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Guinée -Bissau : De nouveau engluée dans la violence

Publié le mardi 3 mars 2009 à 04h55min

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Presque tous ceux qui ont été une fois en Guinée-Bissau sont formels : ce qui frappe lorsqu’on arrive à Bissau, la capitale, c’est ce mélange de climat de tranquillité et d’air de forteresse assiégée. Côté pile, la vie s’y déroule sans grand accroc, les marchés, tout comme les petites épiceries, offrent une grande variété de produits. Mais, côté face de ce cadre presque idyllique, sautent aux yeux les stigmates de cette absurde guerre qui, 11 années durant, a ravagé ce pays de 36120 km2 où vivent 1,6 million d’âmes - la population d’une ville comme Ouagadougou en fait -. C’est un spectacle fait de carcasses de chars par-ci et de murs calcinés de quelques édifices publics par-là.

C’est dans cette atmosphère de conflit presque permanent où la Grande Muette semble toujours jouer le beau rôle, qu’est intervenu, hier lundi, l’assassinat du président Joao Bernardo Vieira, précédé, la veille, de l’exécution de son chef d’état- major, le général Tagmé Na Waié

A entendre Zamura Induta, le chargé des Relations extérieures de l’armée, c’est après l’attentat qui a coûté la vie dimanche dernier au chef d’état-major de l’armée, et dont le président Nino Vieira serait le principal responsable, que ce dernier a, à son tour, été tué par les proches du défunt général, au moment où il tentait de fuir sa maison.

On se souvient en effet que ce chef d’état-major de l’armée Bissau guinéenne avait été mortellement blessé dimanche 1er mars dernier aux environs de 20 heures dans un attentat à la bombe contre le quartier général de l’armée.

Le moins que l’on puisse dire, c’est qu’entre ces chefs militaires, c’est-à-dire, le président Vieira et son chef d’état-major, ce n’était aucunement le parfait amour, c’était même à qui dégainerait le premier, puisque, pas plus tard qu’en janvier dernier, des militaires non formellement identifiés mais qui, selon certaines sources, seraient à la solde de l’homme fort de Bissau, avaient ouvert le feu au passage du véhicule du général Tagmé.

Ainsi, Nino Vieira a eu la peau de son général dimanche, pour être abattu le lendemain lundi par les hommes de ce dernier. Au pays d’Amilcar Cabral, les militaires sont réputés avoir la gâchette facile.

Ancienne colonie portugaise, la Guinée-Bissau accède à l’indépendance en 1974 après une guerre de libération menée par le Parti africain pour l’indépendance de la Guinée Bissau et du Cap-Vert (PAIGC), dont l’objectif était aussi d’unifier les deux pays.

Et l’histoire retiendra que c’est le général Vieira qui a perpétré le premier coup d’Etat en Guinée-Bissau en novembre 1980, au cours duquel il renversera sans effusion de sang le régime dirigé par Luis Cabral, frère d’Amilcar, le fondateur et dirigeant du PAIGC jusqu’à son assassinat le 20 janvier 1973 à Conakry.

Le coup d’Etat de Nino Vieira en 1980, on s’en souvient, avait été froidement accueilli du côté du Cap-Vert, ce qui avait entraîné la scission de ce parti binational qu’est le PAIGC et l’abandon du projet d’unification des deux pays.

Mais au fait qui était cet ex-putschiste à l’air austère et cet héros de la résistance qui présida de façon calamiteuse aux destinées de la Guinée-Bissau durant deux décennies et qui est passé de vie à trépas hier ?

Pour ses biographes, Joao Bernardo Vieira est né le 27 avril 1939 à Bissau. Electricien de formation, il rejoint en 1960 le PAIGC, où il joue un rôle déterminant dans la guerre contre l’occupant portugais. Président de l’Assemblée dès 1972 et Premier ministre à partir du 28 septembre 1978, il profita du mécontentement général de la population vis-à-vis de l’Exécutif pour usurper le pouvoir d’Etat. C’était le 14 novembre 1980.

Après avoir dirigé le pays 19 années durant, c’est-à-dire de 1980 à 1999, Nino, qui n’a jamais pensée prendre sa retraite de la scène politique, aura incontestablement fait le mandat de trop lorsqu’il retrouva - après un exil de six ans au Portugal et non sans avoir demandé pardon à son peuple - ses habits de président de la République, démocratiquement élu, le 1er octobre 2005 à l’issue de sa victoire au scrutin du 24 juillet sur son adversaire Malam Bacai Sanha.

En dépit de sa longue expérience du pouvoir, le général Vieira est resté, pour les observateurs de la scène politique Bissau guinéenne, plus un chef de guerre ou, disons-le, un chef de clan qu’un véritable manager d’un Etat moderne.

Et l’armée est fortement divisée en chapelles qui s’observent en chiens de faïence et tentent, chaque fois que l’occasion semble propice, de s’emparer du pouvoir d’Etat ; au besoin par la violence. C’est ainsi que, sur fond de marasme économique, de corruption généralisée, de dysfonctionnement de la Fonction publique et de paralysie de l’appareil administratif, le pays semble vivre au ralenti.

A cela s’ajoutent des violations constantes des droits humains, aggravées par la montée du crime organisé. Le tableau ainsi peint serait incomplet si on omettait de mentionner le trafic de drogue, qui fait de la Guinée-Bissau une des plus grandes plaques tournantes, à l’échelle sous-régionale, de ce commerce illicite.

Ainsi, selon les spécialistes des stupéfiants, la Guinée-Bissau fait partie, avec le Sénégal et le Cap-Vert, du « triangle blanc » du trafic de la cocaïne entre l’Amérique latine et l’Europe, par lequel transitent chaque année quelque 250 tonnes de drogue. Cette instabilité politique a largement déteint sur la sphère économique, et la pauvreté n’a cessé de gagner du terrain au pays du président Kumba Yalla.

Et, comme un malheur ne vient jamais seul, ce pays, qui est un grand producteur d’arachide et le 6e producteur mondial de noix de cajou (90% des recettes d’exportations), a connu quelques mauvaises campagnes de commercialisation, lesquelles ont fortement affecté l’économie et aggravé le déséquilibre de sa balance commerciale.

Certes, le tourisme et les richesses halieutiques de ce pays, dont les eaux comptent parmi les plus poissonneuses de la planète, sont autant de facteurs qui peuvent booster le secteur économique. Mais ce n’est pas demain la veille, car après avoir conquis leur indépendance, les Bissau Guinéens ont tout un autre défi à relever, celui de la stabilité politique.

Boureima Diallo

L’Observateur Paalga

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Vos commentaires

  • Le 3 mars 2009 à 16:25 En réponse à : Guinée -Bissau : De nouveau engluée dans la violence

    Honnetement, c’etait cool, ca. Deux chefs de guerre qui croient que chacun a le monopole de la violence. Qu’ ils aillent s’ expliquer tous les deux devant Dieu de tous les malheurs qu’ ils ont fait au peuple paisible de la Guinee- Bissau et que les presidents africains qui pensent qu’ ils sont nes pour gouverner a vie sachent que les longs mandats conduisent tout droit a la violence politique dont eux- memes ne sont pas sur de sortir. Tu as fait eclater la bombe sur l’ autre et quand one st venu te chercher tu veux courir. Regardez moi ca des egorgeurs qui ont peur du couteau. je ne plains meme pas un d’ entre ces 2 chefs de guerre. C’est le peuple de la Guinee- Bissau le vrai perdant.

  • Le 3 mars 2009 à 19:39, par Dada En réponse à : Guinée -Bissau : De nouveau engluée dans la violence

    C’est au president Compaore que tu parles en douce, alors dis le clairement, tu sais bien qu,ils sont tous sourdes

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