LeFaso.net, l'actualité Burkinabé sur le net
Proverbe du Jour : “Vous n’empêcherez pas les oiseaux de malheur de survoler votre têtе, mаis vοus рοuvеz lеs еmрêсhеz dе niсhеr dаns vοs сhеvеux.” Proverbe chinois

Huileries clandestines à Bobo-Dioulasso : De la nuisance à la concurrence déloyale

Publié le mardi 20 octobre 2009 à 03h55min

PARTAGER :                          

La libéralisation des différents secteurs d’activités économiques a favorisé une floraison d’unités industrielles à Bobo-Dioulasso. Si certaines d’entre elles exercent en toute légalité, d’autres par contre, font fi des textes et agissent dans la clandestinité. Le secteur des huileries, qui a connu un boom ces dernières années, n’échappe pas à cette réalité. Des fabriques d’huile créées dans des conditions douteuses ont poussé comme des champignons à Bobo-Dioulasso et mènent une concurrence déloyale aux autres. Les huileries qui fonctionnent normalement ont, elles, des difficultés à écouler leurs produits. Et pour cause…

La ville de Bobo Dioulasso compte une dizaine d’huileries installées dans les quartiers résidentiels, surtout les secteurs n°18, 19, 20 et 21. La présence de ces huileries est plus remarquée au secteur 19 (Kodéni).Dans ce secteur situé sur l’axe Bobo-Dioulasso-Banfora se trouve dans une ruelle, une boue noirâtre d’où suintent de part et d’autre des filets d’eau huileuse. De cette boue se dégage une odeur nauséabonde. Une maison d’habitation jouxte ces déchets. A l’intérieur sont exposés pêle-mêle des barriques, des marmites, des bidons d’huile vides, une presse et bien d’autres objets. Les bidons pleins sont exposés à même le sol dans une pièce, tandis que dans une autre sont emmagasinés des sacs de graines de coton. C’est l’ensemble de ce matériel qui indique qu’il s’agit d’une huilerie clandestine.

Sa promotrice, Rakièta Dianda, une femme d’une cinquantaine d’années dit exercer ce métier il y a une vingtaine d’années sans autorisation “C’est par manque de moyens que je fais ce travail dans cet état. J’avais demandé un terrain, mais je n’ai pas pu l’obtenir. Je l’exerce pour nourrir et entretenir mes enfants”, affirme t- elle, au milieu d’une vingtaine de personnes dont des membres de sa famille. Certaines habitent sur les lieux au milieu des objets cités. A Lafiabougou, un secteur voisin de Kodéni, est située à quelques mètres de l’huilerie de Mme Dianda, une autre huilerie aux mêmes caractéristiques que la première. Implantée à 20 mètres du cours d’eau éponyme, Kodéni, elle est à sa première année de fonctionnement mais a déjà produit plus de 700 bidons d’huile. Sa directrice Zarata Zongo, reconnait avoir ouvert son usine sans une autorisation préalable. Les deux huileries clandestines font partie des 11 dénombrées dans la commune de Bobo-Dioulasso. Une trentaine d’autres font dans la savonnerie. La particularité de ces fabriques d’huile ou de savon, c’est qu’elles sont dans des quartiers d’habitation, toute chose interdite par les textes. La plupart d’entre elles se trouvent dans les secteurs n°18, 19, et 20 qui sont traversés par la rivière Kou et abritent une nappe phréatique, sources d’approvisionnement en eau potable de la ville de Bobo et de ses environs.

Des nuisances pour l’homme et son milieu

Les huileries clandestines ont de graves conséquences sur l’environnement. Selon le capitaine Abdoulaye Traoré, contrôleur des Eaux et forêts à la direction régionale de l’Environnement des Hauts-Bassins, les huileries clandestines représentent un danger pour la santé de l’homme. Selon des techniciens du Laboratoire national de santé publique, les huiles mal traitées contiennent des impuretés insolubles et des traces de savon. Elles sont sources de troubles cardio-vasculaires, des troubles de cancer, de la reproduction et du système nerveux. Les eaux souillées rejetées dans la nature peuvent polluer les eaux souterraines ou de surface. Les risques de pollution sont élevés, surtout en période de pluie. Les déchets produits par ces huileries sont nocifs pour le sol. Soumaïla N’Diaye, directeur du développement économique et de l’emploi de la commune de Bobo, précédemment au service d’hygiène, relève que les bruits et les odeurs émis par les huileries dans les zones d’habitation perturbent la tranquillité du voisinage.

Aussi, les huiles produites sans aucune norme d’hygiène et écoulées sur le marché ont des conséquences graves sur la santé des consommateurs et concurrencent de façon déloyale celles des unités reconnues. Pour Mamadi Camara, président du Groupement des transformateurs des produits oléagineux du Burkina (GTPOB), une association de 42 huileries réglementaires, la quantité d’huile qui sort des huileries clandestines n’est pas suffisante pour les concurrencer. Seulement a-t-il ajouté, “les huileries clandestines perturbent la perception de la qualité de nos produits du moment parce qu’elles sont faites ici avec de fausses étiquettes et un mauvais raffinage. Les consommateurs ont tendance à nous assimiler à ces promoteurs-là. Nous subissons donc des préjudices et notre image en prend un coup. Nous les invitons à s’approcher des groupements pour qu’on les aide à régulariser leur statut et à travailler selon les normes et les cahiers de charge du ministère du Commerce, de la Promotion de l’entreprise et de l’Artisanat pour ne pas créer des problèmes à tout le monde ”. Le GTPOB et certaines structures ne sont pas les seules à se plaindre des huileries clandestines.

Trouver des sites d’accueil

Les abonnés de la SONABEL, riverains de ces unités, se sont plaints auprès de ladite société pour les baisses de tension du courant à leur niveau. C’est fort de toutes ces récriminations que la commune de Bobo-Dioulasso a procédé, sur instruction du ministère du Commerce de la Promotion de l’entreprise et de l’Artisanat, à la fermeture des huileries clandestines en mai dernier. Soumaïla N’diaye, qui a assisté à cette opération, précise : “L’opération a privilégié les volets santé publique et tranquillité ”. Depuis lors, les huileries non conformes sont toujours sous scellés “jusqu’à ce que les dispositions soient prises pour que l’activité se mène en zone appropriée”, a-t-il laissé entendre. Après leur intervention, les promoteurs se sont conformés à la réglementation à plus de 90%, a souligné Soumaïla N’Diaye qui a cependant ajouté : “Il ya toujours des gens qui opèrent nuitamment dans des concessions que nous cherchons à identifier”.

La commune, à en croire le directeur du développement économique et de l’emploi, veut accompagner ces huileries à se mettre en règle. C’est pour cela qu’elle travaille avec les services techniques pour mettre à la disposition de celles-ci, des surfaces d’accueil. “Le dossier est presque prêt et nous allons chercher des financements pour son aménagement”. Disposer de terrains pour mieux exercer leur métier a d’ailleurs été l’un des souhaits des huiliers que nous avons rencontrés. Si la préoccupation aujourd’hui des huileries clandestines est la régularisation de leur situation, celle des autres, c’est-à dire qui sont en règle, se trouve ailleurs. En effet, selon Mamadi Camara, les huileries ne se portent pas bien parce qu’elles ont des quantités importantes de produits sous la main. En plus, elles ne disposent pas de matières premières suffisantes pour boucler l’année. “Il y a sur le marché, des huiles à des prix bas par rapport aux nôtres. Nos coûts de production sont élevés, ce qui fait que nous n’arrivons pas à être compétitifs face à ces produits”, dit-il.

Des stocks d’invendus

Selon les patrons des huileries, le marché burkinabé est inondé de nombreuses marques d’huiles venant de la Malaisie et des pays de l’Union européenne. Les conséquences de cette concurrence sont énormes. Sory Sanogo, promoteur d’une huilerie et membre du GTPOB dit avoir 10 000 bidons d’huile qu’il n’arrive pas à vendre. La SN CITEC dispose également de milliers de tonnes dans ses magasins. Face à ces méventes, le GTPOB a contracté des prêts de plus d’un milliard pour acheter les huiles de leurs membres afin qu’ils puissent poursuivre leurs activités. Et maintenant, le groupement a des difficultés à écouler ces huiles stockées dans ses magasins à Bobo et à Ouagadougou. Les associations des producteurs d’huile demandent alors aux autorités compétentes, l’arrêt ou la limitation des importations “afin de préserver nos industries”.

Elles souhaitent également une révision à la baisse des coûts des matières premières et une meilleure organisation de l’importation des graines de coton. Selon le président du GTPOB, des graines en provenance de pays voisins entrent frauduleusement au Burkina. 90 camions transportant plus de 1000 tonnes de graines ont été dénombrés au niveau de nos frontières. “Cependant il faut montrer pattes blanches chez les égreneuses comme la SOFITEX pour avoir les graines”, dit Mamadi Camara. C’est pour cela que le président du GTPOB demande qu’à la prochaine campagne, le ministère en charge du Commerce n’autorise l’entrée des graines que par l’intermédiaire des structures organisées comme la SN CITEC ou le GTPOB. M. Camara précise que sa structure ne donne des graines qu’à ses membres et que les huileries clandestines ne sont pas concernées. Quelles soient clandestines ou pas, les huileries ont exhorté les pouvoirs publics à faire quelque chose afin que leur produit se vende bien pour la santé des entreprises et partant, de l’économie burkinabé.

Adaman DRABO

Sidwaya

PARTAGER :                              

Vos commentaires

  • Le 20 octobre 2009 à 12:51, par Kôrô Yamyélé En réponse à : Huileries clandestines à Bobo-Dioulasso : De la nuisance à la concurrence déloyale

    Mais, ce sont des foutaises !!! Est-ce que les gens se rendent compte que ce sont ces huiles qui provoquent les maladies cardiaques par le cholestérol qu’elles contiennent en masse ??

    L’Etat ayant montré son incapacité à endiguer et traiter le problème avec diligence, il faut maintenant que la population s’en mêle et rase ces huileries clandestines qui tuent les gens.

    En matière de justice, là où l’Etat laisse un vide, la population devrait l’occuper.

    Par Kôrô Yamyélé

  • Le 21 octobre 2009 à 05:36, par bogan En réponse à : Huileries clandestines à Bobo-Dioulasso : De la nuisance à la concurrence déloyale

    je felecite ces bonnes dames
    c,est tout simplement de bonne guerre
    c,est un instint de survie .Ah la pitence
    quotidienne.La meilleur facon de punir ces dames
    c,est de les aider a professer dans la legalite
    de lewuraccorder de micro credits pour leur iniatives
    c,est ce qu,un etat conscient doit faire

 LeFaso TV
 Articles de la même rubrique
Burkina : Une économie en hausse en février 2024 (Rapport)