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Crise ivoirienne : Rendez-vous après Addis

Publié le mardi 6 juillet 2004 à 07h49min

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Voilà un peu plus de deux mois que la situation sociopolitique est troublée en Côte d’Ivoire avec le renvoi sine die de certains ministres du gouvernement par le président Laurent Gbagbo. Depuis, les bonnes volontés n’ont pas manqué pour ramener les choses dans l’ordre ; la médiation du président gabonais Omar Bongo Odimba apparaissant après tant de tractations, comme celle de la dernière chance.

La résolution de la crise ivoirienne figure en bonne place dans l’agenda des travaux de la 3e session ordinaire de l’Union africaine qui se tient à Addis-Abéba du 6 au 8 juillet prochains. Avec le conflit du Darfour et la mise en marche effective des organes de la Commission de l’Union, elle constituera même le plat de résistance de ce Sommet. Le président de la Commission, Alpha Oumar Konaré ayant, dès sa prise de fonction, fait de la Côte d’Ivoire, une priorité de son mandat. Un huis clos des chefs d’Etat concernés directement par cette crise, élargi à certains de leurs pairs, est donc prévu à Addis pour poser les jalons d’une sortie de crise rapide en Côte d’Ivoire.

Sans être grand clerc, on peut affirmer que l’essentiel des débats s’articulera autour de l’application stricte des Accords de Linas-Marcoussis, référentiel commun librement consenti par toutes les forces politiques ivoiriennes en janvier 2003. Et comme il est de coutume en Afrique, il sera fait aussi appel à la sagesse et à l’esprit de tolérance des forces en conflit pour que cette crise qui n’a que trop duré cesse.

Abandonner les circonlocutions diplomatiques

Cependant, le "dessert", c’est-à-dire la fin de la crise nous sera probablement servi ailleurs (en Afrique en tout cas) avec le président Omar Bongo dans le rôle de maître d’œuvre. Ainsi en ont convenu nos chefs d’Etat, et l’homme fort de Libreville s’est déjà investi dans son rôle de médiateur de la dernière chance. C’est ainsi qu’après avoir rencontré le président Laurent Gbagbo, il a pris langue avec le G7 (l’opposition non-armée au président Gbagbo) et les Forces nouvelles, pour s’imprégner des attentes de chacun avant le "grand" jour. Un signe qui ne trompe pas dans la volonté de Bongo "d’en finir une fois pour toutes" ; même Alassane Ouattara d’ordinaire si discret, a effectué le voyage de Libreville. Et Bongo lui-même a renforcé cet optimisme en affirmant qu’il ne s’engageait pas pour "rien" dans une affaire. Seul bémol, les protagonistes restent campés sur leurs positions.

C’est ainsi que lors de sa rencontre avec le G7, la semaine dernière, Gbagbo a déclaré qu’il avait "déjà beaucoup fait pour la paix". En réponse, le G7 a dit que la "réintégration" des ministres "déflatés" était la condition sine qua non de la reprise du dialogue. Quant aux Forces nouvelles, elles ont enfoncé le clou de la discorde en refusant de se rendre en "territoire ennemi", tout en affirmant que "Gbagbo est le principal obstacle à la paix". Et sans abonder dans leur sens, force est de reconnaître que le chef de l’Etat ivoirien, apparaît plus qu’isolé sur l’échiquier politique de son pays.

Cerné par les faucons de son camp qui voient dans l’application de Marcoussis une "violation de la constitution et une capitulation" (sic). Obnubilé par les nombreux charniers qui ont jalonné son court règne, le président Gbagbo voit dans la normalisation de la situation politique, le début d’un probable cauchemar. Il n’est pas sûr en effet qu’il échappe aux "fourches candines" de la justice internationale, sa responsabilité où, à tout le moins celle de tiers qu’il a commis, étant clairement établie dans les charniers des 25 et 26 mars 2004. Et, si en fin 2003, Blaise Compaoré a dit tout haut ce que chacun pensait tout bas (pour le président du Faso, Gbagbo comme Milosevic "finira devant le tribunal pénal international"), c’est que le régime ivoirien n’était pas blanc comme neige dans les charniers commis antérieurement (Yopougon notamment).

Et, c’est en cela que pour que le Sommet de la dernière chance réussisse, il faudra contraindre tout le monde à appliquer Marcoussis, même si certains y laisseront des plumes. Cela apaiserait par ailleurs, certains voisins de la Côte d’ivoire, si tant est que cet accord prévoit également la suppression ou la rention des lois scélérates (code de la nationalité, code foncier...), instruments de spoliation de leurs compatriotes en Côte d’Ivoire.

En un mot, la diplomatie "corporatiste" qui a cours jusque-là malheureusement sur le continent, devra céder le pas à l’intérêt du peuple ivoirien et à celui des peuples de la sous-région. C’est dire que l’après-Addis est attendu par tous.

Boubakar SY
Sidwaya

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