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Parlement rwandais : Le pouvoir du pagne

Publié le dimanche 21 septembre 2008 à 23h34min

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Quarante- cinq. C’est le nombre de femmes élues au Parlement rwandais depuis les législatives du 15 septembre 2008, les deuxièmes après le génocide de 1994. Avec 45 sièges sur les 80 que se disputaient 355 candidats, les femmes font une entrée en force dans l’hémicycle. C’est là un record, qui fait de ce petit pays des Grands Lacs (26338 km2 pour 8 millions d’habitants) un des Etats du monde où la représentation féminine (56%) est la plus forte.

Il faut dire que ces dernières années, le pays avait mis un point d’honneur à instaurer la parité au sein de son assemblée nationale. Et pour ce faire, la constitution avait même prévu vingt-quatre sièges réservés au sexe dit faible. Une attention que les élues de la précédente législature, dont le taux atteignait déjà 48%, ont su mettre à profit pour faire valoir leurs compétences.

C’est donc dans cette logique, résolument progressiste, que des collèges électoraux de femmes ont désigné leurs représentantes, imposant de ce fait le pouvoir du pagne dans l’une des principales instances de décision du pays. Une prouesse que même les pays scandinaves, érigés pourtant en exemples de démocratie et de bonne gouvernance, ont encore du mal à réaliser ; un bon point que le régime Kagamé ne manquera pas de faire valoir auprès des bailleurs de fonds, qui placent le pays parmi leurs bons élèves pour le dynamisme de son économie et de sa croissance.

Mais si le Rwanda a dorénavant la particularité de posséder une assemblée nationale dans laquelle la parité est une réalité, il lui reste beaucoup de progrès à faire en matière de démocratie. Pour l’homme fort de Kigali, un pays comme le sien, traumatisé par le génocide – auquel il a mis fin par la kalachnikov - a, avant tout, besoin de stabilité, car « la démocratie, cela ne veut pas dire les troubles ».

C’est sans doute dans cet esprit que se sont tenues les dernières législatives, très encadrées et sans la moindre voix discordante, permettant au Front patriotique rwandais, au pouvoir depuis 1994, et à ses satellites de remporter la mise. L’opposition politique, exilée depuis les heures sombres du génocide, n’a pu que dénoncer ce scrutin à travers une coalition basée à Bruxelles.

Pour ces proscrits, « tant qu’un seul parti politique, le FPR, monopolise tout l’appareil d’Etat, décide quelle formation ou quel individu peut participer aux élections, boucle tout le pays pendant le processus électoral, les élections se résumeront à un écran de fumée ».

Mais le régime de Kigali n’en a cure, trop fier d’avoir imposé, une fois de plus, la sacro-sainte stabilité au détriment de l’expression démocratique. Paul Kagamé, despote éclairé, n’est décidément pas près de quitter les rangs des « prédateurs » de la liberté de la presse, dans lesquels Reporters sans frontières l’avait placé.

Cependant, si le pays des mille collines reste encore à la traîne pour ce qui est de ses pratiques républicaines, il peut aujourd’hui s’enorgueillir d’avoir ravi la palme d’or de la parité, une vertu que lui envie plus d’une démocratie confirmée. Comme quoi il arrive que les régimes les plus autoritaires engendrent des idées novatrices.

H. Marie Ouédraogo

L’Observateur Paalga

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