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Procès Hissène Habré : Le Sénégal traîne toujours les pieds

Publié le jeudi 26 février 2009 à 00h08min

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C’est ainsi. Hissène Habré, l’ex-dictateur tchadien réfugié depuis 18 ans au Sénégal, continue en toute impunité de se prélasser à Dakar où son long feuilleton politico-judiciaire ne cesse d’alimenter les débats. Poursuivi pour torture et crimes contre l’humanité depuis le printemps 2000 par suite de plaintes déposées par plusieurs victimes et organisations au Tchad, au Sénégal et en Belgique, le prédécesseur d’Idris Deby reste à bien d’égards un concentré de ressentiments de toute l’Afrique militante face à ses tyrans.

Mais depuis, Dakar ne cesse de traîner les pieds pour mettre en œuvre ce légitime souhait de voir enfin l’ex-président tchadien passer à la barre. En effet, depuis que l’Union africaine (devenue en février 2009 Autorité africaine) a donné mandat au Sénégal de faire juger au nom de l’Afrique cet ex-dictateur, le pays d’Abdoulaye Wade semble faire du surplace.

Certes, devant les bailleurs de fonds et des organisations de défense des droits de l’homme comme Human Rights et la Rencontre africaine des droits de l’homme (RADDHO), que dirige le truculent Alioune Tine, le ministre sénégalais de la Justice, Madické Niang, avait juré la main sur le cœur que tout était enclenché pour que le procès tant attendu voie le jour.

Et pour apporter de l’eau au moulin de son ministre, Demba Kandji, le directeur des Affaires criminelles et des Grâces du ministère de la Justice, avait dit tout haut que son pays, le Sénégal, était désormais bien décidé à trouver une issue judiciaire à ce dossier.

Mais force est de constater que depuis quatre ans, hormis les grands discours, aucune procédure, rien de tangible n’a été entamé pour faire comparaître ce triste dictateur. Mais à y voir de près, l’attitude de Dakar pourrait se comprendre, même si elle ne résiste pas à la moindre analyse.

En effet, si Dakar traîne ainsi les pieds, ce pourrait être parce que : Primo : Me Madické Niang, l’actuel ministre de la Justice, avant d’entrer au gouvernement, était, souvenons-nous, l’avocat d’Hissène Habré ; secundo : Hissène Habré, en convolant en justes noces avec une ravissante Sénégalaise, est devenu un Sénégalais par alliance. Et le pays de Senghor serait quelque peu embarrassé de juger ainsi son propre « citoyen ».

Mais véritablement, nous n’apprendrons rien au célèbre agrégé de droit et universitaire réputé qu’est Abdoulaye Wade, en disant qu’il a la possibilité de refiler cette patate chaude à l’Union africaine. En droit, semble-t-il, on appelle cela se déporter. Mais ce que l’on constate, c’est que non seulement le Sénégal ne veut pas se dessaisir de ce dossier brûlant, mais aussi et surtout, il ne veut le refiler à aucun autre …pour jugement.

On se souvient aussi qu’au titre de sa compétence universelle, la justice belge avait émis, en 2005, un mandat d’arrêt international contre Habré, mais Dakar s’était opposé à l’extradition du célèbre dictateur et était allé même solliciter l’aval de l’Union africaine pour pouvoir juger Hissène Habré sur son sol.

Aujourd’hui, le Sénégal est monté d’un cran dans la manifestation de sa mauvaise foi de voir ce dossier connaître une heureuse issue judiciaire. En effet, dans son interview publiée par le journal espagnol Publico en octobre dernier, Me Abdoulaye Wade conditionnait la tenue du procès à son financement par la communauté internationale, à hauteur d’une vingtaine de milliards de nos francs.

Et en dépit de la mise à la disposition du Sénégal par l’UE d’une enveloppe de 1,3 milliard pour la phase initiale de l’instruction, de l’annonce de la participation du Tchad à hauteur de 2 milliards de FCFA et de la décision réaffirmée de la France, de la Suisse, de la Belgique et de la Hollande de mettre la main à la poche à cet effet, le pays d’adoption du dictateur tchadien ne tarit pas d’arguties pour toujours renvoyer cette affaire aux calendes grecques.

Décidément, quoi qu’on fasse, on finit par se lasser de vouloir parler à celui qui ne veut rien entendre. Ça semble être la stratégie adoptée par Dakar sur ce dossier.

Boureima Diallo

L’Observateur Paalga

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