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Madagascar : Le pire est à craindre

Publié le jeudi 29 janvier 2009 à 02h05min

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On le redoutait et il a fini par arriver : la grande île, Madagascar, est en train de basculer dans une période d’incertitude avec en toile de fond, cette espèce de combat de gladiateurs politiques que se livrent le Maire d’Antananarivo, Andry Rajoelina, et le président malgache, Marc Ravalomanana.

La pomme de discorde, c’est la décision du gouvernement de fermer la station de télévision du maire au motif qu’il a diffusé une interview de l’ancien président en exil, Didier Ratsiraka, en décembre dernier. A cela viennent s’ajouter d’autres griefs comme la mauvaise gestion des deniers (achat d’un avion présidentiel à plus de 60 millions de dollars) et du patrimoine (la vente de vastes terres à des entrepreneurs coréens) publics.

A l’appel du maire rebelle, les foules ont déferlé lundi dans les rues de la capitale. La manifestation a vite dégénéré et s’est transformée en une géante scène de pillage et de saccage des magasins, boutiques et d’édifices publics dont la radio nationale. Les événements se sont soldés par plus de 35 morts. Mardi, un calme précaire a régné sur la grande île. Un calme qui présage une tempête future ?

Toujours est-il que Rajoelina a encore réuni dix mille de ses partisans hier à la place du 13-Mai, ce haut lieu de la contestation malgache. Devant une foule acquise, il a déclaré que ce jeudi serait une journée ville morte à Antananarivo.

Il a lancé un ultimatum au gouvernement afin que soit retrouvé, jugés et condamnés aux travaux forcés ceux qui ont tué par balle un adolescent lors des manifestations de lundi. Il a surtout prévenu que « samedi nous serons tous ici, sur la place du 13-Mai ». Et le moins que l’on puisse dire, c’est que ses ambitions sont claires : « Nous allons prendre le pouvoir dans le calme et mettre sur pied une autorité de transition. Ravalomanana sous-estime la force du peuple uni ».

Des ambitions qu’il a dévoilées un peu lundi en ces termes : « Le pouvoir appartient au peuple, il peut se l’accaparer. Partout dans le monde, aucune force militaire n’a réussi à vaincre la force de la population. Il y a beaucoup trop de prisonniers politiques, et quand je serai au pouvoir, ils seront tous libérés sauf les assassins ».

C’est clair, il y a une profonde crise politique et sociale qui couve dans ce pays. C’est ce qui explique l’inertie du pouvoir face aux dérives de lundi dernier. Mais dans tout ça, ce qui étonne plus d’une personne, c’est le courage et la marge de manœuvre dont dispose ce jeune bourgmestre.

Cette situation traduit à suffisance la déliquescence de l’Etat malgache et prouve que Marc Ravalomanana ne maîtrise plus le pays. Le président serait-il davantage préoccupé de jouir de son pouvoir que de résoudre les problèmes quotidiens qui tenaillent ses compatriotes ?

Ailleurs, pour moins que ça, Rajoelina serait rapidement débarqué de son poste, des juges de service auraient aussitôt enclenché à son encontre des procédures judicaires taillées sur mesure. Quant à sa commune, elle serait érigée en délégation spéciale, le temps de préparer une bouillabaisse électorale pour la faire basculer en fin du côté du parti majoritaire.

Autre chose qui peut nous abasourdir, c’est le fait que Ravalomanana se concentre sur Roland Ratsiraka, le neveu de l’ancien président Didier, qu’il accuse d’être le cerveau de ces mouvements de contestations. D’ailleurs, le président a annoncé qu’un mandat d’arrêt serait lancé contre Roland.

« C’est Roland le cerveau. Il faut le chercher et le maîtriser tout de suite ». Difficile de comprendre cette attitude, car Marc semble vouloir poursuivre l’ombre plutôt que la proie. En effet, c’est plus facile d’arrêter quelqu’un qui est à l’intérieur du pays que quelqu’un qui est à l’extérieur. A moins que ce ne soit la parfaite illustration de l’adage populaire qui dit que « lorsqu’une bagarre éclate au marché, chacun attaque celui qu’il croit pouvoir battre ».

Ravalomanana ne le sait peut-être pas, mais on ne s’amuse pas avec le pouvoir. Il pourrait facilement perdre une chose qu’il a difficilement conquise. Ce serait alors le retour de la manivelle, car on s’en souvient, c’est par la rue qu’il a pu s’imposer face au président Didier Ratsiraka. Comme en Thaïlande, le peuple malgache semble avoir pris goût aux longues manifestations pour faire aboutir ses causes. Et c’est pour cela que l’actuel président aurait tort de sous-estimer cette révolte menée par le maire Rajoelina.

Mais plus que tout, ce dont Madagascar a besoin, ce ne sont pas les combats pour les intérêts égoïstes et partisans, mais bien les combats sur les chantiers du développement. Malheureusement, l’horizon n’est pas rose du côté de la grande île, puisqu’aucune rencontre ne semble prévue entre le maire et le président. Dans ces conditions, difficile de prédire l’issue de ce bras de fer.

San Evariste Barro

L’Observateur Paalga

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Vos commentaires

  • Le 29 janvier 2009 à 06:16, par chacha En réponse à : Madagascar : Le pire est à craindre

    ceci est sûrement un mouvement longuement préparé ; le maire d’antananarivo n’est probablement qu’une toute petite partie d’un iceberg ; il n’est qu’une façade ; ravalomanana a méprisé les malgaches ; il le paie ; peut-être que le point de non retour est passé et que nous assistons déjà aux derniers moments de la présidence de marc ravalomanana

  • Le 29 janvier 2009 à 18:04, par kenfo En réponse à : Madagascar : Le pire est à craindre

    Dans de pareille situtation, l’armée reste la seule refuge, même pour L’UE et UA et L’ONU. Elles attendent que l’armée prennes ses reponsbilités, pour y aller. Pauvres de nous !!

    Kenfo

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