LeFaso.net, l'actualité Burkinabé sur le net
Proverbe du Jour : “Vous n’empêcherez pas les oiseaux de malheur de survoler votre têtе, mаis vοus рοuvеz lеs еmрêсhеz dе niсhеr dаns vοs сhеvеux.” Proverbe chinois

Etats-Unis : "Le réveil noir a sonné"

Publié le vendredi 22 août 2008 à 11h55min

PARTAGER :                          

S’inspirant de l’ascension politique fulgurante de Barack Obama, un Noir, aux Etats-Unis, l’auteur de l’écrit ci-dessous en arrive à la conclusion que le Noir n’est pas frappé d’une malédiction divine. L’Afrique, berceau de cette race, doit de ce fait, retrousser les manches car l’heure du réveil, dit-il, a sonné.

Frêle silhouette, forme svelte, corps élancé, peau noire dans un pays à forte connotation blanche, jeune visage émacié dans un monde à corpulence remarquable, prénom arabe dans une nation qui se méfie encore des arabes, patronyme swahili mais éloigné de ses terres d’origine… Bref tous les ingrédients sont réunis pour faire de ce candidat à la Maison blanche le moins conventionnel possible. Son nom : Barack Hussein Obama. Incontestablement, s’il y a une personne qui soit actuellement sous les feux de la rampe allant jusqu’à faire douter les plus pessimistes et ceux qui n’en croyaient pas, c’est bien cet homme noir et candidat à la présidence américaine.

Voilà un Noir aux USA qui voit plus loin que les droits civiques et a une vision plus large que la simple égalité entre Noirs et Blancs. Lui qui a eu l’audace de se présenter à cette présidentielle est parvenu finalement à déboulonner le piédestal de l’inévitable Hillary Clinton. C’est ce virtuose, dont les racines généalogiques se retrouvent en terres africaines kenyanes, qui fait souffler un vent nouveau sur la politique américaine. Ce jeune sénateur noir qui, il y a juste quelques années, était quasiment inconnu de la scène politique américaine encore moins mondiale, est aujourd’hui la personne la plus médiatisée et celle sur qui reposent l’espoir, et le rêve de la grande Amérique et par ricochet le monde entier. Considéré au départ des primaires comme l’outsider, le plus prétentieux de tous les Noirs aux USA est devenu celui qui pourra ressusciter le mythe Kennedy. Il est suffisamment noir pour ratisser large dans toute la communauté des personnes de couleur et assez modéré, intelligent et engagé pour convaincre les plus indécis et bénéficier de la confiance des Blancs les plus sceptiques. Cette ascension fulgurante de celui dont on dit "gars maigre au nom bizarre", même si elle ne cesse d’étonner le monde entier, elle ne s’est pas faite sans accrocs. La fin des primaires qui a vu la désignation de Barack comme vainqueur face à Hillary, dénote d’une des campagnes les plus dures de l’histoire présidentielle américaine. Campagnes présidentielles où la moindre petite erreur la plus naïve et la plus insignifiante est subtilement exploitée par l’adversaire. Les peaux de bananes et les guet-apens contre Obama n’ont pas manqué. Voyons ! Jamais on n’a vu des campagnes où l’on a fait autant vibrer la fibre raciale. Des tensions raciales sont remontées à la surface durant la semaine précédent la primaire en Caroline du Nord.

Face à la célébrissime Hillary Clinton, il gagne la partie

La presse a épluché chaque sondage de sortie des urnes pour trouver des preuves d’une polarisation raciale qui opposerait non seulement les Blancs aux Noirs mais aussi les Noirs aux basanés. Certains ont dit que cette candidature était un exercice de discrimination positive en faveur d’Obama. C’est pour dire que le simple fait d’être candidat noir dans une Amérique largement acquise aux Blancs n’était pas un atout pour Obama. C’est en réponse à ces attaques virulentes qu’il a mis en garde ses contempteurs : "Ne cherchez pas à diviser à un moment où nous avons tant besoin de nous rassembler". Ensuite, face à la célébrissime Hillary Clinton, qui était, au départ des sondages, créditée d’un large soutien de la population, on ne le donnait pas pour favori. Mais on l’a vu, Obama n’a pas baissé pavillon même quand Bill Clinton, fier comme Artaban dans ses habits d’apparat, est venu à la rescousse de sa femme en brandissant leur bilan (Bill et Hillary) largement positif des huit (08) années passées à la Maison blanche. Cela n’a pas empêché Obama de gagner la partie. Sans oublier la jeunesse d’Obama que ses adversaires les plus redoutables tentent d’exploiter à leur profit. En effet, lui qui naquit un certain 4 août 1961 (47 ans) est très loin de John McCain (72 ans) qui l’accuse d’être inexpérimenté. Quant à Hillary Clinton (60 ans), celle-ci a un âge sensiblement égal à la mère de Barack Obama (Stanley Anne Dunham, 66 ans aujourd’hui) si celle-ci n’était pas décédée en 1995 à 53 ans. Mais Obama a des dents bien longues, cette jeunesse n’est pas pour lui synonyme de néophyte en politique. Les duels à fleuret moucheté à la TV ont démontré que cet intellectuel de race a de la classe. Comme quoi, aux âmes bien nées la valeur n’attend point le nombre des années. Il l’a également prouvé, lors de son récent voyage au Moyen- Orient et en Europe, qu’il était loin de ce novice politique dont on veut lui coller à la peau. Tout ce qui était considéré par ses adversaires comme son talon d’Achille, ce jeune avocat n’en a cure. Ce magicien des mots avec une éloquence de la trempe d’un Martin Luther King, a su convertir, avec brio, en véritable atout tout ce qui était considéré comme obstacle, et a fini par clouer tous ses adversaires démocrates au pilori. On peut comprendre cette aura de mystère au constat de son identité. Son nom "Barack" signifie "béni", et "Obama" veut dire dans sa langue paternelle swahili "lance enflammée". Il a donc enflammé tous ses concurrents démocrates les plus téméraires qui rivalisaient avec lui.

Obama, adepte de l’idéologie de Martin Luther King

Il prend dorénavant son envol noir vers la Maison blanche. Quoi de plus normal ! Ce rejeton idéologique de Martin Luther King a su véritablement séduire les Américains, surtout dans son célèbre discours qu’il a tenu le 21 mars 2008 à Philadelphie. D’aucuns ont conclu que ce discours sur la race, la religion et l’unité du peuple américain, reste l’un des plus beaux discours jamais écrits par un candidat à la Maison blanche. Dans ce discours fort rassembleur, Obama a touché la corde sensible en ciselant le véritable problème de la nation américaine. "Deux guerres, une menace terroriste, une économie qui chute, une crise chronique du système de santé et un changement climatique potentiellement dévastateur ; des problèmes qui ne sont ni noirs, ni blancs, ni latinos, ni asiatiques, mais plutôt des problèmes qui nous concernent tous".

C’est dans ce discours également qu’il propose sa voie à suivre, dans une foi en cette Amérique qui change malgré les multiples différences et inégalités. "Le vrai génie de l’Amérique, dit-il, c’est qu’elle change, en acceptant une candidature aussi imparfaite que la mienne. Ce que nous avons déjà réussi à accomplir nous remplit plus d’audace et nous permet d’espérer tout ce que nous pouvons et devons accomplir demain. "Et pour convaincre les plus indécis aux cœurs les plus endurcis, cet orfèvre de la parole ajoute que "nous pouvons avoir des histoires différentes, mais que nous portons les espoirs communs ; que nous pouvons ne pas avoir la même apparence et ne pas venir des mêmes endroits, mais que nous voulons tous aller dans la même direction, vers un avenir meilleur pour nos enfants et nos petits-enfants". Ce discours qui figurera dans l’anthologie des plus belles allocutions jamais consacrées au douloureux tabou racial, a révélé l’homme porteur d’espoir pour toute l’Amérique.

L’oiseau rare que de millions d’Américains cherchaient depuis des lustres est enfin apparu sur les épaules d’un jeune Noir qui vient juste de finir en 2004 de rembourser les emprunts de ses études. C’est un Noir dégagé de tout complexe de quelque nature que ce soit, qui surgit en rassembleur des Américains de toute couleur, de toute langue, de toute culture et de toute nature. Bigrement intelligent, il est de la même cuvée qu’un certain Abraham Lincoln, William Jefferson et John Fitzgerald Kennedy dont il semble être en lui seul le concentré ; ce que les autres candidats n’ont pas. Ce qui a fini par convaincre un illustre politicien américain qui conclut que "Barack Obama est ce politicien qu’on ne rencontre qu’une seule fois dans la vie". Est-ce une illusion assez folâtre ? ça peut le paraître. Mais le moins qu’on puisse dire, est qu’Obama, cette encyclopédie politique noire, a véritablement le vent en poupe. Ses partisans voient en lui le futur président et l’ultime réconciliateur entre Noirs et Blancs.

Un terrain déjà balisé par le King

La chance d’Obama est que ce candidat est arrivé à un moment où le terrain semble lui être balisé. Qu’est-ce qui explique cela ? Nous pouvons citer le travail abattu de haute lutte par le Révérend Pasteur noir, Martin Luther King, cet homme orchestre, rare sous nos tropiques qui, contre vents et marées, s’est battu pour permettre aux Noirs d’avoir une bonne place au soleil. Un engagement solennel qui l’a conduit au sacrifice suprême pour que ses frères, enfants et petits enfants puissent collaborer avec leurs homologues Blancs dans la même embarcation vers l’avenir. C’est ce combat de King qui a fini par convaincre les Blancs eux-mêmes que c’est en étant unis qu’on parvient à résoudre les problèmes les plus corsés. A n’en point douter, Obama bénéficie du sacerdoce sacrificiel de Luther King ; il lui doit bien une fière chandelle.

Autre atout, et non des moindres pour lui, c’est sa femme Michelle, celle qu’il appelle "the rock of my life" (le rocher de ma vie). Il rencontra Michelle Robinson en 1991 quand il entama sa carrière juridique par un modeste stage dans un gros cabinet d’avocat de Chicago. C’est elle qui était sa supérieure hiérarchique directe et devint sa femme quelque temps plus tard. C’est cette grande dame, cette rude citadine du Midwest qui ramène fermement Obama sur terre quand le succès enfle son ego. C’est à elle que Barack a laissé le soin de trouver le ton qui sied mieux pour convaincre les Noirs surtout les plus radicaux. Elle sait aborder avec maestria les thèmes de la discrimination, des violences policières et des inégalités devant la justice. Cette brillante oratrice est aujourd’hui directrice d’un des plus grands groupes hospitaliers publics de Chicago, et se dit prête à devenir la future first lady (Première dame) de la plus grande puissance économique, militaire et culturelle du monde. Un couple idéal n’est-ce pas ? Nous osons l’espérer.

Il faut noter aussi qu’Obama a eu le bon flair de puiser dans son sérail un parterre d’intellectuels de même carrure, et de s’entourer des plus grands conseillers politiques aguerris. Toute chose alors qui justifie le charisme et la grande popularité dont il jouit actuellement. Voilà qui atteste vraisemblablement que l’Amérique est une nation pas comme les autres. D’Arnold Schwarzenegger (natif de l’Autriche et actuellement gouverneur de la Californie) à Collin Powel, et de Condoleezza Rice au candidat Obama, les USA ne ratent pas l’occasion de montrer au monde entier qu’ils sont toujours en avance. Dans ce pays, tout le monde peut atteindre le sommet à condition de travailler dur. Une candidature qui devrait donner matière à réfléchir à la France de Sarkozy. Belle leçon d’intégration à celle qui se proclame pourtant le pays accoucheur des droits de l’homme par excellence.

Obama ne cesse de bénéficier de multiples soutiens à travers le monde entier, qui voit en ce chantre du consensus américain, l’homme idéal. Lors de son récent déplacement au Moyen-Orient et en Europe, on a vu des foules en ébullition clamer partout où il arrive l’obamamania. Une candidature historique que même George Bush n’a pas hésité à féliciter. Partout à travers le monde se forment des comités de soutien au tombeur d’Hillary Clinton. Son aura galopante ne connaît plus de frontière et ce n’est pas cette ville portuaire du Japon du nom de "Obama" qui dira le contraire. Toute la population de cette ville s’est mobilisée comme un seul homme à travers pancartes et effigies pour soutenir le candidat Obama. Ce qui a aussi donné un coup d’éclat et plus d’attirance touristique pour cette ville "Obama".

Le soir du 4 novembre prochain...

Au train où vont les choses, on a foi qu’au soir du 4 novembre prochain, le nom d’Obama trônera sur toutes les lèvres de milliards d’âmes lorsque les Américains feront parler leur cœur au lieu de leurs intérêts. Cela prouvera que ce n’est pas dans la série "24h chrono" seulement que l’on se consolera à voir un président noir en Amérique ; le rêve est donc permis.

Mais, il se peut aussi que nous soyons allés un peu vite en besogne en vendant la peau de l’ours avant de l’avoir abattu. Les résultats peuvent être contre notre attente. Malgré tout, on peut jubiler car il est déjà une évidence que la simple candidature et cette chevauchée fantastique de Barack Obama révèlent incontestablement une véritable révolution. C’est une fierté pour l’Afrique noire tout entière qui caresse tout de même l’espoir de voir un de ses fils noir briguer le bureau ovale de la Maison blanche. Je ne me fie pas à l’illusion selon laquelle sa victoire profiterait beaucoup à l’Afrique, non ! Je me réjouis tout simplement de cette candidature « obamatique » à la présidence de la plus grande puissance mondiale. Cela me vaccine de confiance et me convainc qu’aucune force maléfique n’obstrue encore l’ascension de l’Afrique sur les aires du succès et dans les airs du progrès.

Voilà une figure emblématique de plus pour maintenant battre en brèche et annihiler toutes les conceptions fatalo-pessimistes qui ont toujours considéré l’homme noir comme une figure monstrueusement mal taillée et diaboliquement mal confectionnée. Pour ces mauvaises langues sans lendemain, le Noir serait la descendance de cet homme maudit par Dieu, ce qui justifie donc sa tare et son retard sur tous les plans. Honni soit qui mal y pense. L’Eternel Dieu dans son immense bonté n’a jamais fait une créature belle et merveilleuse comme l’Africain pour ensuite la maudire, jamais ! Et je défie quiconque l’y pense. Le retard de l’Africain s’explique autrement et se trouve ailleurs, mais pas dans une quelconque malédiction divine, nenni.

Alors tous ceux qui restent dans la vallée et le cachot du désespoir doivent se rendre à l’évidence que l’heure du Noir a enfin sonnée. Il faut maintenant qu’il se réveille de son sommeil léthargique. La fortune ne vient jamais en dormant. La cloche de la fin de la récréation a retenti pour que nous, Noirs africains, nous quittions la vallée de larmes du désespoir et de la honte pour monter sur la montagne de l’envol convertisseur d’espoir. Nous voulons proposer à cette nouvelle génération, l’ascenseur socio-politico-économique qui a été indisponible pour les générations précédentes pour une véritable conversion des mauvaises mentalités qui affaissent l’homme Noir dans le sordide. C’est la génération des prouesses africaines. L’horizon du bonheur n’est plus loin et nous devons maintenant montrer aux yeux du monde qu’aucune fatalité n’est faite pour l’homme noir.

Il est vrai qu’on a tout fait pour mettre l’Afrique à genoux, mais 48 ans après les indépendances, cela ne doit plus tenir lieu d’arguments pour justifier notre pétrin. Au rendez-vous de l’Histoire, chacun a son mot à dire. Nous ne devons plus laisser les autres nous dicter comment faire tourner la roue. Nous sommes suffisamment matures et nous avons maintenant les hommes rêveurs et concepteurs pour réaliser l’exploit de l’Afrique.

L’une des preuves que l’on n’est pas maudit est que l’Afrique a le sous-sol le plus riche de la planète. Alors, le tremplin est maintenant là et plus rien ne doit retirer nos armes de jet. Les nuages de libération s’amoncellent déjà à l’horizon et annoncent la venue imminente de la pluie de grandes réalisations. Levons-nous, car il n’est plus temps d’attendre et nous complaire à écouter le chant des sirènes. C’est le moment de sonner le glas du sortilège et monter dans les champs du travail libérateur, pour oser inventer l’avenir de l’Afrique. Alors, homme noir tu as tant souffert la nuit, maintenant il commence à faire jour ; réveille-toi, lève-toi, marche, cours et prends le vol vers la montagne de ton bonheur que te réserve ta terre promise, là où coulent le lait et le miel.

Que Dieu bénisse toute l’Afrique ! Shalom !

Bouabani Jonathan Tompoudi (Email : tobojo1@yahoo.fr)
Koudougou

Le Pays

PARTAGER :                              
 LeFaso TV
 Articles de la même rubrique