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Coton génétiquement modifié : Le rapport de la FAO contesté

Publié le mercredi 23 juin 2004 à 09h24min

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De nouvelles études contredisent le rapport du Fonds des
nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) sur les
cultures génétiquement modifiées. Plus de 1500 organisations
et individus ont adressé une lettre ouverte au Directeur général
de cet organisme : "Le coton génétiquement modifié ne profite
pas aux agriculteurs disent-elles. Voici, à ce sujet, l’analyse de
la Coalition de la Société de Deccan pour la défense de la
biodiversité et de l’ONG GRAIN.

Le 17 mai, la FAO a publié un rapport, « Les biotechnologies
agricoles : une réponse aux besoins des plus démunis ? »
présentant une image positive des cultures génétiquement
modifiées et recommandant que davantage de ressources
soient engagées dans le développement des technologies du
génie génétique pour les pays en développement. La partie
centrale de ce rapport est l’analyse des expériences des
agriculteurs avec le coton Bt dans le monde.

La FAO déclare que
« les agriculteurs les plus démunis des pays en
développement peuvent tirer des avantages significatifs de
l’adoption des cultures transgéniques en termes de récoltes
plus élevées et d’un rendement plus stable, de coûts en
pesticides plus bas et une réduction des risques sanitaires dus
à l’exposition aux pesticides chimiques. » Mais la FAO ignore ce
qui se passe réellement sur le terrain, car le coton Bt a échoué à
apporter des avantages aux petits agriculteurs dans le monde.

Aujourd’hui deux nouvelles études sur le coton Bt en Inde et en
Afrique de l’Ouest réalisées par la Coalition de la Société du
Deccan (Andhra Pradesh)pour la défense de la biodiversité et
GRAIN apportent des preuves supplémentaires de l’échec du
coton Bt dans les champs et de l’échec de la FAO à défendre les
intérêts des petits agriculteurs. Elles arrivent au moment où le
Directeur général de la FAO reçoit une lettre signée par plus de
1500organisations et individus exprimant leur indignation et leur
désaccord vis-à-vis du rapport de la FAO.

Le rapport de la Coalition d’Andhra Pradesh, intitulé « Le coton
Bt a-t-il encore échoué en Andhra Pradesh en 2003-2004 ? » a
étudié les cas de164 petits agriculteurs de trois districts
d’Andhra Pradesh pendant la saison 2003-2004. Il établit que le
coton BT réduisait le recours aux pesticides et augmentait les
rendements de manière insignifiante, dans l’ensemble, les
profits des agriculteurs cultivant du coton Bt ayant baissé de
9 %.

Cela contredit directement les données tirées d’une étude
menée par ACNielsen pour Monsanto, qui déclare que les
profits des agriculteurs avaient augmenté de 92 %, et cela
montre combien les données fournies par l’industrie ne sont
pas fiables. L’enquête de Monsanto, menée par une agence de
marketing, est entrée en contact avec les agriculteurs par
l’intermédiaire de questionnaires distribués juste après leur
période de culture.

Etant donné que la grande majorité des
agriculteurs indiens ne gardent pas les comptes de ce qu’ils ont
dépensé pour leurs cultures, une étude basée sur un unique
questionnaire comme celui-ci peut toujours être trompeuse.
L’étude de la Coalition de l’Andhra Pradesh, au contraire, s’est
effectuée en continu avec les agriculteurs, en les rencontrant
tous les 15 jours et en restant toujours proche des réalités de la
situation. Il est par conséquent inquiétant que le rapport de la
FAO établisse son portrait enthousiaste du coton Bt en Inde
exclusivement sur des données collectées par Monsanto durant
la période de ses essais en champs en 2001.

Le rapport ignore
tout simplement les nombreuses études officielles et
indépendantes qui ont eu lieu ultérieurement sur les
expériences des agriculteurs avec le coton Bt et qui démontrent
de manière écrasante l’échec du coton BT en Inde.
"Endettement grave"
L’évaluation de la FAO sur le coton Bt est jalonnée de ce genre
d’informations sélectives.

L’aperçu qu’elle donne des
expériences des agriculteurs avec le coton Bt en Afrique du Sud
est basé sur une enquête unique de la zone des Makhatini Flats
menée par des chercheurs de l’Université Reading (Royaume
Uni), qui repose sur des données recueillies dans les fermes
par l’entreprise Vunisa Cotton, le seul distributeur de coton et
fournisseur d’intrants pour le coton de la région. Aucune
mention n’est faite des problèmes liés à la sécheresse qui ont
accablé les cultivateurs de coton dans la région ces trois
dernières années et qui ont entraîné de sérieux problèmes
d’endettement pour les petits cultivateurs de coton Bt.

Selon
l’étude menée par l’ONG South African NGO Biowatch, le
problème de l’endettement est tellement grave que Vunisa
Cotton et la Landbalk (la compagnie finançant le coton Bt) se
sont retirés du projet sur le coton Bt parce que les agriculteurs
ne pouvaient pas rembourser leurs dettes. Le rapport de la FAO
omet aussi de mentionner l’introduction désastreuse du coton
Bt en Indonésie, où les agriculteurs en colère par l’échec du
coton Bt a répondre à ses promesses, ont obligé Monsanto à
retirer rapidement le coton Bt du marché. Pendant les deux
années où il a été cultivé en Indonésie, le coton Bt a augmenté
le recours aux pesticides et a plongé les agriculteurs dans la
spirale de l’endettement.

Là où la FAO touche le fond, dans sa façon de considérer le
coton Bt, c’est quand elle suggère que les agriculteurs de
l’Afrique de l’Ouest perdront des centaines de millions de dollars
de profits potentiels s’ils n’adoptent pas le coton Bt. Cette
suggestion est basée sur une étude unique qui se sert d’un prix
artificiellement bas pour les semences de coton Bt (au moins
quatre fois moins que ce qu’il devrait être) et du même genre de
données réduites que celles utilisées dans le rapport de la FAO.
Le nouveau rapport de GRAIN sur l’éventuelle introduction du
coton BT en Afrique de l’Ouest présente une image totalement
différente.

Le rapport de GRAIN, intitulé « Le coton
génétiquement modifié prêt à envahir l’Afrique de l’Ouest : il est
temps d’agir ! » établit que le coton Bt ne réduira pas le recours
aux pesticides de manière significative ni n’apportera
d’avantages économiques aux agriculteurs de la région. Les
cultivateurs locaux de coton, les scientifiques et les ONG
consultés pour l’étude disent qu’il serait bien plus efficace pour
les institutions publiques de se préoccuper de soutenir les
programmes de réduction des pesticides qui ont déjà prouvé
leur efficacité et qui ne dépendent pas des technologies
étrangères.

Curieusement, le rapport de la FAO passe sous
silence ces programmes de la Farmer Field School sur le coton,
projets financés actuellement par la FAO en Afrique de l’Ouest.
Les derniers résultats du Programme intégré de production et
de gestion des maladies au Mali montre que, en utilisant les
ressources et les savoirs locaux, les cultivateurs de coton
étaient capables de réduire l’usage des pesticides de70%, tout
en augmentant leurs rendements de 25% et leurs revenus de
49%.Sans avoir recours à aucune technologie étrangère
coûteuse !

GRAIN a développé un site web sur le coton Bt qui donne une
image plus équilibrée des expériences des
agriculteurs.(http://www.grain.org/research/btcotton.cfm) Les
deux rapports, celui de la Coalition d’Andhra Pradesh et celui de
GRAIN, sont disponibles sur ce site. Le rapport de la Coalition
de l’AP est aussi disponible sur le site de la Société de
développement du Deccan (http://www.ddsindia.com). Le site de
GRAIN offre aussi un ensemble de ressources sur le coton Bt,
dont quelques-unes sont énumérées ci-dessous.

Ceux qui
cherchent à exprimer leur mécontentement concernant le
rapport de la FAO peuvent toujours signer la lettre ouverte au
Directeur Général de la FAO, soutenue par GRAIN et plus de
1500 organisations et individus, disponible sur le site de GRAIN
(www.grain.org).

Coalition de la Société du Deccan (Andhra Pradesh)pour la
défense de la biodiversité (The Deccan Développement Society,
AndhraPradesh(AP) Coalition in Défense of Diversity) et de
GRAIN.

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