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Darfour : La CPI veut foutre le bordel

Publié le lundi 14 juillet 2008 à 13h01min

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Un événement en chassant un autre, l’absolution du dictateur zimbabwéen, Robert Mugabe, par le Conseil de sécurité des Nations unies, à l’issue de la mémorable mascarade électorale dans son pays, s’incline évidemment devant la mise à prix ébruitée par RFI de la tête de son homologue soudanais, Omar el-Béchir, par la Cour pénale internationale (CPI).

Dans l’attente que le procureur, Luis Moreno-Ocampo, soit suivi, ce lundi 14 juillet, dans son réquisitoire par le panel des juges de la Haye, l’effet d’annonce ne cesse de diviser les protagonistes de la crise du Darfour. Car, il s’agira d’amender les preuves de la culpabilité du maître de Khartoum dans les crimes de guerre ; crimes contre l’humanité et de génocide dans la province occidentale du Soudan dont on voudrait l’accabler. Preuves qui, si elles sont avérées et réunies, pourraient commander une inculpation et l’émission d’un mandat d’arrêt contre le président Omar el-Béchir.

Certes, le chemin est encore long, mais l’on ne peut s’empêcher de s’interroger sur l’opportunité d’une telle démarche au moment où l’ONU et l’Union africaine peinent à trouver un complément d’effectifs et de moyens logistiques afin de pacifier ce même Darfour qui a déjà enregistré, excusez du peu bonnes gens, quelque 300 mille morts et deux millions de déplacés. Difficile, en tout cas, pour Luis Moreno-Ocampo d’espérer enrôler si facilement le requin Béchir, quand on sait que la CPI est royalement ignorée par le Soudan qui, d’ailleurs, se trouve sous les ailes protectrices de la Chine et de la Russie, les mêmes membres permanents du Conseil de sécurité qui viennent de sauver et la tête et le fauteuil de la relique de Harare.

L’allégresse affichée des rebelles soudanais et du voisin tchadien pourrait être de courte durée, car nul ne peut deviner la réaction d’un prédateur blessé, fût-il du désert. Mais si Omar el-Béchir, l’intime ennemi et parfait homologue du maître de Djamena, venait à être lâché par les siens, il entrerait dans l’histoire de la Cour pénale internationale, car ce serait la première fois qu’un président en exercice est frappé par une telle action.

Faut-il le rappeler, en effet, deux autres chefs d’Etat avaient fait les frais des justiciers de la Haye mais, eux, avaient le malheur de ne plus être aux affaires et, comme on le dit, "malheur aux vaincus". Il s’agit du Serbe Slobodan Milosevic inculpé en mai 1999 par le Tribunal pénal pour l’ex-Yougoslavie et du Libérien Charles Taylor poursuivi depuis 2003 par la Cour spéciale pour la Sierra Leone.

Bien entendu, demain n’est pas la veille où la tête de l’affreux Omar el-Béchir viendra étoffer le prestigieux tableau de chasse de la CPI, et l’avertissement du ministre d’Etat soudanais aux Affaires étrangères, Al Samani Al-Wasila, vendredi, avant la sentence de ce 14 juillet se veut solennel. "S’il y a une décision de la CPI concernant le président Béchir, cela peut détruire le processus de paix". Message certainement bien reçu par le pandore diplomate, Djibrill Bassolé, le Burkinabè envoyé représenter spécialement le S.G. de l’ONU et l’UA au cœur de la fournaise darfourie.

Nous ne croyons si bien dire quand, au moment où nous traçons ces lignes, la Ligue arabe se met en rangs serrés pendant que le Conseil de sécurité de l’Union africaine élève la voix pour dénoncer "de telles poursuites qui risquent de miner tous les efforts accomplis dans la région". Foi de la Résolution 15.93 du 31 mars 2005 qui privilégie la nécessité de l’apaisement et de la réconciliation.

Il faut dire, en vérité, que l’ogre de Khartoum n’est pas spécialement à plaindre même si, à sa décharge, on a la détestable impression que cette justice internationale est à géométrie variable et qu’elle s’abat uniquement sur les dirigeants de petits pays, surtout quand ceux-ci se piquent de ne pas filer droit. Ces Américains qui poussent d’ailleurs à la roue ne sont-ils pas les mêmes qui violent allègrement le droit international et qui ne veulent pas se plier aux textes supranationaux (qu’ils ne ratifient pas toujours du reste) qui, à leurs yeux, ne sont bons que pour les autres ?

La rédaction

L’Observateur

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