l’opposition. Qu’en est-il exactement ?

R.E.K. : Je pense sérieusement que le temps n’est plus à la spéculation. Vous aurez tout le loisir de nous apprécier à nos actes.

3) La Refondation, ça compte encore pour vous ?

R.E.K : Ecoutez, la Refondation, ce n’est ni un effet de style ni un fait de mode. Elle est la traduction d’une pensée résultant d’une analyse profonde de la vie du CDP en particulier pour ce qui nous concernait, et de l’ensemble de la vie nationale pour ce qui concernait les Refondateurs nationaux.

La Refondation ne doit donc pas être prise à la légère. Nous sommes rendus à un carrefour décisionnel, et plutôt que de se perdre en conjectures, tout le monde ferait mieux de se plonger dans une réflexion profonde pour que le moment venu, et cela me parait inéluctable, nous puissions doter notre pays d’un corpus qui n’ait nul besoin d’être revisité à tout bout de champ, pour un oui ou pour un non, mais au contraire, qui serve les intérêts profonds de notre pays et de son peuple tout entier.

La constitution américaine a plus de deux cents ans.

Personne ne pense à la revisiter, parce que les « Peres Fondateurs », dont Georges Washington, l’ont créée pour servir réellement les intérêts et les aspirations les plus profondes de l’Amérique et des Américains.

Et cela suffit ainsi .Plus de deux cents ans après, nul besoin ne s’est fait de le modifier pour permettre par exemple l’élection d’un Noir à la Présidence des Etats-Unis !

4) Que dites-vous de l’appel aux réformes lancé par le Chef de l’Etat ?

R.E.K : Je suis convaincu pour ma part, que nous avons là, la réponse du Président du Faso à la requête des Refondateurs.

La refondation viendra selon la méthode et le style du Président. Nous avons toujours soutenu qu’il devrait en être ainsi, l’essentiel étant que nous puissions tous nous asseoir ENSEMBLE pour débattre des problèmes de NOTRE PAYS et de NOUS-MEMES.

5) Le CDP, au cours de la célébration de son 14ème anniversaire, a eu ces propos à votre endroit : « Fameux refondateurs qui ont pris une position aventuriste au mépris des principes du parti ». Qu’en dites-vous ?

R.E.K. : Si le mot « fameux » a une connotation péjorative pour ceux qui l’ont employé, ils ont bien tort ! Si nous sommes fameux, c’est par la clairvoyance et le courage que nous avons eus. Nous nous connaissons assez pour savoir qu’eux, en sont malheureusement bien incapables.

Quant à notre position, si elle leur paraît aventureuse, c’est pour la raison que j’ai évoquée tantôt. Ils n’ont pas le monopole du présent et encore moins du futur. L’avenir nous départagera.

Pour le reste, et sans vouloir revenir sur le débat, il suffit simplement de rappeler que nous avons été jugés et condamnés par la direction du CDP sans avoir jamais été entendus, sans aucune preuve avérée du chef d’accusation, à une sanction fixée sans délais, etc… etc… toutes choses contraires aux textes et principes auxquels ils font référence et qu’il vous est loisible de consulter vous-même pour votre propre gouverne et pour l’éclairage de vos lecteurs.

Vous savez bien que quand on détient le pouvoir, la tentation de l’usage de la Force est plus grande que celle de l’usage du Droit. Et ça ce n’est pas nouveau.

6) Avez-vous des initiatives ou des propositions particulières par rapport à la célébration du cinquantième anniversaire de nos indépendances ?

R.E.K : Pour cette fête du cinquantenaire, je regrette la faible place qui semble faite à notre VRAIE Histoire. Trois exemples :

Premièrement, le Burkina Faso, quoiqu’on puisse dire, commence avec la Haute-Volta, et quoiqu’on puisse dire et quelle qu’ait pu être l’opinion de certains, le PERE de l’INDEPENDANCE est et restera toujours le Président Maurice YAMEOGO. C’est un fait.

Deuxièmement, le 04 septembre 1932, le territoire de la Haute-Volta a été supprimé, « assassiné » et sa dépouille partagée entre la Côte d’Ivoire, le Soudan Français et le Niger. Les manuels d’histoire, dans les années soixante, enseignaient que c’est sous la houlette, d’un certain Henri GUISSOU, agissant en sa qualité de Député à l’Assemblée Nationale Française, et particulièrement comme représentant de la volonté du peuple Voltaïque incarnée par la Chefferie Coutumière avec le MORO NAABA en première ligne, que le territoire sera reconstitué le 4 septembre 1947.

Et si la Haute Volta n’avait pas été reconstituée, il n’y aurait pas aujourd’hui un Burkina Faso sur la carte du monde.

Troisièmement, regardez la place prépondérante occupée par l’Eglise catholique dans un domaine aussi fondamental que celui de l’éducation nationale, dans le Territoire de la Haute-Volta et ce jusqu’après son indépendance : enseignement, éducation des jeunes filles, lutte contre le mariage forcé, formation professionnelle, etc… Monseigneur J. Thévenoud, le fondateur et animateur intrépide de cette Eglise-là ne mérite –t-il pas de la reconnaissance nationale, une meilleure place dans notre Histoire ?

Ces trois exemples illustrent, même sans entrer dans les détails, des faits avérés de notre Vraie Histoire, que malheureusement certains ont presque réussi à travestir.

Pour s’en convaincre, il suffit de voir les rues obscures qui ont été désignées pour porter les noms de ces illustrissimes personnages, alors même que de façon tonitruante, on donne le nom de personnages étrangers, sans emprise réelle avec notre Vraie Histoire, ou celui de nationaux contemporains qui pour la plus part, n’ont pas fini d’écrire seulement leur propre et petite histoire. Voyez vous-même, l’Avenue Thévenou est un bout de chemin qui n’atteint même pas trois cents mètres…et en quoi dans notre VRAIE HISTOIRE, Kwame N’Nkrumah que j’admire pour ses idées panafricanistes est-il plus important que Maurice Yaméogo ?

Alors, si l’on veut célébrer sérieusement le cinquantenaire de notre pays, il est impératif de réviser son Histoire pour faire ressortir sa Vraie Histoire qui seule mérite d’être léguée aux générations présentes en mal de repères et à celles futures dont on imagine aisément ce que sera le désarroi.

7) Serez-vous sur la ligne de départ des élections présidentielles de 2010 ?

R.E.K : Pour l’heure, notre principale préoccupation consiste en notre implantation dans le pays et dans le paysage politique.

Comme vous le savez, une élection présidentielle n’est pas un jeu d’enfant et il faut une bonne préparation. Nous n’avons même pas un mois d’existence légale en tant que parti politique et nous avons besoin d’un peu de temps. Alors, un peu de patience.

8) Depuis le Sommet de Copenhague, on parle de changements climatiques, de nouveaux modes de consommation, de production et même de gestion de nos Etats. Estimez-vous que c’est un luxe pour nous ou sommes-nous concernés ? Si oui pourquoi ?

R.E.K : Le sommet de Copenhague n’a pas été un succès, même s’il semble avoir permis l’adoption d’une plateforme minimaliste.

Voilà encore un exemple des conséquences d’une absence de solidarité. « Les goinfres » de la finance internationale ayant provoqué le crash économique mondial dans lequel nous pataugeons toujours, c’est au tour de certaines grandes puissances de menacer l’équilibre de toute la planète par leurs égoïsmes sans nom. C’est bien dommage, mais nous ne devrons pas céder à la tentation de faire comme eux. Nous sommes dans un monde où tout est interdépendant.

Rien n’a une existence intrinsèque. Chacun de nos actes sur l’environnement a un impact sur le monde entier. Réfléchissons-y.

9) Parlons de nos multiples facilitations à l’extérieur. Doit-on selon vous en augmenter le rythme, les maintenir, les diminuer ou en finir avec elles ? Pour quelles raisons ?

R.E.K. : Vous savez, le rythme des facilitations, non plus que leur nombre, ne dépendent stricto sensu du Burkina Faso, pour la bonne et simple raison que ce n’est pas notre pays qui crée les conflits, et c’est bien dommage qu’il en existe autant.

Partant, si le Burkina Faso, à travers son Président, trouve les moyens de les apaiser, où se trouve le mal ? C’est bon pour tout le monde et pour ma part, je ne vois aucune raison de condamner un artisan de Paix.

10) Que penser de l’instauration de la Taxe de développement communal ?

R.E.K : Il convient de parler de réinstauration, car comme vous le savez, ces taxes existaient depuis bien longtemps.
Puis sous la révolution, il a été décidé de les supprimer et de les remplacer, au même titre que la taxe de capitation, par une taxe sur l’usage des routes bitumées appelées péage et surtout par une taxe sur les produits pétroliers directement indexée sur les prix des hydrocarbures. Alors, revenir aujourd’hui pour recréer la vignette, c’est :

- Politiquement dangereux

- Economiquement injuste

- Socialement révoltant

C’est politiquement dangereux : Il n’a jamais été donné de voir un parti au pouvoir créer de nouvelles taxes dans l’année électorale qui voit le président solliciter un nouveau suffrage. C’est du reste un argument que j’ai développé en 2004 alors que j’étais encore député CDP, pour faire échec au projet de loi qui était tombé comme un cheveu dans la soupe à la fin de notre session budgétaire, sans beaucoup de respect pour la procédure. J’avais pris l’exemple de Bill CLINTON perdant les élections pour un second mandat de gouverneur de l’Arkansas pour avoir simplement osé une augmentation de la taxe sur les vignettes automobiles.
Mais, c’est çà aussi le CDP…

C’est économiquement injuste : outre le fait que l’on s’obstine à ne pas révéler le montant perçu au titre de la taxe sur les produits pétroliers (qui a crû de façon exponentielle avec la crise pétrolière) et l’usage qui en est fait, on ne sait rien du coût réel de cette décentralisation intégrale qui n’était pas prévue dans cette forme (La commune rurale était prévue pour se limiter au chef lieu de chaque département) et ce que représente cette nouvelle vignette bricolée à la demande du président de l’association des maires du Burkina. Il y a là comme une multiple taxation.

C’est socialement révoltant : C’est comme si ceux qui ont voté cette loi étaient devenus amnésiques des évènements contre la vie chère (février 2008) ou s’ils voulaient se faire sourds au cri de détresse d’une frange majoritaire et grandissante de la population burkinabé, ballottée çà et là par une misère sourde et lourde que propage avec obstination une pauvreté de plus en plus avilissante que même le gouvernement n’a pas réussi à faire reculer d’un pouce.

Pour toutes ces raisons, je pense comme en 2004, que cette taxe est inopportune parce que mal ficelée et ne prenant pas en compte la réalité du contexte actuel.

Elle réussira au mieux à mettre encore une fois à mal l’autorité de l’Etat, car le risque est très grand de le voir encore une fois, et j’en ai bien peur, reculer.

Entretien réalisé par Swonty Koné

San Finna

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Vos commentaires

  • Le 15 février 2010 à 12:36, par Machiavel En réponse à : QUESTIONS A MONSIEUR EMILE KABORE

    J’avoue que je ne connaissais pas bien cet homme en dehors du fait qu’il était fan de Blaise Compaoré et ensuite qu’il a été éjecté du manger CDP. A la lecture de l’interview, on ne découvre mieux. Il a le courage de dénoncer le clan et ses méthodes omerta (loi du silence, pensée unique) à laquelle il a appartenu hier. Il est également celui qui se plain d’avoir attendu un mois (de retard) pour récupérer un document administratif de reconnaissance. Nous autre burkinabè attendons nos actes de naissance pendant un an et si tu ne donne pas l’argent, tu ne l’as pas.
    Bon, pour en revenir à la refondation, disons que vous êtes victime de votre histoire monsieur Kaboré. Comme Salif Diallo, vous avez été à la soupe et le peuple a du mal à vous croire surtout que vous apparaissez comme un repenti. « Le nom de la hyène est gâté » et personne ne va vous croire même si vous dénoncez, comme tout le monde, les méthodes de vos compagnons d’hier. En plus, vous avez des alliers gênants qui ont été trempés dans beaucoup d’histoires.
    Là où vous marquez un point, c’est de rappeler à vos anciens camarades qu’ils n’en n’ont pas beaucoup dans la cafetière. En effet, on a cessé de rappeler que ces nouvelles taxes sont une double imposition (existent déjà sur les produits que vous avez cité) et ceux qui ont bouffé ces taxes et autres taxes de paillage doivent nous rendre nos sous. Le peuple ne peut pas oublier et même après leur mort, on va réclamer. J’allais oublier, vous rappelez également que les textes doivent être faites pour l’histoire et non pour les royautés d’aujourd’hui. Cela s’adresse à ceux qui aiment leur peuple et vous devez savoir qu’il n’y en a pas beaucoup chez vos anciens camarades.

    • Le 15 février 2010 à 17:21 En réponse à : QUESTIONS A MONSIEUR EMILE KABORE

      Et si je me mettais à rêver d’un échec de Blaise aux élections de novembre. Si tout le monde est contre lui et le CDP, il suffit de voter pour une autre personne. Est ce si compliqué de ne pas continuer à voter pour Blaise si sa politique est mauvaise ?

  • Le 15 février 2010 à 21:19 En réponse à : QUESTIONS A MONSIEUR EMILE KABORE

    Vouloir comparer Nkruma a Maurice Yameogo ? REK est vraiment l’ homme des passions. C’est connu. Une passion mene a une autre mais la passion quelle qu’ elle soit mene toujours a l’ aveuglement. Le passionne de Blaise devenu peut- etre aujourd’ hui le passionne anti- Blaise, puisqu’ il ne connait que la passion, revenez sur terre et osez accepter que le Burkina doit aussi honorer pleinement des fils vaillants de ce continent et du monde, meme s’ ils ne sont pas des voltaiques- Burkinabe. S’ ils sont une source d’ inspiration pour notre jeunesse en manque de reperes, et surtout pour notre vieillesse confuse comme la plupart de vous qui etes devnus des contre-exemples et qui faites les choix politiques les plus honteux, il n’ y a pas de quoi vouloir vivre dans cet autisme nationaliste ou meme tribaliste : Kolologho depend de Koudougou, c’est connu. Vouloir comparer Maurice Yameogo, un president qui a gaspile les ressources de son pays, qui a meme ete dechu de ses droits civils avec raison, a Nkruma : C’est pousser la passion trop loin.

  • Le 16 février 2010 à 10:56, par Le FAN En réponse à : QUESTIONS A MONSIEUR EMILE KABORE

    Qlq un peut me dire s’il existe bien un rue qui porte le nom de Maurice Yameogo à ouaga. Quan à REK, bon courage ! huum !!!

  • Le 19 février 2010 à 20:29, par Ahmad En réponse à : QUESTIONS A MONSIEUR EMILE KABORE

    j’ai du mal à prendre un tel personnage au serieux ! Dans le silllage du capitaine Blaise adoubé par une chefferie traditionnelle qui a regné sans merci et beaucoup d’injustice sur le peuple, voici monsieur Kaboré qui émerge dela médiorité cdepiste pour nousdonner une leçon de moral et d’ethique politique.Les habitants de Kokologho ont eu bien raison de se mefier de lui.Qu’il apporte d’abord un soupçon de changement dans son attitude, son rapport à la politique. Il y est pour améliorer notre Burkina ou pour requinquer une carrière d’homme d’affaire en perte de vitesse.La politique ce n’est pas d’abord du gros discours, mais une vraie capacité d’approche des populations et de considération des petites gens.Les Emile sont tout rouges parce qu’on a oté de leur bouche le bibéron ! Mais bon vent ! Dieu peut tirer le meilleur du pire !

  • Le 24 février 2010 à 23:06 En réponse à : QUESTIONS A MONSIEUR EMILE KABORE

    Ce n’est pas de la provocation. Dite moi pourquoi quand quelqu’ un n’est plus ministre au Burkina, 3 mois pares il devient blanc comme ca comme margouillat blesse qui s’est cahce dans son trou durant des semaines ? Ministre la c’est serviteur, vous dites ? Faites donc un serviteur. Comme ca meme si c’est mou coment comment, moi je me sers d’abord. Le reste si ca reste, on verra.

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