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Blaise Compaoré : Premiers pas dans le bourbier guinéen

Publié le mardi 6 octobre 2009 à 05h07min

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Blaise Compaoré, médiateur en Guinée ! Encore lui, s’exclamèrent certains. Lui, il peut faire l’affaire, estiment d’autres qui, bien que n’étant pas réputés proches du pouvoir en place au Burkina, pensent que le choix n’est pas si mauvais que ça. Ils n’ont peut-être pas tout à fait tort, ces derniers, ce, d’autant plus que les états de service du locataire du palais de Kosyam parlent d’eux-mêmes en matière de médiation

On se souvient que déjà au beau milieu des années 90, Blaise Compaoré offrait avec un certain succès ses bons offices aux protagonistes de la crise togolaise, du vivant du général Gnassingbé Eyadéma, avec lequel il était à mille lieues de filer le parfait amour.

Avec Me Hermann Yaméogo, à l’époque ministre d’Etat et qui représentait Blaise Compaoré en tant que facilitateur, le Burkina a réussi à amorcer un dégel entre opposants togolais et pouvoir du RPT.

On se souvient également de son implication personnelle pour que le pouvoir nigérien et ses frères de la rébellion touareg acceptent de se rencontrer pour engager un brin de négociation. A l’époque, c’était Djibril Bassolet qui portait l’anonyme casquette de représentant du facilitateur.

Discret et efficace, ce gendarme a joué, au nom du Président Compaoré, un rôle déterminant dans le retour à la paix au Niger. Et l’implication du président Compaoré au Togo et en Côte d’Ivoire, avec un certain succès, a milité pour qu’il soit désigné en fin de semaine dernière médiateur de la crise guinéenne.

Un petit détour au niveau de la région ouest-africaine semble indiquer que Blaise Compaoré reste, avec le Malien Amadou Toumani Touré, un de ceux qui pouvaient encore prétendre jouer un tel rôle en Guinée. Passons donc quelques-uns en revue.

- Abdoulaye Wade, qui a réussi un bon coup dans sa médiation en Mauritanie, irrite bien souvent par ses prises de positions, quelques fois intempestives, et s’est d’ailleurs récemment fait houspiller par les opposants guinéens. Gorgui aurait donc un déficit de crédibilité pour jouer ce rôle en Guinée ;

- Mamadou Tandja, qui s’est fait casanier depuis n’a pas encore fini de solder les effets pervers de son hold-up électoral du 4 août dernier ;
- Boni Yayi, qui a prêté serment seulement en 2006 fait office de poussin d’hivernage dans la fonction de chef d’Etat ;

- Faure Eyadéma n’a pas totalement réussi à endosser son costume d’homme d’Etat et a encore du mal à trouver ses marques dans ses rapports avec son opposition ;

- et ce ne serait certainement pas le fantasque Yaya jammeh de Gambie qu’on appellerait pour une médiation de ce genre ! Alors hormis eux, qui ?

Bref si l’intention de la CEDEAO était de trouver un médiateur sous-régional francophone et qui a de l’expérience en la matière, Blaise reste un morceau de choix. Et ce choix est loin d’être anodin, puisqu’on se rappelle que, dans son communiqué final qui a sanctionné les travaux des chefs d’Etat de cette institution sous-régionale le 22 juin dernier à Abuja, déjà il avait été instamment « demandé au président Compaoré de reprendre son rôle de facilitateur dans le dialogue intertogolais, après son expérience concluante de 2007, et, mieux, de poursuivre son rôle de médiateur sous-régional ».

Alors, en négociateur averti des équations africaines presque unanimement reconnu, Blaise Compaoré a-t-il des chances de recoller les morceaux entre pro et anti Dadis après ses massacres de manifestants par les forces de (dés) ordre que sont les bérets rouges (garde présidentielle), lesquels ne se sont pas gênés pour aussi violer les femmes en public ?

C’est en tout cas un Blaise Compaoré que l’on dit extrêmement préoccupé et choqué par cette manifestation réprimée dans le sang qui a entamé hier à Conakry une médiation en vue de faire baisser la tension en Guinée et, mieux, obtenir l’organisation d’une consultation électorale assez transparente en janvier 2010.

Au-delà de calmer simplement le jeu politique en Guinée, la préoccupation de la CEDEAO est d’éviter la radicalisation du régime en place à Conakry, voire la « Libériarisation » progressive du pays, susurrée dans certaines chancelleries occidentales. A l’instar des inquiétudes soulevées au plus fort de la crise ivoirienne, il n’est dans l’intérêt d’aucun Etat ouest-africain que la Guinée aussi sombre dans une instabilité chronique.

Blaise Compaoré, en dépit de ses amitiés réelles ou supposées avec certains ténors de l’opposition guinéenne et de la fraternité d’armes qui le lie à Dadis, l’enfant de Nzérékoré dans la Guinée forestière, devrait s’investir pleinement pour aboutir à quelque chose, et la partie n’est pas gagnée d’avance.

Ce terrain de la médiation semble d’autant plus miné que les deux parties en présence se regardent depuis en chiens de faïence. En effet, dans une interview diffusée avant-hier dimanche sur RFI, et où Dadis sautait allègrement du coq à l’âne, le président autoproclamé de Guinée n’a pas manqué de toupet pour ne reconnaître aucune responsabilité dans le massacre du lundi 28 septembre dernier.

« Un complot est même fomenté par les chefs de l’opposition pour ternir mon image », a ajouté en substance le nouvel fort de Conakry. Face à un président seulement « désolé » suite à tel massacre gratuit au stade du 28-Septembre, l’opposition fait de sa renonciation à faire acte de candidature à la présidentielle un préalable à toute négociation.

Mais quoique difficile, la mission du président Compaoré est loin d’être impossible. A entendre déjà Dadis, son cœur balance entre être candidat à la présidentielle de janvier 2010 et quitter tout de suite le gouvernail du bateau battant pavillon Guinée. Et en dépit du soutien de ses partisans qui le poussent à faire acte de candidature, son aîné dans la grande muette pourrait lui montrer tout de suite le bien que lui, Dadis, l’armée et la Guinée tireraient de son abstention à briguer la magistrature suprême.

Et ensuite se poursuivrait la délicate réforme d’une armée guinéenne abîmée, à la recherche de ses marques et qui, depuis, n’a comme seul haut fait de guerre que la réussite de coups d’Etat contre des dictateurs morts. Alors, le succès de cette médiation sonnera comme une renaissance de la Guinée, laquelle, depuis 50 ans, fait du surplace.

Boureima Diallo

L’Observateur Paalga

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Vos commentaires

  • Le 6 octobre 2009 à 07:55 En réponse à : Blaise Compaoré : le parfait démagogue

    Une abeille morte nous a piqué ! Un chef d’état qui court le monde jouer au médiateur pendant que sa maison brûle:un coupeur de têtes sème la terreur dans la capitale, les forces de l’ordre notamment la police agressent sans raison les citoyens, ses amis opérateurs économiques font du trafic de voitures aux dépens de l’Etat...A l’entendre se plaindre qu’il ne devrait pas avoir de morts aux corps non retrouvés en Guinée...Et au Burkina Monsieur le Président combien sont ces familles qui vous demandent de restituer les corps de leurs enfants depuis plus de dix ans ! Le président du Fasi qui indique à Dadis comment éviter que des militaires armés circulent dans la ville pendant que ses élèves policiers bastonnent les populations à Ouagadougou et que lui et ses forces armées sont incapables d’arrêter le coupeur de têtes qui sème la terreur à Ouagadougou !!!Quel sacré comédien ET DEMAGOGUE de président avons nous le malheur d’avoir là ?

  • Le 6 octobre 2009 à 10:04 En réponse à : Blaise Compaoré : Premiers pas dans le bourbier guinéen

    belle analyse que celle faite par ce journaliste à l’immense talent .Diallo merci nous te lisons et te suivons

  • Le 6 octobre 2009 à 10:06, par seydou de boussouma En réponse à : Blaise Compaoré : Premiers pas dans le bourbier guinéen

    de tels articles nous en demanderons toujours et merci pour cet esprit de synthèse qui te caracterise particulierement

  • Le 6 octobre 2009 à 10:15 En réponse à : Blaise Compaoré : Premiers pas dans le bourbier guinéen

    A voir la photo des deux , on dirait qu’ils sont fans l’un de l’ autre. tache qui ne sera pas facile poour le PF, mais sans doute c’est parce que c’est complexe que le choix s’est porté sur lui, qui doit avoir bcp de cartes à jouer afin de desamorcer la situation ; courage !! l’afrique n’a pas besoin que de la paix !!

  • Le 6 octobre 2009 à 10:31 En réponse à : Blaise Compaoré : Premiers pas dans le bourbier guinéen

    c’est vrai ce qui a ete dit

  • Le 6 octobre 2009 à 10:54, par boudwarba En réponse à : Blaise Compaoré : Premiers pas dans le bourbier guinéen

    Yako Blais ! Pour de la médiation, il faut éviter que Dadis croit qu’il s’agit d’une visite de courtoisie ou de soutien. Il profite pour faire semblant d’avoir de la compation pour ceux sur qui il a "fait" tirer. Qu’il ne se frotte pas les mains, Blaise vera aussi les "autres" parties politiques.
    je propose que la presse faisse un black out des "Dadis-shows" pour limiter l’irritation qu’il y crée chaque fois.
    je suis alergique à ce type

  • Le 6 octobre 2009 à 11:38, par burkinabè En réponse à : Blaise Compaoré : Premiers pas dans le bourbier guinéen

    rappelez vous comment Blaise est arrivé au pouvoir ??? pas de commentaire... et souvenez vous des multiples crimes effectués sous son régime, sans que justice ne soit faite ??? pas de commentaire !!

    Si c’est ce type qu’on choisit pour être médiateur, je conclus que soit les gens exemplaires comme Alpha Omar du Mali sont occupés ou ne veulent pas salir leurs mains, soit la CEDEAO ne veut pas la fin de ces conflits...

    Et sachez que beaucoup de chefs d’Etats ont des passés similaires, qu’ils ne veulent pas se meler des trucs, au risque qu’on leur rappelle comment ils en sont arrivés là !!

    Afrique ! Afrique ! Mon pauvre Afrique !!!

  • Le 6 octobre 2009 à 12:09, par Eric de Panam En réponse à : Blaise Compaoré : Premiers pas dans le bourbier guinéen

    Pour ceux qui connaissent les peuple de Guinée, il est inadmissible de voir sombrer ce beau pays dans une gabegie hors norme , une dictature de pareille inexistante, meme IDIAMIN DADA est bon eleve face à Dadis .
    Monsiuer Compaoré Dadis n’est pas comme vous , aidez les Guinéens a mettre hors etat de nuire le CNDD et son chef alchoolique Dadis
    Les guinéens merite mieux

  • Le 6 octobre 2009 à 12:48 En réponse à : Blaise Compaoré : Premiers pas dans le bourbier guinéen

    A noter que prendre un militaire (capitaine) arrivé au pouvoir a la faveur d’un coup d’Etat (mort de Sankara) et accroché au pouvoir depuis , pour servir de médiateur avec un autre militaire arrivé au pouvoir par coup d’Etat c’est un peu se moquer des gens !
    Que peut conseiller Compaore au Dadi ? Comment rester au pouvoir ? comment créer des groupuscules « Amis de Dadi » « tanti de Dadi » « association pour le développement de la Guinée avec Dadi » construction d’un quartier « Konakry2000 » ?

  • Le 6 octobre 2009 à 14:09, par malomba En réponse à : Blaise Compaoré : Premiers pas dans le bourbier guinéen

    Félicitation Mr le Président, N’importe qui ne devient pas médiateur. On ne devient pas médiateur du jour au lendemain. Il y a des gens qui ne savent pas reconnaître la valeur des autres. Vous êtes le meilleur médiateur de l’Afrique à mon avis car la CEDEAO ne choisit pas des gens au hasard. Courage mon président Que Dieu le tout puissant vous assiste et que les enfants du pays des hommes intègres vous voient comme un modèle pour l’Afrique. N’écoutez pas les jaloux, toute la cellule de jeunesse que je dirige est avec vous !!! En avant le Burkina avec Blaise Compaoré.

  • Le 6 octobre 2009 à 16:50, par drissa En réponse à : Blaise Compaoré : Premiers pas dans le bourbier guinéen

    Voila, ca c’est un article non partisan ! Bravo Monsieur Diallo. Rien à dire ! Ca change de ces petits journalistes griots qui nous pompent continuellement l’air ici en idolatrant blaise sans arrêt !

  • Le 6 octobre 2009 à 19:13, par Machiavel En réponse à : Blaise Compaoré : Premiers pas dans le bourbier guinéen

    Monsieur le journaliste,
    Vous avez fait une analyse super de la situation au début avant de vous planter à la fin. Quand vous ne maîtrisez pas les raisons profondes du choix de Blaise Compaoré comme médiateur, il ne faut pas inventer. C’est vrai que dans votre métier on peut souvent se permettre certaines choses mais de grâce, il ne faut pas jouer à l’apprenti sorcier. Les chefs d’état ont décidé d’envoyer un militaire voir un autre militaire. Ils ont compris que tout ce que Dadis a fait, quelqu’un l’a déjà fait et on a pris le cas de Idi Amin car les mors ne peuvent pas se plaindre. En revanche, ceux qui ont tué et dissimilé les corps savent comment parler entre eux. Dadis est Blaise moins le discrétion.

  • Le 6 octobre 2009 à 19:24, par Machiavel En réponse à : Blaise Compaoré : Premiers pas dans le bourbier guinéen

    Et qui va être maintenant le représentant personnel ? Pardon, il ne faut pas nous envoyer Demba là-bas. Il ne faut même pas envoyer un civil car ce Dadis ne les aime pas, alors là, pas du tout. Un général, ce serait faire un très grand honneur à Dadis, donc, je vous propose d’envoyer un militaire qui comprend bien le dioula car le pauvre Dadis ne comprend pas bien ce que lui-même appelle « les langues de Molières ». Monsieur le président, chercher dans vos poches un de vos officiers supérieurs désactivés qui peut boire un coup avec Dadis tout en le rappelant qu’il doit mettre fin à son braquage politique auquel il a soumis « le pauvre peuple de Guinée ». Surtout, il faut lui préparer une sortie qui le rassure avec une bonne retraite de chef d’Etat en Guinée et pourquoi pas des promesses de mission de bons offices ou d’œuvre humanitaire. Il faut lui faire voir tout de suite comment est-ce qu’il doit s’en sortir. Une proposition de faire du ATT n’est pas exclu tant les peuples ont la mémoire courte. En laissant le pouvoir aux civils, il pourra revenir après un mandat bordélique (civil de guinée, je veux dire) et les massacres seraient un vague souvenir encore vivant chez ceux que vous et votre clan appelez « les aigris ». Permettez-moi de vous donner ces quelques conseil votre ami qui, de la vallée, observe le sommet de la colline

  • Le 8 octobre 2009 à 19:53 En réponse à : Blaise Compaoré : Premiers pas dans le bourbier guinéen

    Belle analyse grand frère Diallo

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