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PRODUCTION ANARCHIQUE DE CHARBON DE BOIS : Un désastre écologique dans la Sissili

Publié le lundi 7 décembre 2009 à 01h42min

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C’est un constat triste et amer que le directeur général des Eaux et Forêts (DGEF) et toute l’équipe qui l’accompagnait ont fait le 17 novembre 2009 dans une des localités de la province de la Sissili. Des espèces d’arbres, grandes ou petites, vieilles ou jeunes, sont détruites au quotidien. Les auteurs de ce désastre écologique ne sont pas des éléphants qui détruisent des arbres sur leur passage, encore moins une catastrophe naturelle ayant endommagé le massif forestier. Ce viol écologique est l’œuvre des hommes, notamment les producteurs de charbon de bois des villages de Nadion et de Longa au nom de la sacro-sainte recherche de quelques billets de banque.

Des habitants de ces deux localités, comme partout dans la région, ont fait de la production du charbon du bois leur source de revenus. Rien à dire si ce n’était que la carbonisation dans les règles de l’art. Ce qui pose problème, c’est que la règlementation en matière de production de charbon de bois est foulée aux pieds. Selon le directeur général des Eaux et Forêts, Adama Drabo, qui n’a pas hésité à qualifier la destruction de la forêt d’acte criminel, ce sont seulement les arbres morts, et dans une certaine mesure, le bois issu de l’aménagement du territoire qui peuvent être carbonisés. En plus, dit-il, c’est la technique de la meule casamançaise qui est préconisée. Malheureusement, l’appétit venant en mangeant, ’’ces pyromanes’’ hors pair, bien que sensibilisés sur ces questions, ont décidé néanmoins de produire leur charbon à base du bois frais. Leurs cibles : l’isoberlinia, le caïlcédrat, etc. Même les arbres fruitiers tels que le karité n’échappent pas aux machettes assassines. En un temps record, ce sont plusieurs hectares de forêts qui sont menacés. En cette matinée du 17 novembre 2009, lorsque nous arrivions à Nadion, village situé à quelques kilomètres de Léo sur l’axe Léo-Ouessa, des sacs de charbon de bois, superposés les uns sur les autres devant une concession retiennent notre attention.

Un jeune homme âgé d’une trentaine d’années arborait fièrement sous un hangar ses sacs de charbon de bois. Karim Nignan, c’est son nom, nous accueille avec un regard inquisiteur, malgré tout avec un sourire non dissimulé. Après quelques questions, l’agent des Eaux et Forêts fit le décompte des sacs. On en dénombre 101 à raison de 1 000 F CFA le sac selon ses vendeurs. Le jeune Nignan tente de nous convaincre que les producteurs de l’association Nemaro, dont il est lui-même membre, produisent leur charbon dans les règles de l’art (utilisation du bois mort, de la meule casamançaise). Mais lorsque nous avons demandé à un des leurs de nous accompagner en brousse pour constater de visu leur travail, un homme, la quarantaine bien sonnée, nous dit en substance : « Patientez, j’arrive ». cinq minutes, 10 minutes, voire 15 minutes, puis point d’homme pour nous y conduire. Le quadragénaire en question a pris la poudre d’escampette à l’insu de tous. Le jeune Karim, l’agent des Eaux et Forêts et le DGEF lui-même firent sa recherche en vain. C’est finalement Karim Nignan et un autre jeune, non sans hésitation, qui finissent par faire la route avec nous. Dès lors, après le lapin que nous a posé l’homme fugitif, nous ne doutions plus de ce que nous découvrirons.

Longa : autre village, même constat

A quelques trois kilomètres du village, nous découvrons un site de production traditionnel de charbon en plein air confirmant ainsi ce que nous redoutions le plus. Grands, jeunes arbres tout ou presque y passe pour être enfoui dans la terre pour la carbonisation. La suite du périple nous permet de constater qu’il y a plusieurs foyers artisanaux de carbonisation. Puis Longa. Autre village, même constat. Ce qui donne des frissons dans ce village, c’est le nombre élevé de sites. Sans entrer en profondeur de la forêt, on pouvait en dénombrer au moins une dizaine. Quelques kilomètres plus loin, c’est de la fumée qui attire notre attention. En avançant dans la forêt, l’on a pu constater que l’origine de ce feu n’est rien d’autre qu’un foyer de carbonisation de bois. Fort heureusement, le couvert végétal, encore vert, n’a pas permis au feu de se propager. A un jet de pierre de ce site, c’est la désolation que semblaient afficher tous les visages.

En effet, sur une superficie de près d’un hectare, des arbres sont abattus ; cette fois–ci non pas pour être carbonisés, mais dans l’unique souci de délimiter un nouveau champ. Le directeur général des Eaux et Forêts, le visage émacié, affirme sans ambages que c’est criminel de détruire des arbres de cette manière. « C’est une activité qu’il faut arrêter immédiatement », a-t-il ajouté sous l’effet sans doute de la déception. Mais quelques minutes plus tard, Adama Drabo se réajuste. « Nous allons rendre compte à la hiérarchie qui prendra des dispositions urgentes ». Mais d’ores et déjà, le directeur général des Eaux et Forêts pense que le remède à administrer est l’identification des sites et la suspension de l’activité dans cette partie de la province. Mais, il ne faut pas s’arrêter là. Il faut que des sanctions soient prises contre les associations qui achètent et encouragent la production anarchique de ce combustible, a-t-il ajouté.

DCPM/MECV

- N.B. : la titraille est du journal

Le Pays

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