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France - Rwanda : Dépassionner le débat

Publié le lundi 11 août 2008 à 11h26min

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On croyait que la France méprise la publication du rapport rwandais sur le rôle de l’Hexagone dans le génocide de 1994. On s’attendait à une posture du genre "les chiens aboient, la caravane passe" pour minimiser l’effet du rapport surtout qu’il émane d’un tout petit pays africain.

Mais ce ne fut pas le cas car des militaires et des hommes politiques français mis en cause dans le rapport parce qu’étant aux affaires au moment des faits, ont réagi. Comme s’ils s’étaient concertés, la ligne de défense est la même : la France n’a rien à se reprocher dans ce qui est arrivé au pays des mille collines en 1994 ; bien au contraire, son armée a même contribué à réduire l’ampleur des massacres. Il n’est donc pas question de laisser aboyer le chien mais plutôt de lui répondre.

Les accusations portées sont assez graves pour que la France ne réagisse pas. Et en matière d’accusation, la commission d’enquête rwandaise n’est pas allée avec le dos de la cuillère en reprochant à la patrie des droits de l’homme de s’être rendue coupable de violations de droits humains et, plus grave, de génocide.

Tous les péchés du ... Rwanda ont été mis sans ménagement sur la crête du coq gaulois, amenant donc celui-ci à sortir ses ergots pour faire état d’une enquête menée uniquement à charge et sous des arrières-pensées politiques. Et c’est en cela que réside une des faiblesses du rapport. Il est difficile pour les autorités rwandaises de démontrer que leur rapport n’est pas une réaction à celui du juge français Jean-Louis Bruguière rendant le président Paul Kagamé responsable de l’attentat contre l’avion de son prédécesseur.

La mort de Habyarima, c’est connu de tous, a été l’élément déclencheur des massacres. C’est enfoncer des portes grandement ouvertes que d’affirmer que la passion, la subjectivité, le désir de laver un honneur bafoué ont pu dicter cette réponse du berger à la bergère. Ce n’est pas dans cette situation que la vérité pourra vraiment éclater. On ne verra mieux dans cette affaire, on ne situera mieux le rôle et la responsabilité de tout un chacun (Rwandais, Français, Belges, ONU) qu’une fois la passion apaisée. Pour ce faire, il y a lieu que les débats entre le Rwanda et la France soient dépassionnés, que, comme on le dit couramment, on joue balle à terre. Pour solder sereinement les comptes dans cette affaire qui empoisonne les relations entre les deux pays, les responsabilités doivent être clairement situées. Et ce devrait être beaucoup plus du ressort de la justice internationale à travers notamment le Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR).

La justice voulue par le Rwanda risque de ne pas être juste car elle a toutes les chances d’être celle des vainqueurs ou plutôt celle des victimes qui auront tendance à occulter leur propre responsabilité. Si dans ce qui s’est passé, la France ne peut pas être blanche comme neige, les Rwandais en général et les dirigeants actuels en particulier ne sont pas non plus des saintes nitouches. Par exemple, Paul Kagamé peut-il jouer le Napoléon des Grands lacs on a vu son ombre dans le pillage des richesses de la RDC et être en même temps irréprochable en matière de violations des droits de l’homme ? C’est dire que le Rwanda et la France doivent chercher ensemble un arbitre pour situer les responsabilités dans le génocide de 1994

Par Séni DABO

Le Pays

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