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Mandat d’arrêt contre el-Béchir : Raison de plus pour s’accrocher au pouvoir

Publié le vendredi 6 mars 2009 à 01h32min

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Le juge Luis Moreno Ocampo, qui conduit la Cour pénale internationale, vient donc, depuis le 4 mars 2009, d’alpaguer un client de premier choix : le chef de l’Etat soudanais, Omar el-Béchir, accusé de crimes de guerre, crimes contre l’humanité, la Cour ayant laissé tombé l’accusation de génocide. Une petite victoire pour cet homme qu’on dit obstiné et méticuleux (il l’avait prouvé avec le dossier MBemba que ses fins limiers ont suivi à la trace jusqu’à son arrestation dans la banlieue bruxelloise) qui avait demandé depuis le 14 juillet 2008 que le président soudanais vienne répondre de ses forfaitures contre les Darfouris.

Un grand événement dans la justice internationale, car ce n’est pas tous les matins qu’un président en exercice d’un Etat est inculpé. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle on a assisté à des tergiversations, des pressions et des négociations tous azimuts pour que la CPI ne mette pas el- Béchir dans sa lorgnette. Même l’intéressé a usé de beaucoup d’actions pour éviter que le couperet tombe, et on se rappelle que, récemment, il a sollicité les bons offices du raïs d’Egypte, Hosni Moubarak, et, dans une moindre mesure, ceux de la France pour échapper à cette sanction.

En vain !
Comme on le dit chez les latins, « alea jacta est », le sort en est jeté pour cet homme trapu au regard terrible et au sourire carnassier et dont les proches redoutent les colères, homériques. A présent, que va faire l’homme fort de Khartoum ?

Bien sûr, il y a ses éeternels amis, tels la Chine qui exige de la CPI de faire machine arrière, puisque, pas plus tard qu’au lendemain de cette inculpation, le pays de Mao, par la voix du porte-parole du ministère des Affaires étrangères, brandit les menaces que font planer ce mandat sur « les efforts de paix au Soudan et au Darfour ».

C’est connu que l’Empire du milieu n’est pas trop regardant sur la démocratie et les droits de l’homme, mais les juteux contrats d’exploitation des gisements pétroliers qu’il a obtenus d’el-Béchir peuvent expliquer aussi ce soutien. Le premier magistrat du Soudan sait également qu’il peut compter sur une bonne partie de ses pairs africains, peu prompts à livrer l’un des leurs à la justice européenne, car « ça n’arrive pas seulement aux autres ». Mais ce mandat va sans doute développer ou exacerber trois choses chez el-Béchir :

Primo, c’est l’occasion rêvée pour l’intéressé de rester scotché au pouvoir, car au moins il bénéficie de l’immunité que lui confère la fonction, et, quoi qu’on dise, ce n’est pas aisé pour une justice, fût-elle internationale, d’aller empoigner un chef d’Etat chez lui. Seul désagrément : la limitation de ses déplacements, car ce mandat est en même temps assorti d’un Travel band (interdiction de voyager) sous peine de se faire arrêter lors d’une sortie dans un aéroport européen ou pendant un séjour pour un cheik up.

Secondo, les ONG, dont une dizaine a déjà été sommée de quitter le pays, vont en pâtir, car ces représentants de la société civile, accusés à tort ou à raison d’être souvent des officines de la subversion et de l’espionnage, constituent, à n’en pas douter, des contre-pouvoirs, à tout le moins des empêcheurs de massacrer. Le départ d’une organisation comme Médecins sans frontières (MSF), qui fait partie des expulsés, va affecter des milliers de personnes dans un Darfour qui compte déjà 300 000 victimes selon certaines sources et 2,5 millions de déplacés.

Tertio, la répression contre les pauvres Darfouris va s’accentuer et ce sera un massacre à huis clos, car aucun œil extérieur n’est présent, et seule va prévaloir la loi des Djawdjawids, ces cavaliers arabes de l’apocalypse pour les Noirs de la région. Bref, ce mandat contre El Béchir repose le choix cornélien qu’il faut faire entre la justice et la paix.

Par Zowenmanogo Dieudonné zoungrana

L’Observateur paalga

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