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Changements climatiques : Ouagadougou prépare une riposte contre les risques

Publié le mercredi 29 avril 2009 à 02h17min

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L’insuffisance d’aménagement adéquat en voirie, caniveaux et autres infrastructures expose la capitale burkinabè, Ouagadougou aux risques climatiques. L’Institut d’application et de vulgarisation en sciences (IAVS) mène une étude pour cerner l’impact des changements climatiques et aider la municipalité à la prise de décisions.

Les changements climatiques (CC) s’imposent de plus en plus comme une évidence et constituent une menace environnementale, économique et sociétale. Le réchauffement du cycle climatique semble sans équivoque. Inondations, vagues de chaleur ou de poussière, sécheresse, hausse de température, autant d’événements extrêmes qui se succèdent et font désormais partie du quotidien des humains et plus particulièrement des Sahéliens. A Ouagadougou, leurs impacts se font sentir a priori dans les quartiers périphériques.

Démunis d’ouvrages d’assainissement et d’évacuation des eaux usées et pluviales, ces zones sont régulièrement inondées dès les premières pluies. Dans les quartiers périphériques, l’on explique les inondations par l’absence de caniveaux. "L’an passé, nous avons vécu trois mois dans une école. Toutes nos maisons sont tombées dès la première pluie", raconte Korotimi Ouédraogo, sinistrée en 2008, habitante du quartier Kouritenga. L’alternance d’inondations, de vagues de chaleur et de froids couplée au démarrage tardif des saisons et à la sécheresse montre des signes que Ouagadougou est en train de subir probablement de plein fouet l’impact des changements climatiques.

Le maire Simon Compaoré en est conscient. Il en veut pour preuve les inondations récurrentes dans la commune. "L’an passé (NDLR : en mai-juin 2008) à la première pluie, tout était inondé (NDLR : à Kouritenga, un quartier périphérique au secteur n°16)", avoue-t-il. Simon Compaoré explique que jusqu’à une période récente les gens sentaient les changements climatiques mais ne les prenaient pas comme des éléments devant figurer dans les stratégies, projets et programmes d’action mise en branle dans la perspective du développement communal.

C’est dans ce contexte que l’Institut d’application et de vulgarisation en sciences (IAVS) a décidé de consacrer une étude à la question en vue non seulement d’avoir une idée précise du climat futur mais aussi et surtout de mettre à la disposition des décideurs communaux l’information nécessaire à la prise de décision. En effet, force est de constater que les populations des quartiers pauvres sont à risque parce que l’aménagement n’y sied pas ou est simplement inexistant. "Il y a une nécessité de mettre en oeuvre des actions pour faire face aux impacts des changements climatiques sur les systèmes urbains", recommande le Dr Mathieu Badolo, directeur de l’IAVS. Cela nécessite des projections climatiques sur le moyen terme (2025 par exemple) et long terme (2100) pour avoir une idée claire du climat futur de sorte à pouvoir simuler ses impacts sur les secteurs de base (offre en eau potable, santé, infrastructures).

Pourtant, observe M. Badolo, jusqu’ici, il existe très peu de recherches sur l’incidence des CC sur les agglomérations. Cela induit que l’information locale, voire à l’échelle de la région, manque crucialement en matière d’atténuation ou d’adaptation aux CC. Toute la littérature porte ou se focalise sur l’agriculture, la sécurité alimentaire, le développement local, l’élevage. Du coup, l’IAVS fait un travail de pionnier en ce sens que les résultats doivent permettre, à l’aide de simulation de pouvoir prévoir le climat futur de la ville de Ouagadougou. Il porte pour cela sur trois axes d’intervention à savoir sensibiliser les populations sur les CC et leurs implications pour l’économie urbaine, produire des connaissances devant aider à gérer les conséquences des CC et enfin sur le renforcement les capacités des municipalités à prendre en compte les CC dans la planification du développement.

Par le biais de projections climatiques à un horizon donné, l’étude va évaluer les conséquences de ces projections sur l’offre en eau potable, sur la santé, sur les ouvrages routiers, la canalisation. "Des méthodes seront mises en place pour la prise en compte des CC dans les politiques de développement local", souligne Dr. Badolo. Il s’agit de faire de la capitale une ville sûre face aux inondations, aux risques climatiques, à la sécheresse...

Si les changements climatiques sont un phénomène global, il n’en demeure pas moins que leurs conséquences changent d’une région à l’autre, estiment les spécialistes. Il y aura une augmentation de la fréquence d’événements extrêmes comme les inondations, explique le Dr Badolo. Le transport, l’agriculture, l’élevage sont, semble-t-il, les secteurs qui contribuent plus aux changements climatiques. D’où la nécessité d’adapter ces secteurs au contexte actuel.

Produire sain suppose qu’il faut orienter les politiques et actions de développement à l’échelle internationale, régionale, nationale et locale. Pourtant, à Ouagadougou, les connaissances semblent vagues sur les changements climatiques. Hormis l’élite, le citoyen lambda a très peu d’informations sur le sujet.

Quand on interroge le Ouagalais moyen sur la définition des CC, les réponses laissent perplexes. Dans la majorité des cas, les gens sont conscients que les temps ont changé mais manquent d’information sur le sujet. "Avant quand on cultivait sur une petite parcelle, les rendements étaient meilleurs. Aujourd’hui ce n’est pas le cas", reconnaît une habitante de Kouritenga, un quartier périphérique de la capitale. Mais, elle avoue ne pas avoir d’explications aux CC.

Les changements climatiques, encore mal perçus

Les gens pensent que la variation du temps provoque des maladies. Ils ont des savoirs empiriques, voire vagues sur les CC. "Je n’ai pas d’explication aux CC. J’ai remarqué un changement du temps, c’est cela qui cause la pauvreté", avoue Mme Ouédarogo. Elle pense que les maisons en banco sont des biscuits parce qu’elles s’écroulent facilement à la moindre intempérie. Pour elle, seuls les médecins et les infirmiers peuvent aider les populations à se prémunir des effets des CC.

Selon cette autre résidante de Kouritenga, c’est la coupe abusive du bois, les feux de brousse et la prolifération des sachets noirs qui contribuent à la désertification. Mme Antoinette Kaboré confie que son mur de clôture a cédé l’an passé. Elle préconise de construire désormais les édifices avec le parpaing, plus résistant. "Nous les moins nantis avons déjà peur à l’approche des pluies. Nous prions pour que les inondations n’arrivent pas cette année", dit-elle d’un air résigné. Par contre, Mariéta Ouédraogo a une explication des CC : "le temps change par manque d’arbres." Elle propose de planter beaucoup d’arbres. Le maire Simon Compaoré voit juste lorsqu’il dit : "il faut multiplier les conférences, les rencontres dans les villages pour dire aux gens que le cycle pluviométrique a changé, donc il faut que nous changions".

Ces témoignages mettent à nu la vulnérabilité du Burkina Faso face aux CC et particulièrement de la ville de Ouagadougou. Celle-ci aura de plus en plus à gérer des situations de sécheresse et d’inondations dans la même année. C’est pourquoi, il importe d’arriver à faire une bonne projection du climat futur. Cela implique qu’il faut équiper les services météorologiques et mettre les agents à la pointe des technologies. C’est de cette façon qu’on pourra identifier les risques qui surviennent dans les zones périphériques à travers un système d’observation crédible quadrillant l’ensemble de la cité. Il faut aussi mettre en place un système d’alerte et de gestion multirisques. Pour Ouagadougou, ce processus doit porter sur la protection des personnes et des biens, suggère le Dr Badolo.

De même , les plans d’urbanisme doivent intégrer désormais les changements climatiques. "Si la mairie intègre les changements climatiques dans ses plans de développement, l’ONEA et la SONABEL suivront", estime le directeur de l’IAVS. Il soutient que les municipalités doivent agir et le faire savoir. Car dit-il, "ça va être une question de société. Les changements climatiques vont façonner notre mode de vie, d’utilisation de l’eau, de l’énergie ainsi que notre manière de nous loger et de nous alimenter", relève, Mathieu Badolo arguant que les gens ne perçoivent pas suffisamment les dangers. Autant dire que les changements climatiques induiront des changements culturels.

S.N. COULIBALY

Sidwaya

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Vos commentaires

  • Le 29 avril 2009 à 17:58 En réponse à : Changements climatiques : Ouagadougou prépare une riposte contre les risques

    C’est bien une démarche visionnaire de la part de Monsieur le Maire de Ouagadougou d’intégrer la dimension climatique dans le cadre de l’évolution de la ville de Ouagadougou.
    C’est tout aussi intéressant de savoir que sur place il y’a des structures compétentes pour traiter la question.
    Je suggère que cette démarche soit globale (c’est à dire auprès d’autres collectivités locales). Monsieur le Maire qui a un rôle prépondérant au sein de l’AMBF peut aider à la prise de conscience de cette problématique combien important. Bien sûr, les Ministères concernés par cette thématique s’impliquent déjà assez bien sur question. Nous, considérons qu’ils peuvent catalyser cette initiative qui présente un intérêt à associer le niveau local pour sa résolution.

    B. K.

  • Le 4 septembre 2009 à 14:52, par BANDAOGO Viviane En réponse à : Changements climatiques : Ouagadougou prépare une riposte contre les risques

    Je suis une des sinistrés et je pense tous ces évènements nous donne une leçon que nous retiendrons a jamais. Je rends grâce à Dieu de ’avoir laissé ce que j’ai de plus précieux dans la vie : ma vie et ma famille. Je suis étudiante en medecine à l’université de Ouagadougou, j’ai tout perdu comme bien dans l’eau : mes cours, des papiers d’identification, des meubles , des habits... Comme leçon que je retiens de ces evènements du premier septembre 2009 c’est qu’il est temps que le Burkina songe plus à un avenir architectural local ; que l’on ne construise plus pour constuire, mais plutot que l’on construise por notre sécurité et pour la securité de nos arrières. Il faudrait que la mairi songe à contruire de vrais forages à faire le curage des ces forages et surtout délégué des gens chargés de veiller à la propreté de ces édifices. Il est temps nous comprennions également que nous sommes en parti responsables de l’inondation. Il appartient à la population de maintenir propre les fossés, a la mairi de s’occuper du currage , a la methéo de prévoir et au gouvernement de s’avoir prendre des mèsures pour eviter ces types de sinistres.

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