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MULTITUDE DES PARTIS POLITIQUES AU BURKINA : Arrêter le cirque !

Publié le vendredi 19 décembre 2008 à 01h58min

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Avec plus de cent partis politiques, il est aisé de calculer le nombre de partis que compte le Burkina au kilomètre carré. Il serait dans le peloton de tête en Afrique, et pourquoi pas dans le monde. Le summun de l’aberration sera atteint lorsqu’on vous dira que les responsables de certains de ces partis ont déclaré dès leur constitution qu’ils soutiennent un parti déjà existant, en l’occurrence le parti au pouvoir. Pourquoi créer un parti politique si toutes ses ambitions se limitent à apporter un soutien à un autre parti politique ?

On peut deviner à travers les motivations de ces leaders politiques, des objectifs bassement matériels. L’autre dirait qu’ils sont mus par des motivations "oesophagiques", "tubes-digestivistes". L’illustration est donnée par les déchirures observées lors du déblocage par l’Etat des subventions accordées aux partis pour leur participation à l’animation de la vie politique. En fait d’animation, il n’en est rien.

Faut-il continuer à regarder proliférer les partis politiques au risque de devenir la risée du reste du monde ? Ne faut-il pas arrêter le cirque ? Le Burkina, jusqu’à une époque récente, était réputé pour sa pondération, son attachement à l’ordre et à la discipline. C’est pourquoi, il est plus que temps de penser à mettre de l’ordre dans la création de partis politiques dont certains responsables ont de la peine à en définir la ligne politique, encore moins l’idéologie. Car, ce n’est pas le nombre élevé de partis qui apportera une quelconque crédibilité à notre démocratie. Au contraire, la floraison des partis politiques rend le jeu démocratique trouble. Bien sûr que ce clair- obscur profite à quelqu’un, notamment au parti au pouvoir qui est arrivé à atomiser comme il le veut les acteurs politiques et décridibiliser complètement ses adversaires, les partis d’opposition. Or, sans une opposition forte et bien structurée, le pouvoir dans ce pays fera toujours l’objet de soupçons. Par exemple, ce jeu de clair- obscur rend ardue la désignation d’un chef de file de l’opposition.

L’Alliance pour la démocratie et la fédération/ Rassemblement démocratique africain (ADF/RDA) de Me Gilbert Ouédraogo à qui revenait normalement ce rôle, a déclaré qu’elle supportait le programme du président Blaise Compaoré, le candidat présenté et soutenu par le Congrès pour la démocratie et le progrès (CDP), le parti au pouvoir depuis deux décennies. Cette position brouille la ligne entre la majorité et l’opposition. Il y a un autre très important qui commande qu’on limite le nombre des formations politiques au Burkina : le coût des élections. Imprimer les bulletins d’une centaine de partis coûte cher, sans oublier la subvention accordée à chacun pour faire sa campagne. Certes, on répliquera que la démocratie n’a pas de prix et que la liberté est donnée à chacun de créer un parti.

Ce qui est vrai. Mais une démocratie qui ne doit son existence et sa survie qu’à des subterfuges, à une multitude de partis, n’est qu’une démocratie de façade, une démocratie incapable de penser le développement. En effet, ce genre de pouvoir consacre beaucoup de moyens et de temps pour se maintenir. Le sentiment de fatalisme politique dans lequel vit aujourd’hui la grande majorité des Burkinabè tire sa justification dans ce jeu obscur de certains acteurs politiques. Il y a des opposants et des oppositions qui refusent de s’afficher, parce que les leaders veulent manger à tous les râteliers. Il y en a qui ont prétexté la sauvegarde du climat social pour ne pas se démasquer. Toutefois, sans une opposition responsable, intelligente et crédible, il n’y aura jamais de démocratie véritable donc pas de développement conséquent.

Des personnes ont souvent vu dans la prolifération des partis politiques au Burkina, le désir d’oeuvrer pour l’avènement d’une démocratie inclusive. C’est un faux- fuyant, car le désordre et l’indiscipline constatés en matière de création de partis politiques ne sont ni propices à l’éclosion d’une démocratie consensuelle, ni à la promotion du développement. Il serait injuste d’affirmer sans une nuance que c’est parce que le pouvoir profite de l’émiettement des acteurs politiques qu’il assiste sans rien dire à la prolifération incontrôlée et incontrôlable des partis politiques. L’opposition a aussi sa part de responsabilité. Les partis sankaristes en sont une preuve vivante. De combien de partis a-t-on besoin pour défendre et pérenniser les idées et les idéaux du président du Conseil national de la Révolution, le capitaine Thomas Sankara ?

Quelles divergences idéologiques opposent les différents partis, se réclamant de l’idéal sankariste ? Peu, à y penser sérieusement ! Mais, comme on dit chez nous, on préfère être la tête d’une mouche que la queue d’un cheval. Il serait question, à l’heure actuelle, de travailler pour apporter plus d’ordre et de discipline dans l’existence des partis. Cette mesure pourrait donner plus de visibilité, mais surtout de la crédibilité, aux hommes politiques burkinabè. On peut toutefois faire remarquer que ce souci est né après que le parti au pouvoir a fini d’affaiblir les autres partis, en encourageant les scissions et les départs massifs de militants en leur sein. Il n’a donc plus rien à craindre.

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