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Zoom sur les myopathies à Ouagadougou avec Hawa Barry, fondatrice et présidente de la Fondation internationale Tierno et Mariam (Fitima)

Publié le jeudi 17 septembre 2009 à 03h31min

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Hawa Barry

Fondatrice et présidente de la Fondation internationale Tierno et Mariam (Fitima), créée en septembre 2003 pour venir en aide aux enfants atteints d’un handicap moteur, en général, et à ceux atteints de maladies neuromusculaires, en particulier, Hawa Barry s’active à mettre en place le Réseau ouest africain de prise en charge des myopathies (Roamy). Elle a bien voulu éclairer le public, dans cet entretien à Fasozine.com, sur ce projet qui lui tient à cœur, et dont le lancement est prévu pour le mercredi 16 septembre 2009, à Ouagadougou…

Fasozine.com : Votre fondation, Fitima, existe depuis six ans. Etes-vous satisfaite de ce qui a été fait jusque-là ?

Hawa Barry : Je pense qu’il vaut mieux demander aux bénéficiaires s’ils sont satisfaits. Cependant, il n’y a pas à rougir du parcours qu’on a fait depuis six ans. Rien qu’au niveau des chiffres, la première année, nous étions deux, mon assistante et moi, à avoir démarré les activités. Aujourd’hui, il y a 12 personnes – salariés et vacataires - qui travaillent à Fitima, et cet effectif ne suffit même pas pour tout ce qu’il y a à faire. Nous nous occupons, cette année, d’environ 70 enfants. Je dis « enfants », parce qu’il y a aussi quelques adolescents, et même des adultes, mais 80% de nos patients sont des enfants de moins de 16 ans. A Fitima, nous faisons une prise en charge globale (médicale, paramédicale et socioéducative).

Comment est née l’idée de créer le Réseau ouest africain de prise en charge des myopathies (Roamy) ?

En fait, les myopathies sont des maladies un peu orphelines, et il y a très peu de spécialistes qui s’intéressent à ces pathologies. La renommée de Fitima dépasse maintenant les frontières du Burkina, et nous sommes contactés par des familles des pays de la sous-région, du Mali, du Niger, du Bénin, de la Côte d’Ivoire. Nous étions malheureusement assez impuissants pour répondre à l’attente de ces familles, parce que cette prise en charge doit se gérer dans la proximité. C’est ainsi qu’avec d’autres amis, nous avons eu l’idée de créer un réseau ouest africain, dans un premier temps, pour fédérer un peu les quelques praticiens, les associations et les structures de réadaptation qui s’intéressent à ces pathologies. De cette façon, si une famille nous contacte du Mali, avec le répertoire que nous sommes en train de mettre en place, nous pourrons diriger cette famille vers des centres ou des professionnels du Mali, qui pourront assurer la prise en charge.

L’idée du réseau est venue de là. Il s’agit, déjà, de rapprocher les professionnels des familles, mais aussi de partager les expériences, parce qu’ils sont moins nombreux. Dès qu’on a commencé, il y a à peu près un an, l’idée a commencé à émerger, il y a eu un engouement. J’ai été au Niger, pour aider à créer une association, dont les membres sont attendus pour le lancement officiel du Roamy. Si le peu de personnes qui s’intéresse à ces pathologies arrive à bien faire le travail, à mieux connaître les maladies, cela peut susciter des vocations chez les jeunes médecins qui pourraient éventuellement se spécialiser dans ce domaine.

Ce réseau sera représenté dans plusieurs pays. Comment fonctionnera-t-il ?

C’est un vrai défi ! On a élaboré tout un projet sur le fonctionnement. Une assemblée générale se tiendra le vendredi 18 septembre 2009, au cours de laquelle on parlera de tout cela. Des professionnels viendront de six pays d’Afrique de l’Ouest, et c’est déjà très bien pour un début ! Si tous les ans, on arrive à organiser des ateliers, des séminaires sur ces pathologies, et si les professionnels arrivent à établir des liens de coopération, de partenariat entre les hôpitaux, et faire quelque chose de tournant, on pourra sensibiliser aussi bien les patients que les pouvoirs publics, et aboutir à un plaidoyer.

Alors, c’est quoi les myopathies ?

Les myopathies, c’est un ensemble de maladies qui atteignent les muscles, et quand on parle de maladies neuromusculaires, c’est quand les nerfs ou et les muscles sont atteints. Ce sont, le plus souvent, des maladies dégénératives, chroniques, et la prise en charge ne permet malheureusement pas de les guérir. Pour ce moment, on ne sait pas guérir ces maladies, mais le fait de prendre en charge les personnes qui en souffrent ralentit la maladie et peut leur permettre de mieux vivre. Cela permet d’éviter les déformations, qui peuvent être parfois fatales. En effet, lorsqu’elles sont très sévères au niveau du thorax, les déformations peuvent comprimer tout l’appareil respiratoire. La pratique régulière de la kinésithérapie permet d’éviter ces déformations, mais aussi de stimuler intellectuellement les enfants qui ont, malheureusement, un handicap intellectuel associé à ces handicaps moteurs.

A Fitima, avec les éducateurs, on essaie de stimuler tout ce qui concerne les apprentissages, ce qui permet après à l’enfant d’évoluer. On a même des enfants pris en charge ici, qu’on a pu réinsérer dans le circuit ordinaire au bout de deux ans.

Mais quel est l’état des lieux des myopathies au Burkina Faso ?

C’est la grande question ! Justement, il n’y a pas de statistiques. C’est un peu ce qui manque dans nos pays, en Afrique. Il n’y a pas de statistique, donc je ne pourrai même pas vous dire s’il y en a beaucoup ou peu. Par contre, je peux vous dire qu’on vient de faire une étude, une identification, pas un recensement, au niveau de Ouagadougou, dont les résultats vont être restitués au cours des journées de lancement du Roamy. L’étude a porté sur quelques centres médicaux dans lesquels deux étudiants en médecine sont allés administrer un questionnaire, consulter les archives et les registres, et se sont éventuellement rendus dans des familles pour rechercher des cas patents de myopathies. Ils ont fait ce travail pendant 15 jours, ont visité 7 sept centres médicaux et ont d’abord remarqué que les registres n’étaient pas toujours très bien tenus. Malgré tout, ils ont trouvé 30 cas en deux semaines, juste à Ouagadougou. C’est pour vous dire qu’il y en a plus qu’on ne le pense. Si en Afrique, chaque pays arrive à identifier ses malades, peut-être que dans l’avenir, on pourra faire un vrai recensement.

Vous avez parlé tantôt de manque de statistiques concernant les myopathies. N’est-ce pas une négligence vis-à-vis de ces maladies ?

Pour ma part, je pense que c’est plus une question d’habitude. C’est comme si tout le monde était un peu fâché avec les chiffres. Pour faire des statistiques, il faut déjà avoir des registres bien tenus, et aussi des gens qui sont intéressés car, avoir des données, c’est bien, mais pouvoir les exploiter et les interpréter, c’est encore mieux. Ce n’est pas seulement pour les myopathies. En général, on manque de statistiques dans le domaine de la santé.

C’est aussi dû à la méconnaissance, parce qu’il y a beaucoup de médecins qui ne savent pas ce que sont les myopathies. Le diagnostic n’est pas souvent bien établi. On peut conclure que l’enfant est atteint d’infirmité motrice cérébrale (IMC) alors que ce n’est pas cela. Ce qui fait que les myopathies sont sous-évaluées ici. Il y a des gens qui en ont entendu parler peut-être une seule fois dans leur cursus, d’où l’importance de l’atelier qu’on fera le jeudi 17 septembre, où on ne parlera que de diagnostic, des registres des patients, des biopsies… parce que c’est extrêmement important pour un suivi.

Donc, il y a cette méconnaissance, et aussi le peu d’intérêt. Cela peut se comprendre, les gens s’intéressent plus au paludisme, qui fait beaucoup de ravage. C’est clair.

Kpénahie Traoré

Fasozine

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Vos commentaires

  • Le 17 septembre 2009 à 13:54, par ELNIGNO En réponse à : Zoom sur les myopathies à Ouagadougou avec Hawa Barry, fondatrice et présidente de la Fondation internationale Tierno et Mariam (Fitima)

    Je suis à la fois satisfait et choqué. Satisfait du fait que dans un pays sous-devéloppé et de faible niveau d’instruction comme le Burkina, il y ait une association d’aide aux patients souffrant de myopathies, qui comme la présidente de l’association l’a si bien souligné, est une maladie orphéline, dénuée de tout recours thérapeutique.
    Mais, ma déception est grande, quand Mme la présidente fait dans l’amalgame :
    - Problèmes de définition : Myopathie= maladie primitivement musculaire (douleurs musculaires comme des crampes, diminution de la force musculaire, gonflement et/ ou atrophie des muscles...) & maladies neuro-musculaires= atteintes musculaires secondaires à une maladie des nerfs périphériques (diminution de la force musculaire, absence de réflexes, atrophie musculaire) ; IMC= infirmité motrice cérébrale (déficit de la force musculaire d’un hémicorps ou des 4 membres, parfois de la face voire, limitant la parole,parfois accompagnée d’épilepsie voire de retard mental ; causée par déficit de la commande nerveuse centrale (séquelles cicatricielles de maladie cérébrale dans l’enfance)... Toutes ces maladies ont en commun qu’elles peuvent aboutir à un handicap moteur sévère, voire au décès par insuffisance respiratoire (paralysie des muscles respiratoires comme le diaphragme et les muscles du thorax) ou par complications liées à l’immobilisme (plaies, infections respiratoires, urinaires, dénutritions... Leur traitement est le plus souvent palliatif : kinésithérapie mobilisatrice, orthophonie,...
    Bref Mme BARRY semble ne meme pas maitriser le champ de définition de la pathologie qu’elle dit connaitre et dont elle dit vouloir défendre les victimes.
    Par ailleurs Mme Barry prétend que les médecins ne connaissent pas les myopathies (qu’elle ne connait pas elle-meme) : sur ce plan, je me demande si cette dame (dont je ne connais pas le profil socio-professionnel ni le niveau d’instruction) a frappé à la bonne porte, car ce genre de maladies est pris en charge dans des services de Neurologie. A ce que je sache, elle n’a meme pas mentionné une quelconque référence à un tel service, dont les myopathies font pourtant partie de son champ d’action. Elle continue dans sa démarche un peu prétentieuce en disant qu’il n y a meme pas de statisques : certes les choses ne sont parfaites, mais il faut éviter de faire des déclarations gratuites, surtout quand on ne connait meme pas bien le sujet.
    Moi, humble citoyen, médecin neurologue de mon état, je souhaiterais que de telles dérives soient évitées d’orénavant. Aussi présidente d’association des myopathies soit-elle, elle n’a pas le droit de dire des contre-vérités surtout si elle n’a ni le profil ni les capàacités intellectuelles pour le faire.

    • Le 15 janvier 2010 à 10:05, par Françoise Salama-Marie En réponse à : Zoom sur les myopathies à Ouagadougou avec Hawa Barry, fondatrice et présidente de la Fondation internationale Tierno et Mariam (Fitima)

      Je suggère que ce médecin, neurologue, rencontre directement Mme Hawa Dramé à FITIMA, car contrairement à ce qu’il dit, Mme Dramé est une des plus qualifiée en ce qui concerne les maladies neuromusculaires et autres maladies rares, à titre personnel et professionnel. Si Mme Hawa Dramé a simplifié ses propos pour les rendre compréhensibles par le plus grand nombre, elle est elle-même scientifique, et connaît en profondeur ce sujet. Elle a travaillé plusieurs années au département scientifique de l’Association Française contre les Myopathies, qui organise le Téléthon en France et finance la recherche dans les domaines des maladies neuromusculaires et maladies génétiques rares. Elle a aussi été expert pour EURORDIS, organisation européenne pour les maladies ares, à l’EMEA, l’Agence européenne du médicament à Londres. Elles a une grande connaissance et expérience de ces nombreuses maladies regroupées sous ce terme de Maladies neuromusculaires MNM. 
      Si ce médecin préfère rencontrer un collègue, il peut aussi s’adresser au Dr Chritian Napon neurologue au Burkina Faso qui connaît bien FITIMA, Mme Dramé et l’Institut de Myologie à l’hôpital de la Pitiè Salpétrière à Paris.

  • Le 28 janvier 2010 à 11:02, par Nice En réponse à : Zoom sur les myopathies à Ouagadougou avec Hawa Barry, fondatrice et présidente de la Fondation internationale Tierno et Mariam (Fitima)

    Ah là nous avons du pain sur la planche. Ce medecin neurologue me deçoit. Il faut souvent toucher du doigt les réalités du terrain avant de s’enflammer. Je peux bien et bel dire avec certitude que personne ne connait mieux les myopathies que Mme BARRY. J’ai travaillé avec elle, je sais de quoi je parle.Il ne suffit pas d’être neurologue....
    Apprenons à féliciter ceux qui travaillent dans l’ombre avec les moyens de bords comme Mme BARRY.

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