LeFaso.net, l'actualité Burkinabé sur le net
Proverbe du Jour : “Soyez un repère de qualité. Certaines personnes ne sont pas habituées à un environnement où on s’attend à l’excellence.” Steve jobs

Remaniement : Quand la presse trompe tout le monde !

Publié le jeudi 11 septembre 2008 à 09h39min

PARTAGER :                          

Ce n’est pas que les excuses suffiraient pour tout absoudre mais elles ont au moins le mérite de l’honnêteté et indiquent un tant soit peu qu’on se place dans la perspective de ne pas recommencer les mêmes erreurs. Par contre, en refusant cet exercice, la presse nationale refuse de reconnaître qu’elle a menti, et trompé les populations souvent sciemment ou à tout le moins parce qu’elle a été abusée ou s’est laissée abuser de bonne ou de mauvaise foi.

Nous n’avons pas la prétention de vouloir distribuer des bons et des mauvais points mais la vérité commande de remettre à César, ce qui lui revient et de dire que L’Observateur Paalga et San Finna sauvent néanmoins la face au métier en reconnaissant les faits.

Et vlan ! Politiques et analystes politiques l’auront pris en pleine poire ! Après nous avoir promis sous tous les tons un chamboulement, voire un chambardement mémorable avec en prime une chasse aux sorcières de 1ère classe, tout ce beau monde se retrouve Gros-Jean comme devant, il mériterait bien plus, après le remaniement ministériel du 3 septembre dernier. C’est que les uns et les autres n’y sont pas allés avec le dos de la cuillère, certains poussant le culot jusqu’à attribuer les portefeuilles ministériels sous le couvert de « confidences » de sources « sûres », comme s’il s’agissait plus pour eux de montrer qu’ils sont dans les secrets des dieux que d’informer l’opinion publique ou l’éclairer sur la base d’analyses ou d’opinions pleinement assumées. Il n’y a pas longtemps, notre chroniqueur Faez s’était « Sur le vif » (1) dans sa rubrique éponyme, élevé contre une telle pratique qui relève beaucoup plus du charlatanisme et de l’arnaque intellectuelle que de l’analyse politique encore moins du journalisme.

Mais il semble que c’était à qui mieux mieux comme si on se disputait la palme de l’audace, voire de la témérité. Dans un tel contexte, foin des règles élémentaires de prudence, notamment du b-a-ba du métier qui exige la vérification des informations et le recoupement des sources. C’est comme si on se disait : « ils veulent des révélations ? Eh bien on va leur en servir ! » Du coup, chacun y va à fond la caisse et sans retenue au risque de flirter avec le ridicule comme cette pauvre personne qui n’a pas peur de passer pour un vulgaire imbécile (2) dans une analyse dans L’Observateur Paalga dans laquelle elle s’en prend à l’origine ethnique du ministre d’Etat Alain Bédouma YODA. C’est vrai qu’il faut du tout pour faire un monde, mais tout de même ! On a donc eu droit au pire et certains de s’interroger sur les raisons d’une telle dérive.

Spéculations, manipulations, mauvais calculs… toujours est-il que le remaniement du 3 septembre est venu battre en brèche la kyrielle d’analyses et d’opinions émises dans la presse nationale, qui fort curieusement se contente dans sa grande majorité de reconnaître le fait du bout des lèvres, si elle ne retombe sur ses pieds en accusant le président du Faso et le Premier ministre de n’avoir pas compris que le peuple « réclamait » un changement total et en profondeur. C’est comme çà chez nous, chacun s’octroie le droit de parler au nom du peuple et d’exprimer ses sentiments. Point donc de mea-culpa, puisque ce sont Blaise COMPAORE et Tertius ZONGO qui sont hors-jeu pour n’avoir pas fait le remaniement attendu par toute la nation. Si ce n’est pas ridicule ! Comment comprendre que devant un tel fiasco on se pique de toujours parler au nom de « la plupart » des Burkinabé qui attendraient on ne sait quoi ?

De toute évidence, et si on en voulait la preuve, on peut maintenant admettre sans paraître s’opposer à la liberté de presse, que l’humilité est la chose la moins partagée dans le milieu des médias. Ce n’est pas que les excuses suffiraient pour tout absoudre mais elles ont au moins le mérite de l’honnêteté et indiquent un tant soit peu qu’on se place dans la perspective de ne pas recommencer les mêmes erreurs. Par contre, en refusant cet exercice, la presse nationale refuse de reconnaître qu’elle a menti, et trompé les populations souvent sciemment ou à tout le moins parce qu’elle a été abusée ou s’est laissée abuser de bonne ou de mauvaise foi. Nous n’avons pas la prétention de vouloir distribuer des bons et des mauvais points mais la vérité commande de remettre à César, ce qui lui revient et de dire que L’Observateur Paalga et San Finna sauvent néanmoins la face au métier en reconnaissant les faits. A titre d’exemple, sous la plume de son rédacteur en chef, Boureima DIALLO, L’Observateur écrit dans son édition n°7212 du vendredi 05 au dimanche 07 septembre 2008 : « Avant la formation de ce gouvernement, bien de noms de probables ministres ont été donnés ; la presse avait déjà composé son équipe, quelquefois par complaisance ou légèreté… Il y a donc lieu que les hommes de médias que nous sommes fassent bien attention, car, bien des fois, nous semblons être utilisés par de petits malins, prétendument dans les secrets des dieux. Faisons davantage attention. Il y va de notre crédibilité ! » On ne peut pas dire mieux ! D’autant que dans le sillage de la presse, les hommes politiques, qui n’en attendaient pas autant, se sont engouffrés dans la brèche, faisant et défaisant le gouvernement au prétexte d’une opinion publique qui réclamerait de nouvelles têtes pour un « gouvernement d’ouverture » par-ci, un « gouvernement devant aller au charbon » par-là etc. A la fin des courses, se voyant encore une fois de plus en porte-à-faux avec les réalités et refusant de faire amende honorable, l’opposition, puisque c’est d’elle qu’il s’agit, rue dans les brancards, comme pour se justifier.

En effet les opposants interrogés ont naturellement décoché des flèches enflammées contre le pouvoir, alors qu’eux-mêmes sont incapables de s’entendre sur le type de gouvernement auquel ils prétendent que le peuple s’attendait. Entre « un gouvernement de large ouverture » appelé de tous leurs vœux par certains et un gouvernement de « Tertius boys » ou un gouvernement « familial » pronostiqué par d’autres, il faut dire qu’il y a plus qu’un grand écart. On attendait donc des choses et leurs contraires et dans l’un ou l’autre cas le pouvoir ne pouvant qu’avoir tort, ils ont le beau rôle. Autant dire que la sentence connue d’avance, le contenu importait peu. Pour faire bonne figure on tombe alors dans les déclarations péremptoires du genre « la plupart des Burkinabè s’attendait à … » ou les raccourcis politiciens du genre « … on s’attendait à un bouleversement avec une équipe prête à aller au charbon… » etc. C’est certainement de bonne guerre mais n’est-ce pas faire preuve de bon sens que de penser que si l’opposition se plaint c’est parce que le pouvoir a eu le nez creux ?.

(1) Sur le vif : Billet signé par Faez et qui traite avec un humour caustique l’actualité nationale ou internationale.

(2) Imbécile : Personne qui manque singulièrement d’intelligence. (selon le Dicos Encarta)

Par Cheick AHMED
cheickahmed001@yahoo.fr

L’Opinion

PARTAGER :                              
 LeFaso TV
 Articles de la même rubrique