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Les "bonnes" : Aides-ménagères ou péril pour les foyers

Publié le lundi 28 juin 2004 à 08h25min

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Il n’y a pas de sot métier, dit-ont souvent. Ceci est d’autant plus vrai aujourd’hui où l’important est de gagner son pain, quel que soit le travail que l’on fait (pourvu qu’il ne soit pas contraire à l’ordre public ou aux bonnes mœurs). Le temps actuel est caractérisé par la raréfaction de l’emploi, même pour les diplômés d’université.

Et si ceci est vrai pour les garçons, il l’est davantage pour les filles qui ont plus de difficultés pour trouver un emploi parce que souvent pas très instruites ou parce que simplement victimes de discrimination sexuelle. Tant et si bien que nombre de filles sont obligées de travailler comme « bonnes à tout faire » dans les ménages. Ces aides ménagères sont-elles effectivement utiles ou constituent-elles un danger pour les ménages qui les emploient ?

I. Les bonnes… un produit de l’exode rural

A dire vrai, le travail de « bonne » est généralement exercé par des fillettes venues des villages à la recherche de conditions de vie meilleures. Que la vie au village semble bien terne et monotone, ponctuée uniquement de semailles et de récoltes, et d’une saison sèche morte. C’est pourquoi, le retour au village de quelqu’un venu de la capitale ou de toute autre ville constitue en soi un événement.

La citadine en effet produit une forte impression sur ses camarades restées au village, par les belles tenues et les beaux bijoux arborés. C’est alors que commence à germer dans la tête de celles-ci le secret désir d’aller également en ville à la recherche d’un mieux-être. Qu’y a-t-il de mal dans le fait de vouloir améliorer son sort ? Seulement, savent-elles à quel prix ces belles parures ont été obtenues ? Savent-elles que c’est souvent au prix de longues et harassantes heures de travail et parfois par des larcins commis au préjudice de la patronne que celles-ci ont été acquises ? Savent-elles seulement quelles difficultés leur camarade a vécues en ville, et d’abord comment elle a obtenu son emploi ?

II. Le point de chute des futures bonnes

Le travail de bonne ou d’aide-ménagère est parfois assuré par une nièce ou une cousine de monsieur ou de madame. Mais de plus en plus, il faut chercher en ville une fille pour faire ce travail, surtout si les deux conjoints travaillent. L’on passe alors par des relations pour recruter cette aide-ménagère. Mais chaque capitale africaine a généralement des points de chute pour les « bonnes » et il suffit à ce moment de s’y rendre pour obtenir satisfaction.

Pour ne citer que quelques cas, il suffit de prendre l’exemple de Dakar où la rue Carnot angle Docteur Thèze, Liberté VI, Point E, etc. sont autant de lieux où les bonnes se donnent rendez-vous chaque jour que Dieu fait, assises le long des murs, attendant un employeur hypothétique. Assises, elles devisent sur la vie au village, les difficultés de la vie en ville ou sur leurs anciennes patronnes. A Ouagadougou, le point de chute des bonnes est au quartier Hamdalaye. Après les récoltes, les fillettes de l’ethnie des "kibsé" viennent en ville pour travailler jusqu’au prochain hivernage où elles retournent au village pour les travaux champêtres.

A Lomé naissent de plus en plus des centres de formation et de placement de bonnes et il suffit de s’adresser à ces centres pour recruter une bonne ou pour recycler gratuitement sa bonne. Quelle que soit la voie par laquelle l’on a obtenu sa bonne, chacun a sa chance. Beaucoup de ménages se plaignent de leurs bonnes, d’autres ne trouvent rien à redire sur les prestations de leurs bonnes.

III. Les conditions de travail des bonnes

Les conditions dans lesquelles les bonnes travaillent ne sont pas toujours enviables. Il y a d’abord le volume de travail qui est à la limite du supportable. Premières levées, elles seront les dernières à se coucher. Elles font tout dans la maison : lessive, vaisselle, ménage, blanchissage, soin des enfants, courses dans le quartier, marché, etc. Tout le travail domestique repose sur leurs frêles épaules pendant que la maîtresse de maison est occupée au bureau quand elle ne passe pas simplement son temps à se tailler les ongles. Les bonnes qui ont le plus de chances sont celles qui travaillent chez les expatriés. Elles peuvent avoir un salaire allant de 30 000 à 100 000 FCFA. Pour les autres, elles devront se contenter de 5 000 à 10 000 FCFA. Rien à voir avec ce que prévoient les textes en vigueur.

IV. La revanche des bonnes

On trouve toutes les catégories de bonnes ; des plus consciencieuses aux paresseuses voire aux voleuses de maris. Généralement, quand elles commencent le travail, elles le font à la perfection comme pour avoir la confiance de la maîtresse de maison, et surtout lorsque celle-ci surveille le travail. Mais après quelques jours, ou quand madame a le dos tourné, elles relâchent un peu et n’apportent plus autant d’attention à leur travail.

Mais le plus grand danger, c’est que la bonne peut nourrir dans son for intérieur le secret désir de prendre la place de l’épouse. C’est vrai qu’elle fait la cuisine, s’occupe des enfants, lave et repasse les habits, pourquoi ne prendrait-elle pas aussi soin de monsieur. C’est alors que les intriques commencent et si la patronne n’ouvre pas l’œil, elle risque de voir la bonne se transformer en rivale, voire en coépouse si le chef de famille se laisse faire. C’est ici le lieu d’appeler nos épouses non pas à se passer des services des bonnes, mais à ne pas laisser tout ce qui concerne le ménage reposer sur elles. Sinon elles risquent de perdre leur foyer ou d’être contraintes à partager leur époux avec celle qui, hier encore, était la bonne à tout faire.

Jean François Bouda

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