Des médias occidentaux rapportent que dans cette ville, les immigrés étaient régulièrement victimes de tirs de fusils de chasse, comme s’ils étaient des lapins. Leur réaction n’était donc qu’un acte de révolte, voir de légitime défense. Comme si le peuple de Rosano n’attendait que cela, il a organisé une battue pour chasser ces travailleurs saisonniers qui vivent souvent dans des dépotoirs et sont très mal payés. Ils ont peut-être choisi de gagner leur vie de cette façon, mais peut-on accepter le traitement que les habitants de Rosano leur ont fait subir jusqu’ici ? Assurément, non.

Il est de notoriété publique que la plupart des immigrés africains sont employés illégalement dans l’agriculture et le bâtiment en Italie. La question est de savoir ce que les autorités italiennes ont pris comme mesures pour prévenir ces troubles dont beaucoup d’indices indiquaient la survenue. Rien assurément, puisque le ministre de l’Intérieur en charge du dossier, veut tirer prétexte de ces incidents pour durcir la loi sur l’immigration clandestine. Il dénonce "la trop grande tolérance" à l’égard de cette immigration clandestine.

Ces propos, venant d’un membre de la ligue du Nord dont les tendances xénophobes et racistes sont bien connues, n’augurent rien de bon pour la suite des événements. Car il n’est pas exclu que la chasse aux immigrés fasse tache d’huile dans cette Italie qui ne peut cependant pas se passer de cette main-d’œuvre habile et bon marché à la solde de réseaux de fermiers. Ces fermiers qui profitent de cette main-d’œuvre, n’ont certainement pas le même point de vue que leur ministre de l’intérieur. Un sans-papiers demeure un homme avec un certain nombre de droits dont celui de ne pas se faire tirer dessus comme on tire sur un lapin à cause de son origine.

Vues d’Afrique, ces images difficiles et révoltantes devraient plutôt amener les candidats à l’immigration clandestine à réfléchir sur l’objectif de leur séjour clandestin en Europe et le prix qu’ils sont prêts à payer pour réaliser leur rêve. La régulation des flux migratoires est un débat à la mode actuellement entre Européens et Africains mais malheureusement, il ne semble s’adresser qu’aux franges intellectuelles des populations de nos pays qui, tout calcul bien fait, s’abstiennent de plus en plus de répondre aux sirènes de l’immigration choisie.

Le problème, c’est l’autre frange, celle des analphabètes, gentils, taillables et corvéables à merci, une fois sur le sol européen. Anges au début parce qu’exploitables à souhait, ils deviennent du jour au lendemain, des démons, sans-papiers et donc vulnérables. A qui la faute ? D’abord à nos gouvernants. Tous ces incidents sonnent comme des aveux d’échec de la gouvernance africaine. Toutefois, les pays d’acceuil européens, terres de droit s’il en est, devraient être un peu plus regardants sur la dignité humaine des immigrés.

Par Abdoulaye TAO

Le Pays