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Mauritanie : La drôle de greffe des putschistes

Publié le jeudi 14 août 2008 à 11h06min

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Le 6 août dernier, un groupe de militaires mauritaniens, avec à leur tête le général Mohamed Ould Abdel Aziz mettaient fin à l’expérience démocratique de ce pays. Sur les motivations du coup de force, on n’épiloguera plus davantage. Car, c’est connu, le général putschiste démis de sa fonction de chef de la garde présidentielle n’a pas digéré l’affront. D’où ce coup de force opportuniste et un peu précipité qui s’est appuyé sur la crise parlementaire.

La réaction de la communauté internationale a été la condamnation sans appel de ce forfait dont les auteurs sont à la recherche aujourd’hui d’une stratégie pour faire avaler la pilule à tous. L’homme fort de Nouakchott n’est pas prêt à céder le pouvoir malgré les récriminations. Sa préoccupation est plutôt comment la garder. Et à ce petit jeu, le général ne manque pas d’idées. Son conseil d’Etat gère les affaires courantes. L’Assemblée et le Sénat sont maintenus.

Exit le président de la République et son gouvernement. La junte est en train de former un nouvel Exécutif mais on se demande bien si cette greffe entre un pouvoir putschiste et illégitime et des institutions républicaines résultant de la volonté du peuple comme l’assemblée nationale et le Sénat va-t-elle prendre. Une attitude pour le moins curieuse qui trahit l’impréparation politique de ce coup d’Etat dont le déclic est lié aux intérêts personnels de l’ancien patron de la garde présidentielle et à sa volonté de ne pas être mis sous l’éteignoir. A moins que, maintenant cette situation hybride, les hommes forts de Nouakchott veuillent gagner du temps et soigner leur image. Ne serait-ce pas également une façon de dire que le président déchu était le problème ?

Pourtant, c’est bien le général qui est aujourd’hui le problème de la Mauritanie. Lui seul porte la responsabilité de cet accident de l’histoire qu’il ne veut pas assumer totalement. Un putsch est un putsch. Et dans ce cas, on suspend la Constitution, les partis politiques et les institutions. Rien de tout cela n’a tenté le général putschiste. Il a préféré mettre son pays entre deux chaises, obligeant des démocrates (des députés et certains partis politiques) à composer avec lui. Il ne lui reste plus qu’à attribuer le label de coup d’Etat démocratique à son action pour entrer dans l’histoire.

Ce coup de force appelle forcément une recomposition politique et la survie du régime dépendra de la force de ses alliés internes et extérieurs. Déjà, le président du parlement a crié haro sur le baudet, se démarquant ainsi des militaires qui ont pris en otage le processus démocratique.

Au-delà des condamnations de principe, il est à craindre que les précédents ne se multiplient. C’est aussi une occasion pour les parlementaires mauritaniens de savoir raison garder. Leurs errements, justifiés ou pas, ont permis à des putschistes de violer la république. Comment un élu du peuple peut-il justifier et soutenir un coup d‘Etat sans même attendre la prochaine échéance électorale ? C’est à croire que la fascination pour le pouvoir de certains hommes politiques du sérail est incompatible avec le mandat démocratique qui lui, se conquiert par les urnes et à un terme échu.

Par Abdoulaye TAO

Le Pays

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