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AFRIQUE DU SUD : Les incertitudes de l’après-Mbeki

Publié le mardi 23 septembre 2008 à 09h59min

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Beaucoup d’interrogations subsistent suite au départ précipité de Thabo Mbeki de la présidence de l’Afrique du Sud. Quelles en sont les véritables raisons ? Quel avenir pour cet homme d’Etat ? Quel héritage pour quel successeur ? Qu’adviendra-t-il de l’unité de l’African national congress (ANC) dont la quasi unanimité des principaux responsables est à l’origine de son départ de la tête de l’Etat ? Ira-t-on vers une déchirure ? La cohésion au sein de la nation arc-en-ciel tiendra-t-elle le coup ?

Beaucoup d’interrogations subsistent suite au départ précipité de Thabo Mbeki de la présidence de l’Afrique du Sud. Quelles en sont les véritables raisons ? Quel avenir pour cet homme d’Etat ? Quel héritage pour quel successeur ?

Qu’adviendra-t-il de l’unité de l’African national congress (ANC) dont la quasi unanimité des principaux responsables est à l’origine de son départ de la tête de l’Etat ? Ira-t-on vers une déchirure ? La cohésion au sein de la nation arc-en-ciel tiendra-t-elle le coup ?
Outre le risque d’implosion de l’ANC, les répercussions sur la vie politique et économique de l’Afrique du Sud sont à redouter, en raison même du fragile équilibre hérité des négociations post-apartheid. Par ailleurs, outre les inquiétudes relatives aux rapports entre blancs, noirs et métis, on peut se demander comment les partisans de Mbeki et ceux de Zuma pourront s’y prendre pour surmonter leurs divergences sans laisser trop de traces. Le concours moral de Mandela ne sera sans doute pas de trop pour éviter que ne vole en éclats ce parti de légende.

L’ANC a le mérite d’avoir libéré l’Afrique du Sud des griffes de l’apartheid et donné de l’espoir à des millions de noirs et de peuples désespérés de la région. Une telle intervention pourrait faire recentrer les choses et même, éviter le chaos au pays et à toute l’Afrique australe.
Outre ses incertitudes au plan local, ce départ précipité de MBeki peut signifier que doubler un mandat de cinq ans à la tête des Etats africains paraît excessif. La lassitude peut même finir par gagner les rangs des propres partisans du prince régnant. Il est vrai que dans l’exemple français, les mandats de cinq à sept ans ont pu être gérés sans trop de problèmes. Mais quelle que soit la durée du mandat, le plus souvent en Afrique, on parvient toujours difficilement à honorer ses engagements et les crises ne sont jamais définitivement résolues.

Les portes sont désormais ouvertes pour Zuma qui n’est pas forcément une icône, comparativement aux autres pionniers. Il est célèbre, mais sa popularité pourrait en prendre un coup surtout qu’elle ne va pas toujours dans le bon sens. Saura-t-il se forger une personnalité moins sulfureuse durant les mois de la transition ? La sympathie à son endroit va-t-elle durer ? Sans doute est-il bon agitateur de parti, mais sera-t-il à la hauteur de la tâche ? La demande sociale est très forte et il le sait.

Et cette façon de partir de Thabo Mbeki n’est pas pour arranger les choses. Bien au contraire, la situation devient plus délicate pour le nouveau patron de l’ANC, son successeur potentiel. Des pressions pourraient surgir de partout pour le confondre définitivement, maintenant que son rival n’est plus de la partie. La question est de savoir en effet, si des stratèges n’ont pas prévu de lui substituer un troisième larron. Croit-on sérieusement que Zuma pourra véritablement tenir le parti ? Des vents contraires ne sont pas à exclure et il y a lieu d’être encore plus prudent dans son camp, lequel devra gérer ce qui apparaît aujourd’hui comme une vraie crise politique dans l’Afrique du Sud post-apartheid.

Mbeki s’est sans aucun doute attiré bien des antipathies, notamment à propos du dossier SIDA. Lui-même, a aussi reconnu avoir échoué dans le combat contre la pauvreté qui s’est plutôt aggravée. Mais il a le mérite d’avoir réussi à préserver l’unité du parti, la paix et la cohésion sociale dans le pays.
Son départ, somme toute, est élégant. Même s’il y a été contraint, il fait partie de ces hommes politiques africains qui ont osé rendre le tablier avec dignité. Contrairement à bien d’autres, il part, sans cadavres dans les placards. Cela mérite d’être souligné.

En attendant qu’on fasse un véritable bilan de sa gestion, on peut dire que Mbeki part dans la dignité. Il a réussi à gérer avec souplesse et adresse la co-existence pacifique entre ses compatriotes au lendemain de l’apartheid. Après avoir conquis sa véritable indépendance au début des années quatre-vingt-dix, l’Afrique du Sud demeure cette grande nation dont les performances économiques sont incomparables sur le continent. Véritable îlot de démocratie dans un contexte africain marqué de tripatouillages constitutionnels, ce pays a toujours su faire l’effort de respecter les textes de loi et les décisions consensuelles.

Le fait pour Mbeki d’avoir une fois de plus insisté sur sa non-implication dans la gestion du dossier Zuma par la justice, est révélateur du degré de moralité qui habite les acteurs politiques de ce pays.
Prolongement de la démocratie à l’occidentale sur le continent, l’Afrique du Sud marque incontestablement des points et redore son blason. En effet, pendant longtemps, celui-ci a été terni par les incohérences de la politique de santé du régime Mbeki autant que par les difficultés enregistrées lors des tentatives de médiation dans la résolution de certains conflits, notamment en Côte d’Ivoire.

Le successeur de Mandela peut se vanter cependant d’avoir réussi à ramener la paix au Burundi, au Zimbabwe et dans une certaine mesure, dans l’ancien Zaïre. On retiendra donc de Mbeki qu’il aura réussi à faire la paix aussi bien à l’intérieur qu’à l’extérieur de l’Afrique du Sud. Il laisse toutefois des dossiers difficiles à son successeur.

Outre le fait de devoir assurer le suivi des crises résolues entièrement ou à moitié, le futur président devra s’efforcer de satisfaire aux aspirations de millions de Sud-africains qui perdent jour après jour, leurs illusions. A ce titre, une bombe sociale est en hibernation que Zuma et les autres devront chercher à désamorcer tôt ou tard. Elle est enfouie sous des dossiers qui ont pour noms réforme foncière et corruption sur fond de pauvreté. Mais aussi, tensions sociales relatives au flux migratoire et aux mouvements sociaux de travailleurs.

La demande sociale est très forte et les nouvelles générations ne savent pas cacher leur impatience. Zuma et les caciques de l’ANC risquent fort de l’apprendre à leurs dépens. De leur respect du dialogue démocratique, de leur savoir faire et surtout, du tact dont sauront faire preuve les nouveaux dirigeants sud-africains dans les années à venir, dépendra l’avenir de ce géant du continent africain.

"Le Pays"

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