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CONTINGENT AFRICAIN EN SOMALIE : Comment sortir du bourbier ?

Publié le mardi 24 février 2009 à 00h18min

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C’est un véritable coup dur pour la force de paix de l’Union africaine en Somalie (AMISSOM). Onze soldats burundais de la force ont été tués et 15 autres blessés dans un attentat suicide contre leur camp à Mogadiscio. Ce n’est pas la première attaque du genre et il est fort à craindre que ce ne soit malheureusement pas la dernière, les insurgés islamistes (les shebabs) ayant promis de montrer à cette force de quel bois du grand enfer somalien ils se chauffent.

Et ce ne sont pas les moyens de faire payer à l’AMISSON l’occupation de son "territoire", qui manquent, les troupes éthiopiennes, seules capables, à l’époque, de lui opposer une résistance farouche, ayant finalement plié bagages. Mais, il y a bien plus grave. La force de paix de l’UA en Somalie, constituée de quelque 3 mille hommes (ougandais et burundais), loin des 8.000 hommes initialement prévus, reste mal équipée et sous-financée. Qui plus est, son mandat est limité, la mettant dans une position où elle se voit contrainte de croiser les bras, du moins de se garder d’intervenir dans les combats menés par les insurgés islamiques. Mais que faire quand ce sont ses propres installations qui sont maintenant attaquées ? Comment sortir du bourbier somalien ? Une chose est certaine : pour le soldat de la force de paix africaine, ce serait courir au suicide que de devoir croiser les bras, en attendant que la mort le surprenne.

C’est pourquoi la demande pressante des autorités burundaises pour que l’UA révise le mandat actuel de l’AMISSON, de sorte que ses troupes puissent se défendre contre l’ennemi, en cas d’agression, a tout d’une réaction sensée. Certes, les soldats peuvent donner l’impression d’avoir un moral d’acier. Mais jusqu’à quand pourront-ils tenir le coup, s’ils doivent toujours admettre que la mort rôde, au quotidien, autour de leurs casernes ? Bref, c’est dire combien l’UA doit considérer, avec le plus grand sérieux, les doléances formulées par le Burundi dans cette guerre qui n’est pas la sienne, si elle ne veut pas assister au départ anticipé de la force de paix. D’ailleurs, une partie de l’opinion nationale burundaise n’a pas tardé à s’interroger sur l’opportunité d’un tel déploiement, qui commence à coûter très cher, en termes de vies humaines, aux deux pays engagés sur le terrain. En tout état de cause, l’UA n’a aucun intérêt à assister à un retrait précipité des forces de l’UA en Somalie, qui annoncerait un désastre certain.

L’organisation panafricaine doit plutôt travailler à la consolidation des acquis, en commençant par réunir toutes les conditions d’une meilleure réussite de sa mission. Autrement, ce serait l’échec total, qui se mesurerait à un double niveau. Non seulement, l’AMISSON se présentera ainsi comme une force incapable de sécuriser des populations qu’elle est pourtant censée protéger, mais aussi de se défendre elle-même. Et dans pareil cas, ce ne seront pas les Etats-Unis, bien que soucieux de protéger leurs intérêts dans cette région hautement stratégique, ni un autre pays de l’Occident, qui s’aventureront dans ce bourbier, le traumatisme profond de 1991 (opération Restore Hope) étant toujours présent dans les esprits. Voilà donc environ deux décennies que la paix reste toujours introuvable en Somalie. Sans doute faut-il expliquer cela par la guerre par procuration que se livrent l’Erythrée et l’Ethiopie sur le sol somalien.

Jusque-là, en tout cas, rien n’a réussi à amener ce pays à se tracer définitivement les voies d’une réconciliation durable et d’une paix véritable. Même les Etats-Unis, en dépit de tous les moyens qu’ils avaient en leur possession pour mener la guerre contre le terrorisme par l’Ethiopie interposée, n’ont pas réussi à faire plier les insurgés islamistes car, telle une hydre, ils ont toujours su rebondir chaque fois qu’on les croyait sur la pente raide. Il faut dire que l’axe du Mal contre celui du Bien, sorti tout droit de l’imaginaire abscons de l’ancien président américain George W. Bush, n’a pas contribué à rapprocher "deux civilisations" dont on a voulu que tout oppose. Bien au contraire. On sait jusqu’où cette politique a mené. En tout état de cause, l’argument de la force, comme celle qui a été affichée à travers l’opération Restore Hope, n’a jamais payé. Seule la solution du dialogue est la meilleure option.

C’est une voie que l’UA devrait travailler à davantage explorer. Les insurgés islamistes qui continuent à faire régner la terreur dans ce pays, ne sont pas des enfants de chœur, certes. Mais on peut toujours croire qu’ils peuvent être capables du pire, comme du meilleur. Sans doute tout dépend-il de la façon dont il faut les approcher. L’hypothèse d’une paix en Somalie est-elle encore plausible ? Si on ne peut apporter une réponse claire et définitive à cette interrogation, on peut cependant affirmer que toute solution à la crise somalienne passe d’abord par la résolution des nombreux problèmes qui assaillent une jeunesse somalienne en perte de repères, cible facile, on le comprend, des corsaires des temps modernes et de tous les "fous de Dieu".

"Le Pays"

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