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COMMERCE D’OTAGES AU MALI : Le nouveau visage du terrorisme

Publié le lundi 30 novembre 2009 à 01h29min

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L’otage français enlevé dans la nuit de mercredi à jeudi vient s’ajouter à la longue liste des hommes et des femmes kidnappés dans le Nord du Mali. Cette partie du pays, désertique, très peu peuplée, a été peu à peu abandonnée par les populations en raison de la rudesse du climat. Les terroristes et les bandits de tout accabit en ont alors profité pour y installer leurs bases et mener leurs activités criminelles : trafic de drogue, contrebande d’armes et surtout prise d’otages.

La prise d’otages, dans cette partie du pays, par ailleurs à cheval entre l’Algérie et le Niger, a pris récemment des dimensions inquiétantes. Le pays de ATT est en effet devenu une terre propice pour des rapts répétés de diplomates et de touristes occidentaux. La prise d’otage est devenue un fonds de commerce, un jeu lucratif, quoique dangereux. Il y a ceux qui prennent les otages et il y a ceux qui les achètent. Les premiers sont des voyous soucieux d’améliorer leur ordinaire. Les seconds sont des terroristes mus par l’idéologie islamiste et la haine de l’Occident. Cette cynique division du travail, cette nouvelle dualité donne un nouveau visage au terrorisme qui sévit depuis longtemps déjà dans cette zone. La stabilité du Mali, sa démocratie et sa bonne gouvernance tranchent sans aucun doute avec ces histoires de prises d’otages qui peuvent avoir des conséquences désastreuses sur le tourisme, l’économie, voire la politique.

Le gouvernement français, qui a appelé ses ressortissants à quitter immédiatement le Nord et l’Est du Mali, vient en rajouter au désarroi. Les prises d’otages deviennent assurément un problème complexe. Les preneurs d’otages organisés en bandes, choisissent bien leurs cibles, qu’ils revendent à des groupes idéologiquement engagés, bien organisés et biens puissants. Ainsi, les enlèvements sont souvent commis par de simples bandits à la recherche de sous, et qui ne sont en réalité que des sous-traitants. La sous-traitance réalisée, la nébuleuse Al-qaïda revendique l’enlèvement. C’est désormais le scénario classique.

La sous-région ouest- africaine, notamment la bande sahélo-saharienne se retrouve ainsi prise entre les feux d’un combat qui n’est pas le sien. On convient en effet que les otages kidnappés au Mali sont presque exclusivement des Français, des Canadiens, des Suisses, etc. Ce sont donc des Occidentaux qui sont visés. La lutte contre le terrorisme se déporte en Afrique parce qu’en Occident, les moyens sont mis en oeuvre pour vaincre ce qui est devenu une bête noire, même si elle est, par moments, invisible. C’est pourquoi les organisations sous-régionales comme la CENSAD et la CEDEAO doivent s’organiser pour affronter le terrorisme dont les manifestations sont perceptibles partout dans la zone. Ce n’est donc pas seulement l’affaire du Mali. Et comme les Occidentaux sont touchés au premier chef, il leur revient d’accompagner de manière efficace les pays de la sous-région en mettant à leur disposition toute la logistique et toute la technologie nécessaires qui permettront de traquer Al-qaïda. Les intérêts qui sont en jeu sont loin d’être seulement maliens.

Boureima OUEDRAOGO SONRE

Le Pays

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Vos commentaires

  • Le 30 novembre 2009 à 09:55, par Didi En réponse à : COMMERCE D’OTAGES AU MALI : Le nouveau visage du terrorisme

    Bonjour cher monsieur,

    Il y a du vrai dans ce que vous écrivez. Mais n’oubliez pas que rares sont les prises d’otages opérées sur le sol malien. En général, les enlèvements sont effectués au Niger, en mauritanie, en Algérie et même en tunisie... puis les otages sont acheminés à travers le Sahara au Mali et au Niger qui, il faut le reconnaître, sont le ventre mou dans le dispositif de lutte contre le terrorisme transfrontalier. Raison ? ces pays sont immenses et ont des milliers de km de frontières qu’aucun pays pris individuellement ne peut contrôler.

    A mon sens, le débat n’est plus pourqoui le mali, le Niger ou la Mauritanie ; la vraie question, qu’est-ce que nous pouvons faire en commun pour contrer ce phénomène qui se modernise, se développe et s’étoffe ?

    Le Président ATT a proposé à ses pairs de la sous-région un sommet sur les questions de sécurité et de développement dans la bande sahelo-saharienne. Mais pour des raisons d’idéologie, d’approche ou de calendrier, ce sommet est régulièrement renvoyé aux calendes grecques quoique tous les chefs d’Etat concernés sont convaincus de la nécessité de mettre en commun les énergies, ressources et intelligence pour venir à bout de ce phénomène qui vient de loin.

    Pour ce qui est des réactions de la France, elles sont regrettables et cachent mal les inquiétudes de Paris vis à vis d’une présence américaine imminente au Mali dans la région septentrionale. En tant que Malien, nous comprenons et acceptons un rapprochement de plus en plus visible avec les américains qui, comme vous le savez, sont plus pragmatiques.

    Et dans la perspective de l’exploitation du pétrole malien, le Sahara mérite bien qu’on renonce à une partie de notre légendaire fierté malienne. Realpolitik oblige !

    Didi

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