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Koubri : Qui veut la tête du maire ?

Publié le vendredi 15 mai 2009 à 03h32min

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Le maire de Koubri serait-il devenu persona non grata au ministère en charge des Collectivités locales ? Alors que les couloirs du département dirigé par le « très discret » et Clément Pégwendé Sawadogo bruissent de rumeurs sur de présumées difficultés que connaîtrait cette commune rurale, personne n’ose dire tout haut ce que l’on reproche au sieur Félix Compaoré. Et pourtant, l’homme est chargé de tous les péchés. La source de ses problèmes ?

Une affaire de lotissement suspendu par le ministère de l’Administration territoriale et de la Décentralisation (MATD) sur fond de crocs-en-jambe politiciens. Cette initiative, qui devait être un des plus grands projets du tout premier maire élu sous la bannière du Rassemblement pour le développement du Burkina (RDB), est aujourd’hui compromise par une guéguerre désormais béante entre les deux principales forces politiques en présence. Pire, une procédure de révocation du maire serait secrètement en préparation dans le cabinet de Pégwendé. Comment en est-on arrivé là ?

Suite à la plainte solitaire d’un conseiller municipal - distillée dans les colonnes de certains confrères -, une première mission de contrôle du MATD s’est déportée, en août 2008, à Koubri pour décortiquer des fils d’allégations de « mauvaise gestion » qui étaient faites contre le maire. Hospitalisé suite à une piqûre d’abeilles, celui-ci n’avait pas pu être entendu par les fins limiers de l’inspection du ministère. Le ministre Clément P. Sawadogo a été obligé de diligenter une deuxième inspection, un mois plus tard. Comme si tout cela ne suffisait pas pour dissuader le maire, une troisième mission a été envoyée en février 2009 à Koubri pour « investigation complémentaire ».

Des accusations de mauvaise gestion pour lesquelles la machine de contrôle a été mise en branle, l’édile s’est vu progressivement coincé par les limiers sur le dossier très sensible du lotissement qui était en cours. La mission d’inspection a rejeté comme non conformes des justificatifs de dépenses dont le montant varie entre 3 et 4 millions. Pour en avoir le cœur net, celle-ci a transporté les registres de recensement de Koubri dans les bureaux des inspecteurs du MATD afin que ceux-ci fassent toutes les vérifications qu’ils souhaitaient. Croyant ainsi prouver sa bonne foi, le responsable local va se voir « confisquer » les registres sous prétexte d’une mesure de suspension qui serait toujours en cours contre l’opération de lotissement.
Mais de mesure, il n’y en a pas, en dehors d’un message radio que le ministère a transmis au préfet de Koubri invitant les acteurs du lotissement à observer une suspension provisoire en attendant la validation officielle du processus. Que cet arrêt momentané vienne à courir encore aujourd’hui, Félix Compaoré et ses camarades du RDB n’y voient que la main cachée de leur adversaires politiques qui tireraient les ficelles jusqu’au MATD. Pour eux, la succession des inspections de contrôle, qui a aboutit finalement au blocage du lotissement, ne vise ni plus ni moins qu’à jeter des peaux de banane sur la route de l’exécution du Plan de développement communal adopté par le conseil municipal.

Les bagarres qu’il y avait eu en septembre dernier entre les partisans du maire Félix Compaoré et ceux du conseiller frondeur Jérôme Zangré du CDP auraient-elles quelque chose à voir avec les péripéties actuelles ?
Le moins que l’on puisse dire, c’est que les déboires actuels de l’édile de Koubri sont liés à une équation politique qu’il avait cru voir se dissoudre au fil du temps. Surtout que sa formation politique, le RDB, est de la mouvance présidentielle, donc coépouse du Congrès pour la démocratie et le progrès (CDP), le gigaparti au pouvoir. Pour avoir remporté les municipales de 2006 avec 27 conseillers municipaux contre 23 pour le CDP et 1 pour l’ADF/RDA, Félix Compaoré et ses camarades disposaient d’une majorité assez confortable pour imprimer leur marque dans la gestion de cette commune rurale qui se trouve aujourd’hui être la seule à échapper au parti au pouvoir dans la région du Centre. Mais c’était sans compter avec la volonté de certains de ses adversaires de lui mettre les bâtons dans les roues.

Au regard de l’évolution de la situation, le conseiller Jérôme Zangré doit boire du petit lait en apprenant que le maire ne sait pas où donner de la tête pour récupérer ses registres de recensement afin de continuer le lotissement. S’il est vrai que ce bonhomme avait toujours manœuvré pour que son adversaire de maire morde la poussière, force est de constater qu’il peut tout aussi se réjouir de ce que le MATD a quelque peu réalisé son rêve. Quant au maire, il peut tout aussi considérer que les missions de contrôle du ministère ne sont pas aussi neutres que cela. D’ici à penser que le ministre Clément P. Sawadago ne pourrait rien refuser à son parti et qu’il serait manipulé par le CDP qui voudrait, à tout prix, faire échec aux actions du RDB à Koubri, il n’y a qu’un pas. Mais où met-on les intérêts des populations de cette commune rurale ? Que fait-on de la crédibilité du processus de communalisation pour laquelle le Burkina joue son image avec ses partenaires techniques et financiers ?

Sans prendre parti pour le maire ou pour le collège des inspecteurs du MATD, il importe de relever que la gestion des communes rurales, en l’occurrence, se trouve fragilisée par le fait qu’elle peut être facilement prise en otage par des guéguerres inutiles de partis politiques au grand dam des véritables enjeux de développement. Au regard des nombreuses reculades qu’on observe ici et là à cause de ces « blocages » qui coûtent des centaines de millions à l’Etat, il importe certainement de recadrer le poids des nuisances politiciennes dans les communes rurales. Il en va de la salubrité publique, et donc d’une saine démocratie à la base. Pour le cas présent de Koubri, le ministre Clément P. Sawadogo et ses inspecteurs gagneraient à expliquer clairement à tous les acteurs les tenants et les aboutissements de la fameuse mesure de suspension de l’opération de lotissement à Koubri.

Cela aura l’avantage de situer les uns et les autres et surtout d’éviter que la rumeur prenne le pas sur la vérité, et d’éviter ainsi les vilaines suspicions qui se sont emparées du conseil municipal de cette commune qui ne demande qu’à se développer dans la sérénité.

F. Quophy

Le Journal du Jeudi

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Vos commentaires

  • Le 15 mai 2009 à 12:56, par la conscience En réponse à : Koubri : Qui veut la tête du maire ?

    Quelle décentralisation !

    Y en a marre de voir des maires mis en difficulté par des groupuscules ou des individus aux intentions inavouées.

    Y en a marre de voir le gouvernement agir toujours dans le sens des frondeurs ce qui laisse croire que ces actes ne sont pas totalement innocents.

    Y en a marre de la politique de deux poids deux mesures dans le traitement des dossiers communaux.

    Y en a marre de l’insuffisance de l’accompagnement de l’Etat aux communes.

    Y en a marre de voir des élections municipales reprises au frais du contribuable.

    Y en a marre de voir des communes s’enliser en dépit des potentialités dont elles disposent (comme c’est le cas pour Koubri).

    Y en a marre d’un code général des collectivités territoriales présentant de nombreuses lacunes.

    Y en a marre d’une citoyenneté locale inexistante, car peu informée et peu formée.

    Y en a marre.

  • Le 18 mai 2009 à 12:37, par YduBourg En réponse à : Koubri : Qui veut la tête du maire ?

    Mon frère, je pense qu’il faut aussi que tu dises haut et fort que tu en as marre ! ;-)

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