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Pluies diluviennes à Ouaga : Menace écologique sur Bangr-wéogo

Publié le jeudi 24 juillet 2008 à 11h33min

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La saison des pluies est vécue avec satisfaction, mais aussi avec inquiétude par les populations burkinabè. Si en cette période de l’année les ouagavillois rompent par moments avec la chaleur torride et la poussière légendaire, il y a qu’ils sont pour la plupart dans une peur bleue quand les nuages s’obscurcissent à l’horizon, les inondations causées par les fortes pluies n’étant pas du tout à écarter.

Le parc Bangr-wéogo, du fait des abondantes précipitations des vendredi 18 et samedi 19 juillet 2008, a connu un déchaînement des eaux, ce qui n’a pas été sans risques pour la petite faune et la flore de cette forêt naturelle, poumon de la capitale.
Le vendredi 18 juillet courant, Ouagadougou a eu les faveurs du ciel avec une pluie bienfaisante. Le lendemain samedi, Dame nature a été encore plus généreuse en ouvrant grandement ses vannes, pratiquement du matin au soir. Cela n’a pas été sans dommage.

En plus de certaines routes rendues impraticables, des inondations ont été signalées à Loumbila, dans la province de l’Oubritenga, et à Bouansa, dans l’arrondissement de Boulmiougou. On y a, en effet, enregistré des dégâts énormes. Au parc Bangr-wéogo, la situation était quasi identique. Nous y avons effectué un déplacement dans l’après-midi du samedi. La désolation était bien visible sur le visage des gardes verts, impuissants face à la furie des eaux de pluie.

Le maître des lieux, absent, a alors chargé, au téléphone, un de ses administrés de nous guider pour constater l’ampleur de l’inondation. Il s’agit du chef de service audiovisuel, Arnaud Armand, qui s’est montré très disponible.
Les inondations au parc Bangr-wéogo, selon notre interlocuteur, sont récurrentes. Chaque année, la forêt est inondée, occasionnant des préjudices divers. Cette situation cyclique est favorisée par l’afflux des eaux de pluie en provenance des différents canaux de la capitale. Le week-end dernier, l’inondation a pris en otage une bonne partie du parc, le bureau de l’agent chargé de la faune et de la flore, situé au côté ouest de la réserve forestière, ainsi que le restaurant.

Les visites ont alors été automatiquement suspendues, le temps que les eaux se retirent. Il fallait pour cela, de l’avis du guide Arnaud Armand, attendre deux à trois jours. C’est également le temps qu’il fallait observer avant de pouvoir faire le point sur les pertes éventuelles des différentes espèces animales et végétales qu’abrite Bangr-wéogo.

Un phénomène cyclique

Lundi 21 juillet dans la matinée, nous sommes retournés sur nos pas. En fin de matinée, c’est le directeur du parc, Moustapha Sarr, qui nous reçoit dans son bureau. Comme notre guide du samedi soir, monsieur Sarr confirme que les inondations à Bangr-wéogo sont un phénomène qui s’observe depuis quelques années déjà. Pratiquement depuis 2002, le problème est pris à bras-le-corps par le maire de Ouagadougou.
A cette période, l’inondation n’avait pas l’ampleur actuelle, mais elle était tout de même une réalité. Le parc est une cuvette qui a été dans le temps prise comme un exutoire pour les eaux de ruissellement. Dans le plan d’aménagement de la ville, les anciennes rivières ont été transformées en canaux.

Ces canaux, de nos jours, qui s’ouvrent sur Bangr-wéogo sont ceux de Zogona, de Paspanga, de l’hôtel Silmandé… L’impact sur la forêt des eaux qui y transitent, foi de Moustapha Sarr, n’a malheureusement pas été pris en compte par les différentes études. Les projets ont toujours pris fin au niveau de la clôture du parc.
Depuis que monsieur Sarr est à la direction de la forêt classée, le phénomène a été signalé à qui de droit. Les ressources de la mairie ne permettant pas d’engager des travaux qui nécessitent des fonds énormes, le maire de la commune a alors adressé en 2001 une correspondance au ministère chargé de l’Urbanisme ainsi qu’à celui chargé de l’Environnement.

Vivement des mesures d’urgence

Les inondations à Bangr-wéogo, chaque année, vont croissant parce que la ville se construit, d’où une réduction des surfaces de pénétrations des eaux pluviales et une transformation des routes en canaux secondaires. Ces derniers communiquent avec les grands canaux, qui, à leur tour, trouvent accès dans le barrage et finalement dans le parc urbain.

A Ouagadougou, en saison sèche, les canaux servent de poubelles et une fois l’hivernage de retour, les eaux pluviales charrient les déchets qui se retrouvent dans le bois de Boulogne, sans qu’il n’y ait un aménagement spécifique pour permettre leur sortie. Il y a donc encombrement, pollution : résultat, les eaux montent. Le parc se noie jusqu’à une certaine limite.

L’inondation s’étale et atteint les quartiers riverains. Pendant un mois et plus, Bangr-wéogo est alors en situation inondée. L’eau monte en certains points à plus de un mètre. La petite faune non aquatique est noyée. C’est également la noyade des plantes non hydrophiles, des bâtiments, de tout le réseau d’irrigation et électrique. La clôture du parc zoologique (à presque 2/3) a sauté. C’est le perpétuel recommencement chaque année.

Eviter une catastrophe écologique

Avec la saison des pluies, qui ne fait que s’installer, une catastrophe écologique n’est pas à écarter. Mais, selon le directeur du parc, la situation est maîtrisée. Toutefois, a-t-il ajouté, il faut une procédure d’urgence. La commune, a dit monsieur Sarr, s’échine à faire de Bangr-wéogo un joyau, mais quand arrive la saison des pluies, c’est la désolation.

Les appels du maire ont heureusement été entendus au plus haut sommet de l’Etat et le Premier ministre a instruit le chef du département de l’Urbanisme de résoudre le problème. Le ministre Vincent T. Dabilgou a donc relancé le dossier. Il a donné des instructions à la Société nationale d’aménagement des terrains urbains (SONATUR) pour régler le problème.
Des appels d’offres ont été lancés et des bureaux d’étude ont déjà été commis pour les travaux. D’autres appels sont en cours pour la réalisation d’ouvrages de franchissement et la réhabilitation des pistes. La question sera alors totalement résolue, foi du patron du parc.

Le Conseil scientifique et technique a marqué sa disponibilité pour accompagner le processus. La direction du parc a souhaité être intimement associée à chaque étape afin de donner des directives dans le sens de la préservation et de la conservation de la biodiversité, qui a été constituée au prix de très lourds sacrifices de la part de la commune de Ouagadougou et du ministère en charge de l’Environnement.
Samedi 19 juillet dernier, les gardes verts ont pu faire remonter les animaux et, heureusement, il n’y a pas eu de perte. Avec le trop plein des eaux, il y a des risques que les crocodiles quittent leur zone naturelle. Mais rassure le chef du parc, ils ne sont pas agressifs.

D. Evariste Ouédraogo

L’Observateur

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