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UA - Côte d’ivoire : Maintenir la corde raide

Publié le lundi 12 juillet 2004 à 08h13min

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Va-t-on, cette fois-ci, parvenir à contraindre Laurent Gbagbo à
emprunter la route rectiligne tracée à Marcoussis et censée
conduire à la paix en Côte d’Ivoire ?

Jusqu’à présent, convaincu
que tout pouvait lui réussir dans son entêtement, le président
ivoirien s’était contenté de slalomer entre ses pairs et au grand
dam du dernier et petit carré des chefs d’Etat qui le soutenaient
encore. Malheureusement pour lui, avec un tel jeu dans lequel il
était à la fois le seul concurrent et le seul arbitre, Laurent
Gbagbo a fini par s’essouffler lui-même et indisposer le dernier
cercle de ses défenseurs.

A force de les faire tourner en rond,
de les ridiculiser et de les réduire en simples spectateurs de
son cirque, les chefs d’Etat ont fini par siffler la fin du spectacle
après avoir inventorié ses nombreuses bavures politiques. Une
telle issue était prévisible, sauf pour l’historien Gbagbo qui,
dans sa soif du pouvoir, ne s’était pas encore rendu compte que
les temps et les mentalités ont changé.

Même si l’Union
africaine, par certains aspects de ses textes fondamentaux,
garde encore, comme la défunte OUA, l’image d’un syndicat de
chefs d’Etat, Laurent Gbagbo a eu tort, en tant que membre, de
s’être comporté avec une indiscipline caractérisée, comme un
électron libre, refusant de se plier à toutes les injonctions d’où
qu’elles viennent. Laurent Gbagbo s’est donc trompé d’époque,
car la notion de non ingérence dans les affaires intérieures d’un
pays n’a plus de sens aujourd’hui, surtout en Côte d’Ivoire où
stationnent des contingents étrangers.

En plus, l’aspiration des
citoyens africains à la démocratie est aujourd’hui si forte que
l’Union africaine ne pouvait que secouer le cocotier ivoirien de la
violation des droits de l’Homme et de la mal gouvernance. Par
ailleurs, l’UA est aujourd’hui dirigée par une nouvelle génération
de chefs d’Etat (si on met de côté certains dinosaures encore
dans les limbes de la dictature) plus à l’écoute de leurs
citoyens. Enfin, chaque chef d’Etat africain souhaiterait tellement
vendre aujourd’hui son image de démocrate auprès des
bailleurs de fonds que continuer de fréquenter Gbagbo paraîtrait
suspect.

C’est donc un Laurent Gbagbo qui a vidé tout son
carquois, sans avoir vaincu, qui s’est présenté à Addis-Abeba où
il a pratiquement été humilié. Celui qui, jusqu’à présent, n’avait
de respect pour personne, ni pour ses pairs ni pour la
communauté internationale encore moins pour le peuple
ivoirien, s’est finalement comporté en agneau, prêt à toutes les
concessions et à "aller plus loin" qu’il ne l’a fait jusqu’à présent.
Un engagement qu’il faut prendre toutefois avec des pincettes
quand on sait que Laurent est une redoutable girouette.

Comme
il l’a fait après Marcoussis, rien n’indique qu’une fois de retour
dans son pays, Laurent Gbagbo ne va pas renouer avec les
démons de l’aveuglement. Ce qui vient de se passer à
Addis-Abeba est la preuve que Gbagbo ne peut céder qu’avec le
couteau à la gorge. Ce qui signifie que la fermeté devrait être
permanente à son égard, non seulement de la part de l’Union
africaine, mais également de la part de l’ONU. La même fermeté
devrait être de règle du côté de la France, ce pays de la
déclaration des droits de l’Homme qui s’est souvent laissé
intimider par l’arme du chantage à l’insécurité de ses 20 000
citoyens qui, tout compte fait, constituent une goutte d’eau au
milieu des millions d’Ivoiriens qu’on envoie dans des charniers.

En tous les cas, la prochaine rencontre d’Accra devrait être le
dernier épisode d’un feuilleton où tout devrait définitivement se
régler. Faute de quoi, il ne faudrait pas s’étonner que nos chefs
d’Etat continuent de danser sur des braises que Gbagbo
rallume chaque fois qu’il a l’occasion. Le personnage est
suffisamment bien connu, y compris au Burkina où nous
subissons les conséquences, humainement, économiquement,
socialement et moralement néfastes de cette sale crise. Dans
ces conditions, les réactions épidermiques de certains leaders
d’opinions nous paraissent irrationnelles.

Elles relèvent plutôt
de la politique politicienne que de l’analyse froide et objective
d’une situation qui recommande qu’on ne s’oppose pas par
simple envie de s’opposer. Quitte à laver le linge sale en famille
par la suite, nous devrions tous pour l’instant,observer un
comportement patriotique et avoir comme réflexe, une sorte
d’union sacrée pour conjurer la détresse de nos compatriotes.
En tous les cas, on n’a plus besoin de verres correcteurs pour
s’apercevoir que Gbagbo est le seul et unique obstacle au
règlement de la crise en Côte d’Ivoire.

Le Pays

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