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ASSASSINATS DE JOURNALISTES EN RDC : Une guerre sans témoins

Publié le mardi 25 novembre 2008 à 00h44min

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Les soldats ne sont pas les seules victimes de la guerre en RD Congo. Outre de nombreuses populations civiles contraintes à l’exode face aux combats et aux exactions, une autre catégorie de Congolais paie le prix fort de cette guerre absurde. Il s’agit des journalistes, devenus une cible de choix depuis quelques années. La série noire s’est poursuivie dimanche dernier avec l’assassinat d’un journaliste de Radio Okapi.

Mais comme pour les autres meurtres d’hommes de presse, la même question revient, lancinante : qui a fait ça et pourquoi ? Les procès tenus jusque-là n’ont jamais permis d’élucider les crimes. Dans ce pays en guerre, il semble que la justice soit une denrée précieuse à laquelle n’ont pas droit les journalistes. Evidemment, cette impunité encourage les dérives de tous ordres. Le cas de la radio Okapi est d’ailleurs inquiétant parce que ce média vient d’enregistrer avec Didace Namujimbo sa deuxième victime tuée par balles. Pourquoi le sort s’acharne-t-il de façon accentuée sur cette radio ? Simple fait du hasard ou stratégie élaborée de meurtres ?

L’assassinat de Namujimbo intervient en tout cas à un moment difficile pour la MONUC, la force des Nations unies chargée de la paix en RDC, et qui finance justement radio Okapi. Voudrait-on intimider les journalistes de cette station qu’on ne s’y prendrait pas autrement. Avec les moyens dont elle dispose, cette radio peut porter partout en RDC le message de la MONUC. Les auteurs des crimes contre les journalistes visent-ils la radio et indirectement la MONUC dont elle est le porte-voix ? Ces derniers temps, les casques bleus se sont fait beaucoup d’ennemis. Les populations ne font plus confiance aux forces onusiennes qui se sont montrées incapables de les protéger.Cette exaspération s’est du reste manifestée avec le dernier incident en date, où un convoi de la MONUC a essuyé des jets de pierre.

Avec le CNDP de Laurent Nkunda, les relations sont connues pour avoir été toujours exécrables. Mais rien ne va non plus avec les forces armées régulières, qui auraient bien aimé voir la MONUC faire le coup de feu à ses côtés. La MONUC qui est censée instaurer la quiétude, séparer les belligérants et protéger les civils, a donc réussi, par son inefficacité, à se mettre tous les acteurs du conflit congolais sur le dos. Elle a une crédibilité à reconstruire. Mais en attendant, tous ceux qui sont considérés comme ses collaborateurs, sont pris à partie. Les journalistes de radio Okapi, qui n’ont pour tout outil de travail que leur micro, sont donc des proies faciles dans cette guerre de l’ombre. Car les casques bleus, eux, sont armés et bien en sécurité dans leurs véhicules blindés.

En outre, on a le sentiment qu’en RDC, un journaliste compte pour moins que rien. Tout au plus le considère-t-on comme un gêneur et là, la méthode est simple, on l’élimine. Toucher à un cheveu d’un casque bleu peut donner lieu à des représailles de l’ONU. Mais un journaliste, qui le défendra, en dehors des véritables défenseurs de la liberté de presse ? Bref, un climat de terreur est entretenu autour des hommes de médias à des fins inavouées. Toujours est-il qu’un journaliste qui tombe, qu’il soit de Radio Okapi ou d’un autre média, c’est une voix qui s’éteint. C’est aussi un témoin de moins. C’est la nouvelle bataille qu’il faudra gagner, celle d’une RDC où un journaliste peut témoigner sans crainte, de l’affreuse situation que le pays vit. Sans le regard des médias, les crimes seraient encore plus terribles.

Par Mahorou KANAZOE

Le Pays

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